dimanche 5 octobre 2025

Fides Quoi?

 


5 octobre 2025

 27ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine III du Psautier) — Année C

 
 

Lectures de la messe


Homélie 

Chers frères et sœurs,

Jésus marche aujourd’hui vers Jérusalem et nous sentons qu’il a le souci de former ses disciples pour annoncer la Bonne Nouvelle jusqu’aux extrémités de la terre. Chez les disciples, en arrière-plan de ce chapitre, nous percevons un désir de pouvoir qui n’est pas que spirituel, quant au don de guérison et à la venue du Royaume, jusqu’au pardon des péchés. Les rapports entre eux manifestent des tensions. Jésus leur a déjà parlé des scandales et du pardon.  Il paraît presque ironiser sur la finalité de leur désir d’une foi plus grande.

En entendant cette péricope, on pense au pouvoir des clefs dont parle Jésus dans Saint Matthieu 16,19 après la confession de foi de Pierre, avant la Transfiguration. Jésus prend des exemples tirés de la nature, selon son habitude pour les faire avancer.

Nous n’allons pas nous perdre dans des recherches approfondies sur la botanique biblique. L’arbre dont il parle Jésus était-il un mûrier ou un sycomore ? Pourquoi dit-on un plan de moutarde dans le texte, alors que la plante est le sénevé et la moutarde le produit, ni ergoter sur la grandeur d’une graine d’un figuier sycomore ou d’un mûrier et celle d’un grain de sénevé.  Mais ça peut-être intéressant de se pencher sur le sujet.

La foi que désirent les Apôtres paraît être un moyen pour avoir plus de pouvoir et une plus grande prééminence quant au capacités d’accomplir des guérisons et des miracles. Or Jésus, veut qu’ils se sentent et deviennent des serviteurs. J’apprécie cette sorte de paradoxe que vivra Pierre. Dans saint Jean, Jésus l’interrogera par trois fois sur son amour pour lui, après sa résurrection. Ses réponses seront une réparation par son amour de ses reniements. La foi ne nous rend pas semblables à des rocs bien armés selon nos critères, mais nous rend au contraire fragiles, à la manière de Jésus qui va donner sa vie. Elle va nous rendre forts spirituellement en nous conformant à lui et en nous aidant à le suivre. Jésus est le serviteur, il est notre serviteur. Jésus, plus loin mettra en valeur la foi du lépreux, de cet étranger revenu à lui et il parlera de la venue du royaume qui passe par le scandale de la Croix. Le Royaume est parmi vous, il est aussi et d’abord au-dedans de vous, au-dedans de nous. Le premier et principal chemin à accomplir, il est là. Mais il ne peut s’accomplir totalement en solitaire, il se fait en communion avec l’Eglise. Même un ermite porte l’Eglise dans son coeur. Nous sommes solidaires. Personne ne peut dire je fais mon salut à moi.

A propos de la foi, classiquement on parle de foi vécue, active (fides qua) et des doctrines (fides quae).

Suivre Jésus ne sera jamais dominer, mais aimer et aimer c’est vivre les mystères joyeux, lumineux, douloureux et glorieux avec Jésus et en Eglise. Ce n’est pas confortable.

Les deux premières lectures sont  à ce titre impressionnantes, autant Habacuc  que Saint Paul. Habacuc à droit à quelques allusions dans le Nouveau Testament notamment par ces mots : « Le juste vivra par la foi » Rom 1:17, Gal 3:11, Hé 10:38 . Le prophète proteste contre les visions et les annonces de malheur qu’il doit faire, vous les avez entendues. En même temps, il engage à la confiance et à la foi en la fidélité de Dieu.  « C’est une vision pour le temps fixé ;  elle tendra vers son accomplissement, et ne décevra pas. Si elle paraît tarder, attends-la : elle viendra certainement, sans retard. Le juste vivra par sa fidélité. » Cette dernière expression donne lieu à des discussions. Saint Paul et la tradition chrétienne, les Pères ont étendu le mot fidélité à celui de foi. Le juste par la foi vivra.

Saint Paul engage à la même persévérance et fidélité. « N’aie donc pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur, et n’aie pas honte de moi, qui suis son prisonnier ; mais, avec la force de Dieu, prends ta part des souffrances liées à l’annonce de l’Évangile. »

De quelle manière le faire sinon de celle à laquelle nous invite le psaume : avec la joie : « Venez, crions de joie pour le Seigneur, acclamons notre Rocher, notre salut ! Par nos hymnes de fête acclamons-le ! » Le souci de la mission était porté par le Pape François, vous vous souvenez peut-être du début de son exhortation : « La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide intérieur, de l’isolement. Avec Jésus Christ la joie naît et renaît toujours. » Elle est destinée à toucher tous les hommes.

Le souci d’universalité présent dans le cœur de Ste Thérèse de l’Enfant Jésus, dans son couvent, nous le connaissons. Elle portait en elle toutes les vocations, dont celle de missionnaire : « Je voudrais être missionnaire non seulement pendant quelques années, mais je voudrais l'avoir été depuis la création du monde et l'être jusqu'à la consommation des siècles... »  De sa communauté est issue une sœur du carmel de Saïgon fondé par celui de Lisieux en 1861. Quand les sœurs de Saïgon créent un nouveau carmel à Hanoï, Thérèse émet le vœu de partir là-bas. Son histoire touche : le désir de Thérèse est entravé par la découverte de sa tuberculose. Dilater son cœur à la dimension de celui de Jésus et transmettre la joie de l’Evangile était son plus grand désir et il l’est encore. La mission d’un disciple du Christ et de tout baptisé ne s’arrêtera jamais, jusqu’au jour où il sera tout en tous.

Saint Paul demande de ne pas avoir honte de lui, alors qu’il est en prison. Il  dit au début de l’épître aux Romains : « Je n’ai pas honte de l’Évangile, car il est puissance de Dieu pour le salut de quiconque est devenu croyant, le Juif d’abord, et le païen. Celui qui est juste par la foi, vivra.(Rm 1,16-17) »  Cette foi lui procure la joie, une joie courageuse et surnaturelle qui doit être aussi la nôtre, parce que nous sommes habités par le Seigneur… grâce à une foi vivante.

La foi et l’amour vont de pair et nous avançons dans l’espérance sur son chemin. Le pape Léon disait à l’audience d’hier qu’espérer, c’est choisir. Cela signifie au moins deux choses. La plus évidente est que le monde change si nous changeons. Le second sens est plus profond et plus subtil : espérer, c’est choisir car ceux qui ne choisissent pas désespèrent. Choisissons le Christ et la joie. Demandons à Marie qui portait la Bonne Nouvelle de l’Evangile de nous transmettre sa joie : « Mon esprit tressaille de joie en Dieu mon Sauveur » (Lc 1, 47). Amen


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