Source : Figaro.
22 AVRIL 2018 - 4ème Dimanche de Pâques — Année B
Lectures de la messe
Première lecture« En nul autre que lui, il n’y a de salut »Ac 4, 8-12
PsaumeLa pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle. Ps 117 (118), 1.8-9,...
Deuxième lecture« Nous verrons Dieu tel qu’il est »1 Jn 3, 1-2
Évangile« Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis »
Frères et sœurs,
L’image du Bon Pasteur nous est familière, nous songeons aux
grands troupeaux de moutons lors des hivernages chez nous, à ceux qui craignent
le loup dans les montagnes. Il n’y a presque rien de plus beau qu’un petit
agneau au printemps, pour qui est un peu sentimental, sinon sensible. En
entendant cet Évangile du Bon Pasteur, vous aurez fait aussi et avec raison, le
lien avec le roi David. Ayant à combattre le géant Goliath, il laissa toutes
les armes qui l’encombraient pour affronter son adversaire avec une arme
dérisoire, une fronde qui peut faire pourtant beaucoup de dégâts. Il affirmait
avoir combattu l’ours et le lion en
saisissant par sa crinière… Il ne manquait pas de courage, « Le Seigneur, qui
m’a délivré des griffes du lion et de l’ours, me délivrera des mains de ce
Philistin. » L’image ne peut que frapper l’imagination.
Pour arracher sa proie aux lions et aux ours spirituels,
c’est-à-dire au mal, le Seigneur va employer une arme qui est à vue humaine,
non seulement dérisoire mais parfaitement absurde… « Moi, je suis le bon
pasteur, le vrai berger, qui donne sa vie pour ses brebis. » Donner, cela
ne veut pas dire risquer seulement, mais réellement offrir sa propre vie et
mourir. Comment une mort peut-elle changer quelque chose ? Il est vrai
qu’on peut sacrifier sa vie pour que d’autres survivent. Certains gestes sont
loués à juste titre, nous avons eu le cas de cet officier de gendarmerie en
France récemment et il y en a d’autres. Parfois certains rappellent Winkelried.
La légende excuse peut-être certains commentaires aiguisés à 650 ans de
distance.
Le texte grec en traduction littérale a ceci d’intéressant qu’il
utilise une expression singulière. Il dit littéralement : « Le bon
Pasteur dépose sa vie. » Il le fait de manière souverainement libre.
Quelle absurdité apparente. Comment un mort peut-elle changer le cours des
choses et de toute l’histoire ? Il peut laisser une sagesse au mieux, les
murs de belles constructions finissent même par s’écrouler. David a chassé le
lion et l’ours, mais il est resté en vie. Ici Jésus meurt, il dépose sa vie. Il
le fait par amour et par obéissance à son Père. Son acte est conduit par le pur
et vrai amour, il agit en connaissance de cause. Il est libre plus qu’aucun de
nous, aimant son Père et le connaissant parfaitement. On étudiait en philo, je
crois que ça se fait encore, les actes gratuits avec Gide, Sartre et autres...
On en venait à se demander, malgré les dogmes de l’impérialisme philosophique
de l’époque, si un acte gratuit purement humain peut vraiment exister, en
raison de notre humanité. Elle a une liberté relative face à celle de Dieu. La
gratuité absolue et une souveraine liberté humaine ne peuvent qu’avoir des
racines en Dieu. N’est-ce pas en raison de notre pauvreté et de notre réelle
dépendance que le Seigneur est venu nous sauver et que nous sommes
« sauvables ». Notre « non » à Dieu ne peut être que
rarement absolu. Mais ce « non » là, même imparfait, n’est pas sans
conséquence.
Le Fils de Dieu, comme David, part aussi à la chasse, mais à
la chasse de la mort et du mal. La séquence pascale a une formule
marquante : « 3. La mort et la vie ont combattu en un duel
prodigieux, le maître de la vie mourut, vivant Il règne. »
Que fait-il ? Vivant, il règne !
La finale de l’Évangile l’exprime et traduit ainsi le grec :
« J’ai le pouvoir de la donner, j’ai aussi le pouvoir de la recevoir de
nouveau. » Une autre traduction, celle de la Bible de Jérusalem
propose : « J’ai le pouvoir de déposer ma vie et de la
reprendre. » Dans le premier sens, Jésus reçoit à nouveau sa vie du Père.
Mais Jésus le Christ étant Dieu aussi, il peut décider de reprendre sa vie, de
ressusciter. La deuxième formule marque donc plus la divinité de Jésus. Il est
vrai Dieu et vrai homme. La mort ne peut pas l’enfermer. Elle ne peut enfermer
notre bon Pasteur.
« Il a la vie de telle façon qu’il est lui-même la vie
et qu’il fait vivre tout ce qui vit. Voilà ce qui est plus grand que toutes
choses. » dit Augustin. Comment aurait-il pu ne pas ressusciter ?
Les trois personnes de la Trinité agissent toujours
ensemble. La Sainte Trinité ressuscite Jésus.
Notre Bon Pasteur ressuscité met maintenant sa victoire à
notre profit, à notre totale disposition, comme un vainqueur distribue les
dépouilles de l’ennemi. Il s’occupe de soigner les brebis blessées, il va
chercher celles qui se sont égarées ou sont prisonnières des épines. Il y a
tant de manière de se faire piéger. Le danger des richesses… trop de laine et
impossible de se tirer d’un roncier. Parfois, nous sommes tellement occupés de
nous-mêmes que nous ne retrouvons plus notre chemin… Vous vous souvenez
peut-être d’un mouton Australien, un mérinos qui s’était égaré pendant 6 ans.
Il avait failli mourir avec quarante kilos de laine sur le dos… Il a été tondu
en 42 minutes. Le sacrement de réconciliation a un effet guérisseur
extraordinaire en quelques minutes et il ne tond que les péchés.
Nous avons bon nombre de saints qui ont été témoins
dispensateurs de la miséricorde : le saint curé d’Ars, le saint Padre Pio,
Jean Népomucène de Prague et de Saint-Ursanne, et tant d’autres.
Saint Augustin faisait cette prière : « Que les bons
pasteurs ne viennent pas à manquer ! Qu’ils ne manquent pas par notre faute et
que la miséricorde divine ne cesse de les susciter et de les établir. Il est
certain que s’il y a de bonnes brebis il y aura aussi de bons pasteurs. Ce sont
en effet les bonnes brebis qui donnent les bons pasteurs. » (Sermones ad
populum, I, Sermo XLIV, XIII, 30.) N’oubliez
donc pas que vous jouez un rôle fondamental dans l’appel et la formation de vos
bons pasteurs. Que Notre-Dame, mère du Bon Pasteur, appuie notre prière. Amen.
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