5ème dimanche du Temps Ordinaire — Année A de la férie
Calendrier romain | Lectures de la messe
Première lecture « Ta lumière jaillira comme l’aurore » Is 58, 7-10
Psaume Lumière des cœurs droits,
le juste s’est levé dans les ténèbres.
ou :
Alléluia ! Ps 111 (112),.4-5, 6...
Deuxième lecture « Je suis venu vous annoncer le mystère du Christ crucifié » 1 Co 2, 1-5
Évangile « Vous êtes la lumière du monde »
Moi, je suis la lumière du monde, dit le Seigneur. Celui qui
me suit aura la lumière de la vie.
Chers Frères et Sœurs,
Notre modèle est le Seigneur, tout nous vient de lui. Au
début de la célébration, le prêtre peut vous saluer par la formule liturgique
utilisée tout à l’heure : La grâce de Jésus notre Seigneur, l’amour de
Dieu le Père et la communion de l’Esprit Saint soient toujours avec vous.
Lorsque le Seigneur affirme que nous sommes le sel de la
terre et la lumière du monde, il veut dire que nous le sommes parce que nous
avons reçu un don une grâce qui nous vient de lui et que nous sommes un avec
lui. En célébrant l’Eucharistie, qui est une action de grâce, nous le faisons
par lui, avec lui et en lui, pour que Dieu notre Père soit glorifié.
Parlons un peu du sel… Nous avons fêtés sainte Agathe
mercredi dernier, et j’ai béni du pain et du sel dans une paroisse en l’honneur
de sainte Agathe, cela m’a permis de faire l’inventaire des variétés de sel, du
Jura aux Alpes, en passant par celui de la mer morte, de la méditerranée à
l’Atlantique, en grain, de table avec des moulins, ou pour les routes. S’il
faut en user, c’est avec modération pour le salut de nos artères. Mais il en
faut, le bétail en a aussi besoin.
La liturgie en utilisait avant le baptême, ce n’est plus le
cas dans le rituel actuel. On mettait du sel sur les lèvres de l’enfant en lui
disant : « Reçois le sel de la sagesse pour que le Seigneur te soit
propice dans la vie éternelle». Les mamans songent aux réactions. Saint
Augustin nous rapporte son usage en Afrique du Nord, à une époque où
fréquemment on ne recevait le baptême qu’à l’âge adulte. Je vous le cite à
titre de curiosité spirituelle dans ses confessions. C’était au moment de la
naissance de l’enfant : J’avais entendu parler, dès le berceau, de la
vie éternelle qui nous est promise par l’humilité du Seigneur notre Dieu…; et
j’étais marqué du signe de sa croix, assaisonné du sel divin, dès ma sortie du
sein de ma mère, qui a beaucoup espéré en toi.
La perte de saveur du sel signifie que nous ne sommes plus
en communion avec lui. Cela peut se produire lorsque nous sommes cause de
scandale, et qu’il nous rattrape, malgré nos qualités et la qualité de notre
travail.
Comment le sel peut-il
s’affadir sinon par l’oubli de celui qui nous a aimé et tout
donné en se donnant lui-même? Où en suis-je dans ma relation avec le
Seigneur ? Nous n’en finissons plus de vagabonder dans certaines
distractions parfois. Il y a tant de sujets à approfondir, de réunions, de
travail que nous en oublions celui qui nous attend, sans parler de nos propres
familles. Thérèse d’Avila elle-même, si ma pauvre mémoire ne me trahit pas, se
plaignait d’avoir consacré trop de temps aux romans de chevalerie, en oubliant
un peu le Seigneur. Elle avait ma foi un esprit de conquérante spirituelle et
le goût des châteaux intérieurs à construire. Non point châteaux en Espagne,
mais châteaux spirituels. C’était le temps des Conquistadors. Le Seigneur est
parti à la recherche de ce sel qu’elle était et l’a purifié pour nous en faire
cadeau. Rien n’est impossible à Dieu, il peut tout, il est le tout-puissant en
miséricorde.
«Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du
monde» (cf. Mt 5, 13-16). Ce sont, dit le pape François, des images qui font
penser à notre comportement, car aussi bien le manque que l’excès de sel
rendent la nourriture immangeable, de même que le manque ou l’excès de lumière
empêchent de voir. Qui est celui qui peut nous donner d’être le sel qui donne
la saveur et préserve de la corruption, ainsi que la lumière qui éclaire le
monde? Uniquement l’Esprit du Christ! »
Dans la lumière du monde mise sur un lampadaire, dans une
ville située sur une haute montagne comment de pas y voir Jésus mis en croix
qui va attirer tous les hommes à lui ?
Ce n’est plus la montagne du Thabor, mais le Golgotha, ce
n’est pas encore le mont de l’Ascension. La lumière qu’il nous donne est d’une
certaine manière obscure, il s’offre en sacrifice et vient donner sens à nos
vies. Une crucifixion et un homme qui meurt sur une croix, ce n’est pas un
spectacle très lumineux. Il est si terrible que seules des femmes ont le
courage de rester au pied de cette croix avec Jean.
En quoi est-ce une lumière ? Ce n’est pas qu’une leçon de
philosophie que donne Jésus. Il révèle là force de l’amour de Dieu qui se donne
totalement.
Comment va-t-elle se diffuser cette lumière? En prenant
Jésus chez nous. Et quel Jésus ? Celui qui est ressuscité, certes et
heureusement. Saint Paul ne nous dit pas que dans la vie de tous les jours nous
avons sortir en grands triomphateurs. Comment le pourrions-nous aujourd’hui
alors que nous avons si peu de moyens ? Nous avons à vivre en ressuscités,
en revêtant le Christ de tous les jours, en vivant comme lui a vécu en passant
avec lui par où il a passé. « Parmi
vous, je n’ai rien voulu connaître d’autre que Jésus Christ, ce Messie
crucifié. C’est dans la faiblesse, craintif et tout tremblant que je me suis
présenté à vous », dit saint Paul.
La puissance de Dieu ne se manifeste pas à la manière d’un son
et lumière ou d’un de ces grands et splendides spectacles du show bizz. Elle se
manifeste en nous donnant d’être conformés à Jésus crucifié. C’est son Esprit
qui nous donne, ainsi que le dit Isaïe de partager son pain avec celui qui a
faim, d’accueillir les pauvres, de couvrir celui qui est sans vêtement, de ne
pas nous dérober pas à notre semblable… « Alors ta lumière jaillira
comme l’aurore. »
« A trop parler de lumière, nous risquerions de créer
de l’ombre » disait Christiane
Singer dans un de ses derniers livres : Où cours-tu ? Ne sais-tu pas
que le ciel est en toi ? S’il
est vrai que nous devons éviter tout syncrétisme, il n’en est pas moins vrai
que le meilleur peut devenir le pire et se transformer en fanatisme. Le pape
François nous met fréquemment en garde contre cette dérive, en parlant de la nécessité
d’une annonce de l’Évangile par attraction. Le fanatisme n’est pas une qualité
chrétienne. Nous n’adorons pas le même Dieu si nous le sommes.
Pour conclure, vous me permettez de mentionner un passage de ce livre de Mme Singer où elle parle d’une petite lumière devant une image de Notre-Dame : « Il y a cette vieille à Prague qui de 1948 à 1968, jour après jour, a allumé un cierge sur son balcon devant une icône de la Vierge. Onze fois, nous dit le guide, elle fut sous le régime communiste mise en prison et relâchée. Mais que faire en prison d’une vieille qui mâchonne des prières? Rien n’eut raison de sa tranquille obstination. Aujourd’hui on montre aux touristes le balcon de cette douce têtue, dissidente anonyme. Le lumignon brûle encore, électrifié. » … Elle eût préféré qu’il ne soit pas électrifié, mais puissions-nous faire brûler notre petit cierge intérieur sans qu’il s’éteigne jamais avec le secours de l’Esprit-Saint, pour être témoins de l’invisible, sel de la terre et porteur de la lumière du Christ, porteurs et témoins de la Vie. Amen.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire