Gauguin : D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?
21 JUILLET 2024 - 16ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine IV du Psautier) — Année B
Lectures de la messe
Première lecture« Je ramènerai le reste de mes brebis, je susciterai pour elles des pa...Jr 23, 1-6
Psaume Le Seigneur est mon berger : rien ne saurait me manquer. Ps 22 (23), 1-2ab, 2...
Deuxième lecture « Le Christ est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait... Ep 2, 13-18 Évangile« Ils étaient comme des brebis sans berger »Mc 6, 30-34
Chers Frères et Sœurs,
Quelle est votre réaction après la lecture de cet Evangile. Comme il m’arrive d’avoir l’esprit taquin, je me suis dit dans un premier temps, à qui dois-je obéir et qui imiter ? Le Pape François ou Jésus ? Le Pape François nous dit de prêcher brièvement, mais Jésus se met à instruire longuement les foules. Est-ce que je vais leur infliger un sermon avec des citations, des virgules, des guillemets, un peu de sauce latine, du byzantin, et autre ? Qui faut-il plaindre ? Les foules ou les apôtres qui devaient être fatigués après leurs premières courses pastorales ? Est-ce que Jésus avait pris des vacances pendant que ses disciples étaient allés prêcher ? Les foules en redemandaient…
Mais pourquoi étaient-ils venus ? Est-ce qu’ils voulaient des miracles, des guérisons, des résurrections, des démons envoyés au fond du lac ? Est-ce que Jésus avait une voix belle et si puissante que des milliers de personnes pouvaient l’entendre sans micro ? Quand nous entendons les chanteurs et orchestres de l’été avec des sonos et des accords fabuleux… on peut comprendre. Mais écouter un sermon de deux ou trois heures, il faut des coussins et de quoi faire la sieste normalement.
Pourtant l’Evangile est clair : Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement.
Qu’avait donc Jésus pour attirer ainsi les foules ? Était-ce en raison de sa personnalité ? Il devait attirer la sympathie, mais il s’était tu pendant 30 ans à Nazareth. Qu’est-ce qui leur manquait ? Ces foules étaient comme des brebis sans berger. En parcourant les Evangiles, on lit dans les Synoptiques, Matthieu, Marc et Luc : « On était frappé par son enseignement, car il enseignait en homme qui a autorité, et non pas comme les scribes. » Comme elles nous ne savons pas très bien où nous allons et nous cherchons un peu de lumière, un guide, des indications. S’agit-il de résoudre un problème de santé, ce qui est déjà important, ou de trouver un sens global notre vie ? Nous connaissons le mot de Coluche Qui suis-je ou vais-je, dans quel état j’erre… ou la toile de Gauguin : D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?
Les gens se rassemblaient pour ces motifs autour de Jésus, mais aussi en raison des signes qu’il donnait. Ils se sentaient sécurises. Les signes sont-ils la seule cause ? C’est un peu la problématique lorsqu’on court après le merveilleux et les signes extraordinaires. Si une parole est dite et qu’elle se réalise, on a l’impression d’être enfin sous le parapluie atomique ; surtout lorsqu’on est à genoux ou en prière avec telles formules ou dans de telles conditions, à tel endroit. En résumé, c’est presque Le salut pour moi et peut-être pour ceux qui réagissent comme moi.
Si quelqu’un pose une affirmation de manière forte et bien timbrée en disant : On vous a dit telle chose, et bien moi, je vous dis ceci… et qu’il promet des lendemains qui chantent, avec même des signes, l’argument est fort. L’Ecriture nous met toutefois en garde contre le singe de Dieu. Un bon orateur, simplement, peut enthousiasmer et manipuler des foules. Il existe des techniques pour cela, depuis l’antiquité jusqu’à aujourd’hui et les gens en redemandent. Un politicien épluche normalement les manuels et prend quelques cours d’expression orale et d’art oratoire, même pour une élection expresse. Fidel Castro avait parlé 269 minutes à l’ONU et dans son île 7h15 minutes sans interruption… Ca n’est pas si loin. Le Seigneur ça n’était pas cela et les apôtres avaient étrangement vite fait d’oublier ou n’écoutaient pas. Les courses au poste les rendaient peut-être sourds.
Dans ce repas au menu spirituel, servi par Jésus, quelle est la nourriture qu’il donne à ses auditeurs? Qu’il nous donne ? Ce sont le sermon sur la montagne, les béatitudes, les paraboles ; il leur enseigne l’amour de Dieu et du prochain dans le détail, dans la réalité et pas seulement de manière globale. Il leur apprend ce qu’est la volonté du Père, la loi de cet amour qui est au cœur de la vie trinitaire. Quelles sont les réactions lors de la mise en pratique aujourd’hui? Cet amour devrait rayonner autour de nous, y compris durant dans nos vacances.
Au final, lors de la passion, même les signes donnés ne serviront plus à rien, voilà que l’autorité de Jésus paraît disparaître et presque tout le monde se sauve, sauf Marie les femmes et Jean. Que reste-t-il ? Il restera le dernier signe, celui de la Résurrection, donné à quelques-uns seulement et la foi capable de voir dans l’obscurité.
Le berger est parti, mais il nous a laissé des tables de la nourriture, un menu et des serviteurs. Ses immenses sermons, ils ne sont plus là. « 25 Il y a encore beaucoup d’autres choses que Jésus a faites ; et s’il fallait écrire chacune d’elles, je pense que le monde entier ne suffirait pas pour contenir les livres que l’on écrirait. », dit saint Jean à la fin de son Evangile. Ils témoignaient de sa compassion pour ces foules. Elle est la même pour nous aujourd’hui. Il nous écoute, il nous encourage, il est patient, doux et humble de cœur. Le Seigneur nous a laissés l’Eucharistie et les Ecritures, avec le don de l’Esprit-Saint et les apôtres. L’apocalypse parle d’un petit livre qui est mangé et a un goût de miel dans la bouche, mais dont la digestion est difficile. Nous y voyons l’Evangile vécu dans le quotidien. Ce petit livre doit nous suffire pour notre traversée, nous pourrions le relire pendant ce temps de l’été. Il n’est pas nécessaire de reprendre une édition complète de saint Augustin en 34 gros volumes, de Jean Chrysostome, de Bossuet ou même tout le cher abbé Maurice Zundel, 7 volumes édités actuellement. Est-ce que, durant cet été, nous ne pourrions pas nous faire aussi un petit résumé intérieur de ce que nous avons vécu avec Jésus?
Contentez-vous du petit livre de l’Evangile et du vôtre avec lui, ce qu’il vous a enseigné personnellement en vous parlant au cœur. Mettez-vous à l’écoute de l’Esprit-Saint dans votre cœur, avec Marie. L’Esprit vient combler notre cœur et nous conformer à Jésus. Il vient nous apprendre à aimer comme Jésus. Ne nous trompons pas cependant. Jésus dit bien dans l’Evangile de Saint Jean : « 12 J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter. 13 Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière. » Il nous parle dans notre cœur et dans nos frères.
Nous terminons avec un mot du pape François qui nous demande de prier pour la paix : « Je vous exhorte à vous tourner vers Marie comme signe de consolation et d’espérance certaine, visage maternel de Dieu et demeure où se réfugier. Elle nous offre en effet constamment son Fils comme unique source de concorde, d’espérance de salut, de voie pour la paix, impératif absolu de la recherche humaine. » Amen.