dimanche 10 juin 2018

Pécher contre l'Esprit-Saint : conservatisme familial et communautaire seulement?


10 juin 2018

10ème dimanche du Temps Ordinaire — Année B

Première lecture « Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ta descendance... Gn 3, 9-15
    Psaume Près du Seigneur, est l’amour ;       
    près de lui, abonde le rachat. 129 (130), 1-2, 3-4,...
    Deuxième lecture « Nous croyons, et c’est pourquoi nous parlons » 2 Co 4, 13 – 5, 1
    Évangile « C’en est fini de Satan » Mc 3, 20-35


Frères et Sœurs,

1) La famille de Jésus

Entrant dans le temps ordinaire nous aurions espéré voguer sur une mer calme par beau temps et voilà une tempête locale tumultueuse parce que familiale notamment. Des foules accouraient à Jésus, il accomplissait des signes extraordinaires, chassait des démons. Les moralisateurs familiaux disaient : « Il a perdu la tête. ». Peut-être le faisaient-ils avec les meilleures intentions du monde. Pour la lui faire retrouver, ils avaient mobilisé presque de force l’émissaire qui était l’argument le plus fort : La maman. On demandait surtout aux femmes d’obéir en ce temps-là. Elle est présentée comme une tentatrice, comme l’Eve de la première lecture. « Voici que ta mère et tes frères sont là dehors : ils te cherchent. » Que devait penser Marie à ce moment-là ? Elle se souvenait certainement de Jésus au Temple retrouvé parmi les docteurs… Ce n’était pas seulement une lubie d’adolescent. D’ailleurs une idée d’adolescent est importante. Combien d’entre nous, n’ont-ils pas senti germer en eux le goût d’une profession d’un métier, à cette époque de leur vie. Certains prêtres mimaient la célébration de la messe dans leur enfance. Combien d’autres ont laissé se développer leurs grandes idées, alors que les parents devaient réparer leurs désastres de petits chimistes, de mécaniciens, de barbouilleurs, de généraux ou de politiciens, etc…
Marie avait compris ce qui se passait : « Je me dois aux affaires de mon Père. » Jésus s’était occupé de la petite entreprise familiale et l’avait reprise de Joseph. Marie n’avait pas gardé Jésus pour le conserver pour elle, à l’abri et comme une assurance. Il était un don de Dieu, le grand don de Dieu aux hommes. Il était temps qu’il délivre son message. Il devait faire sa vie et la nôtre… en donnant la sienne.
Les gens du village de Jésus et une partie de sa famille voulaient qu’il y retourne et fasse ce qu’il avait toujours fait, s’occuper de sa mère et trouver peut-être une épouse. Sur le principe, réduire une personne à ce qu’elle a fait de nombreuses années en arrière, n’est-ce pas curieux ? Nous aurions souvent de la peine à 60 ou 70 ans de renfiler un vieil habit, ou une robe taille de guêpe. Retourner à vos livres de jeunesse et à vos premières dissertations et compositions… ou exercices scolaires, ça va un moment. Ils finissent par passer au feu ou au broyeur pour de bonnes raisons. La meilleure de ces raisons est que nous changeons. Qu’est-ce qui nous fait changer ? Certains disent des envies et des réussites, mais aussi des échecs et des déceptions, N’est-ce pas, au plus profond : L’Esprit-Saint ? Jésus se fâche avec force contre les gens bornés et butés qui font obstacle à l’Esprit-Saint. Au début de son ministère on voulut jeter Jésus au bas d’une falaise à Nazareth. On n’acceptait pas qu’il ait une nouvelle mission, on n’acceptait pas qu’il ait changé et qu’il change, en restant le même.
Mettre à mort quelqu’un, c’est la meilleure manière de l’empêcher d’agir et faire obstacle à ce qu’il voulait faire, ne serait-ce que propager une idée. Pour transformer une situation c’est l’inverse en bien ou en mal. Vous avez tous en mémoire l’histoire de Lénine que l’on avait amené en train blindé depuis Zurich en Russie. L’Allemagne espérait qu’il y changerait le cours de l’histoire, ce qui arriva. Ce fut en effet terrible. Il fit passer ses idées et organisa la révolution que l’on connaît.

2) Les Scribes

Une deuxième catégorie de personnages est intervenue dans l’Evangile : « Les scribes, qui étaient descendus de Jérusalem, disaient : « Il est possédé par Béelzéboul ; c’est par le chef des démons qu’il expulse les démons. » On a voulu que le message de Jésus ne passe plus. « Mieux vaut qu’un seul homme meure pour le peuple. ». On a voulu empêcher que la miséricorde ne soit pas donnée au monde. Qui : on ? L’idée et la volonté étaient celles du diable, le serpent de la 1ère lecture, mais il a des instruments. C’est le contraire de ce qu’il voulait qui s’est produit, car on n’arrête pas Dieu venu sauver le monde. Ceux qui ne voulaient pas de Jésus ne l’ont pas vu ressusciter. Ce que les uns et autres faisaient, dans notre Évangile, c’était faire obstacle à l’action de l’Esprit-Saint, mais semble-t-il, ce n’était pas encore le péché contre l’Esprit dont parle Jésus.

3) Le péché contre l’Esprit-saint

Ce péché contre l’Esprit-Saint, de quoi s’agit-il ? Saint Jean-Paul II dans son encyclique sur l’Esprit-Saint nous dit ceci : Pourquoi le blasphème contre l'Esprit Saint est-il impardonnable? Saint Thomas d'Aquin répond qu'il s'agit d'un péché «irrémissible de par sa nature, parce qu'il exclut les éléments grâce auxquels est accordée la rémission des péchés»183. Selon une telle exégèse, le «blasphème» ne consiste pas à proprement parler à offenser en paroles l'Esprit Saint; mais il consiste à refuser de recevoir le salut que Dieu offre à l'homme par l'Esprit-Saint agissant en vertu du sacrifice de la Croix.
Dieu seul connaît les frontières de notre cœur et ses circonvolutions spirituelles, mieux encore qu’un cardiologue expérimenté avec toute son utile machinerie et sa chimie. Il y a aussi le mystère de la grâce et les chutes qu’on ne comprend pas. Là encore, il faut de la prudence. Un moine célèbre du 6ème / 7ème siècle nommé saint Jean Climaque avait écrit un ouvrage célèbre chez les orientaux intitulé l’Echelle Sainte. Il a pour but d’expliquer aux moines comment atteindre la perfection en 30 degrés. Il résume son expérience spirituelle. Les icônes représentent une échelle qui monte au ciel et que gravissent de beaux moines bien maigres, saint Antoine l’ermite en tête et Jésus les accueille. Mais voilà, il y en a un bon nombre qui tombent et d’affreux diablotins les font entrer dans la bouche de l’enfer. On les voit prisonniers avec quelques bûchers alentour. Jean Climaque dit toutefois ceci à propos des jugements : J'ai connu un homme qui avait péché à la vue de tous, mais s'en était repenti en secret. Et celui que je condamnais comme luxurieux était chaste aux yeux de Dieu, car il l'avait apaisé par une conversion véritable. Quand tu verras quelqu'un commettre le péché à l'instant de sa mort, même alors ne le juge pas, car le jugement de Dieu est impénétrable pour l'homme.

Conclusion

« Voici ma mère et mes frères. Celui qui fait la volonté de Dieu, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère. » Il s’agit du plus beau compliment adressé d’abord à Marie la nouvelle Eve. « Voici la servante du Seigneur qu’il me soit fait selon ta parole. » a-t-elle répondu à l’ange. Demandons à Marie de nous aider à dire oui à l’Esprit. Amen.

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