dimanche 18 décembre 2016

Le nom du petit


P. Marko Rupnik, s.j.


4ème Dimanche de l'Avent 
1ère lecture : « Voici que la vierge est enceinte » (Is 7, 10-16)
2ème lecture : Jésus-Christ, né de la descendance de David, et Fils de Dieu (Rm 1, 1-7)
Evangile : Jésus naîtra de Marie, accordée en mariage à Joseph, fils de David (Mt 1, 18-24)

Frères et Sœurs,

Lorsqu'un enfant arrive une des grandes questions est celle du nom. S'agit-il d'un garçon ou d'une fille? La technique dans les pays "riches", permet de limiter le questionnement, mais certains parents préfèrent attendre le cadeau surprise. Quand vous avez choisi le nom de vos enfants, si vous avez eu le bonheur de vous appliquer à ce type de prophétie parentale, vous aurez peut-être interrogé la tradition, mais tout à coup aura surgi du milieu des étoiles, « le nom », parmi les stars, les chanteurs et vos héros favoris, ou même des hommes politiques que vous admirez, des rois et des reines, un délicieux prénom rétro ou bien toute une série où vous aurez intégré une généalogie parentale. Peut-être avez-vous même essayé de tester si l’officier d’Etat civil acceptait tout votre arbre de Jessé ?  Sur un site (français) donnant des conseils, j’ai lu que la loi ne fixait pas de restriction, mais qu’une liste trop longue risquait de poser quelques soucis administratifs ou informatiques. « De plus, n'oubliez pas qu'à chaque inscription ou renouvellement de carte d'identité, votre enfant devra les recopier) et  citation « sans s'emmêler les pinceaux. »
Voilà pour la bonne humeur.

Aujourd’hui nous est révélé par la bouche de l’ange, le nom de Jésus. Aimable questionnement : Pourquoi est-ce que dans saint Luc, c’est à Marie que l’ange dit : « Tu l’appelleras du nom de Jésus. » Et dans saint Matthieu, c’est Joseph à qui est révélé ce nom ? 
Le piquant est  que le texte un peu plus loin paraît vouloir citer manifestement le passage d’Isaïe entendu tout à l’heure. La Vierge enfantera un fils « On lui donnera le nom d’Emmanuel, qui se traduit : « Dieu-avec-nous ». »  Or, la traduction qui nous est donnée de ce texte de Matthieu nous disait : « elle enfantera un fils, qu’elle appellera Emmanuel. » Ce n’était pas on, mais tu, pas lui, mais elle. Quelle option choisir ? Je vous laisse le bonheur de trancher en allant parcourir les notes des différentes versions de vos bibles. Mais nous pouvons toujours nous dire que c’est au moins une invitation pour les parents à se mettre d’accord.
Quant au fond, n’est-ce pas une invitation à la joie qui nous est donnée, à une très grande joie, Dieu avec nous, Dieu sauve. N’est-ce pas une nouvelle qui ne peut être qualifiée que d’extraordinaire ?
La nouvelle paraît tellement incroyable en elle-même que Dieu s’est caché en quelque sorte derrière l’image d’un prince, d’un roi de la terre.
Acaz était dans la pire des situations, assiégé par Samarie et Damas. Par cette prophétie, il est donné une espérance à la lignée de David, par un descendant : Ézéchias. Mais il va tant décevoir que le prophète se tournera vers un autre roi qui sera donné à Juda et à tout Israël. Ils étaient dans l’attente d’un sauveur… Pourtant jusqu’à aller imaginer que « Dieu avec nous » voudrait dire plus que Dieu nous est favorable et marche avec nous, l’auraient-ils pu ? C’est pourtant ce qui se passe, Dieu lui-même, en personne vient nous sauver. Le pas à  franchir sera encore plus grand pour tout le peuple. 
La grande Antienne ô pour ce 18 décembre est : « O Adonaï, guide du peuple d'Israël, qui êtes apparu à Moïse dans le feu du buisson ardent, et lui avez donné vos commandements sur le mont Sinaï, armez votre bras, et venez nous sauver. »
Pensons que c’est Dieu, Adonaï, qui s’est révélé à Moïse dans le buisson ardent, le tout autre, le tout-puissant, celui dont on ne peut voir la face sans mourir, c’est lui qui vient en personne. Il vient honorer lui-même sa promesse dont il est seul à connaître tout le contenu. Il vient dans une lignée royale, mais il va se cacher, renoncer non seulement aux attributs de sa divinité, mais d’une royauté telle qu’on la concevrait de tout temps. Il ne vient pas en détenteur d’une autorité exécutive civile dirait-on aujourd’hui. Il ne vient pas  en autocrate, écrasant tout ce qui le contredit et s’oppose à lui. Il vient humblement non pas seulement sous les traits d’un petit enfant, mais comme un enfant, en enfant vrai et bien réel. Il s’est incarné dans le sein de Marie, il a attendu 9 mois dans son arche d’alliance. Il a été fragile comme tous les enfants qui ne sont pas encore nés. Marie a veillé sur lui, l’a attendu et entouré par son corps et de toute son âme.

Joseph prend Marie chez lui avec l’enfant qui va naître d’elle. Jésus a voulu naître dans une famille. Joseph va lui donner toute sa légitimité. Lui pauvre pécheur, lui l’homme juste aussi, accueille le Messie. Il est justifié par ce petit enfant qu’il fait entrer dans sa maison, dans la maison de David. Il accueille Marie son épouse, ainsi que l’ange le lui a demandé. Quelle foi en cet homme. Prends chez toi, Marie, ton épouse, dit l’ange dans la version de saint Matthieu… Vous aurez pris garde au fait que nous retrouvons cette sorte de dialogue mentionné au début de nos réflexions, si nous pensons à   la prière où sont mentionnés les saints dans la prière eucharistique. Permets qu’avec la Vierge Marie, la bienheureuse Mère de Dieu, avec saint Joseph son époux… Marie est la première, et d’une certaine manière aide Joseph à grandir aussi. Ton époux, son époux… Puis vient le cortège de tous les saints et de tous nos prénoms. Dieu a besoin de messagers d’anges pour porter de par le monde et autour de nous la Bonne Nouvelle… C’est pour cela que j’aime à les mentionner dans la prière. C’est une foule immense qui nous accompagne et nous tire vers le haut. Dieu veut avoir besoin de nous, il veut se faire faible et dépendant pour se manifester au monde. Nous avons de par notre baptême été mis à part pour annoncer l’Évangile de Dieu. C’est à Bethléem que nous allons nous mettre à l’école de Jésus et de la Sainte Famille, déjà les anges nous y invitent. Le pape pour ses 80 ans hier, mentionnait que durant l’Avent nous apprenons «l’histoire d’un Dieu qui a voulu marcher avec son peuple et se faire, à la fin, Un, Homme, avec chacun de nous». L’enfant de la crèche est Dieu avec nous. Préparons-nous à l’accueillir en ces derniers jours qui nous séparent de Noël. Même si à un moment nous réalisons que nous n’avons toujours rien compris, il n’y a rien à craindre de lui, il est Dieu avec nous, Emmanuel, Dieu qui sauve, Jésus. Amen.




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