12 NOVEMBRE 2023 - 32ème semaine du Temps Ordinaire — Année A
Première lecture« La Sagesse se laisse trouver par ceux qui la cherchent »Sg 6, 12-16
Psaume Mon âme a soif de toi, Seigneur, mon Dieu !Ps 62 (63), 2, 3-4, ...
Deuxième lecture« Ceux qui sont endormis, Dieu, par Jésus, les emmènera avec lui »1 Th 4, 13-18
Évangile« Voici l’époux, sortez à sa rencontre »Mt 25, 1-13
Chers Frères et Sœurs,
Le Seigneur utilise
une image bien connue de l’avènement du Royaume de Dieu, celui d’un gigantesque
repas de noces qui peut nous faire penser aux festivités de la Saint-Martin. Dans
l’antiquité, le banquet était considéré comme la clé de voûte de la civilisation grecque et romaine.
Il y en avait autant chez les dieux que chez les rois et dans les temples. Il
faut mentionner les banquets philosophiques et poétiques. Un des ouvrages de
Platon porte d’ailleurs le nom de « Banquet ». Une curiosité entendue hier soir sur Arte, à
propos de tombes étrusques : les défunts étaient disposés dans des sortes
de chambres qui ressemblaient à une salle à manger de l’époque.
En Israël, on
lit dans le livre des chroniques qu’on en fit durer un 14 jours. Il suffit de
parcourir l’Écriture Sainte pour constater leur fréquence et leur importance.
Jésus était souvent invité et il avait commencé son ministère en participant à
des noces à Cana. Saint Martin quant à lui, est toutefois plutôt présenté comme
un acète frugal. Il ne participe qu’une fois à un repas donné par l’empereur
Maxime, selon ce que rapporte son secrétaire et biographe, Sulpice Sévère. Ce
dernier était originaire de l’Aquitaine Romaine, appréciée déjà pour ses
huîtres et ses vins. (Vie de Saint Martin)
Le banquet dont
parle le Seigneur ne nous sera toutefois servi qu’à la fin des temps. Il nous
demande bien du travail de préparation… c’est-à-dire veiller dans la prière, la
foi et la charité qui en témoigne, ainsi que par notre espérance. C’est la
composition de cette fameuse huile des jeunes filles… Durant ce temps de
préparation il n’y a qu’un appel discret, un murmure du Christ à l’oreille des
cœurs.
Le grand
signal d’alarme dans la nuit, ressemble aux sirènes d’alertes. On ne les entend
qu’épisodiquement lors d’exercices, sans plus faire attention. Cela n’arrivera
pas… L’Écriture rapporte les traitements infligés aux prophètes tués ou tournés
en dérision. Dans les Tintins de nos enfances, il y avait un professeurPhilippulus dont on riait.
Comment nous
émouvoir ? Le Seigneur s’est posé la question dans son dialogue
trinitaire. Comment leur faire comprendre combien leur vie dépend de leur
relation avec moi ? Nous ne sommes pas faits pour vivre éternellement tout
seuls, mais avec lui. Les auteurs de l’ Écriture avaient interprétés les
malheurs qui arrivaient au Peuple élu comme des avertissements : dans le
désert, sous les rois d’Israël, avec des guerres, des invasions, des famines,
des criquets, des maladies, des déportations. Les prophètes avaient été des
lanceurs d’alerte. Venait ensuite une réaction de ceux qui subsistaient :
Il nous faut retourner à une vie à la Loi qui est source de vie. Ce que
l’Écriture essaye de nous dire, est qu’on ne peut dissocier notre vie humaine
de la communion avec Dieu, parce que nous sommes appelés à vivre ensemble un
jour pour toujours avec lui. Cela dépendra de la manière dont nous avons vécu
et aimé ici et maintenant. Cela dépendra des deux commandements qui résument
toute cette fameuse Loi, l’amour de Dieu et du prochain.
L’Écriture
montre que ce retour au Seigneur ne nous était pas possible par nous-mêmes. Nos
capacités humaines sont limitées ! Elles sont dues globalement à une
blessure spirituelle que lui seul est capable de réparer, ce fameux péché. Le
vocabulaire et les psychologues parlent aujourd’hui de résilience. Il s’agit de
trouver des ressources humaines en soi pour se reconstruire. Il s’agit aussi de
retrouver une autre source en soi-même par une forme de silence intérieur, la voix
du Seigneur qui vient nous parler au cœur. Même ceux qui doutent de son
existence disent que la figure de Dieu est utile et même indispensable pour se relever.
Pour aller
plus loin et surtout à la racine d’un relèvement et d’une réconciliation possible, le Seigneur est allé jusqu’à
envoyer son Fils dont le nom de Jésus signifie Dieu sauve. Cela veut dire qu’il
est venu lui-même. Il a voulu tellement sauvegarder notre liberté créée à
l’image de la sienne, il a voulu un oui tellement libre de notre part à l’amour
qu’il nous proposait, qu’il s’est en quelque sorte caché. Nous lui avons fait
ce que nous avons voulu et nous l’avons rejeté. C’est là quelque chose de mystérieux.
Un grand anthropologue, historien et philosophe français, René Girard, a écrit parmi de nombreux ouvrages, un petit
bouquin devenu célèbre : « le bouc émissaire ». Il essaye d’y
rendre compte de cette étrange loi de la violence humaine qui cristallise sur
une personne ses contradictions et l’origine de ses fractures internes. Jésus est
devenu pour nous un bouc émissaire, mais il a échappé à la mort comme l’oiseau
pris au filet de l’oiseleur. Sa résurrection a été sa réponse à un rejet qui a
un aspect collectif et personnel. Nous ne pouvons nous approcher de ce grand
mystère, qu’en intégrant bien dans notre réflexion que Dieu est hors du temps,
mais aussi que les conséquences d’une action humaine ont une résonnance hors du
temps. Jésus est devenu un pont, un chemin, un passeur.
Les lectures de ce dimanche qui nous rapproche de la fin de l’année liturgique, viennent nous rappeler que si notre vie ici-bas a une fin, elle aussi, elle n’en a pas en définitive. « Ceux qui sont endormis, Dieu, par Jésus, les emmènera avec lui ». Il ne s’agit pas de gober tout ce qu’on dit ou écrit, sur la vie après la vie et les états de mort imminente, mais de se laisser interpeller, de revisiter notre espérance sur ce sujet. Ce sont les termes employés ce jeudi soir par l’archevêque émérite de Paris dans une conférence. Il est ancien médecin.
Il
suffit de se tenir un peu au courant des recherches et découvertes faites
depuis environ une centaine d’années sur la fin de la vie, le cerveau, la
matière et autre physique quantique, l’espace et le temps, pour se rendre
compte qu’il est temps de réviser nos vieilles manières de penser. Lorsqu’ on
se rapproche ou qu’on a passé la barrière de ses 70 ans, nous percevons avec
plus d’intérêt que c’est notre éternité à nous qui est devant nous et que
personne n’a le droit de nous en priver, ni les scandales, ni les grands
titres. Elle ne dépend pas de nous mais de celui qui est amour. Les chanteurs
utilisent souvent les mots : Ma vie. Dans l’une d’elle il y a ceci : « Ma
vie à moi c’est un combat que j’ai mené et si Dieu veut me pardonner, J’irai
plus haut que les nuages… » Bien sûr et même nous ressusciterons. Nous
l’espérons les uns pour les autres… Nous avons déjà la chance d’être invités au repas des noces de
l’Agneau lors de chaque Eucharistie. On ne peut conclure sans le pape François :
parlant mercredi de Madeleine Delbrêl et de sa passion pour
l’évangélisation : Madeleine se sent appelée à "vivre entièrement et
à la lettre l'amour de Jésus, afin qu'en l'aimant sans réserve et en se
laissant aimer jusqu'au bout, les deux grands commandements de la charité
s'incarnent en nous et n'en fassent plus qu'un" .
Marie, Mère de
l’Église et notre Mère prie pour nous. Amen.
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