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dimanche 14 mars 2021

Le serpent d'airain

 


Sculpture du Serpent d'airain de Moïse
(en forme de caducée) sur le mont Nébo.


4ème Dimanche de Carême, de Lætare — Année B
Première lecture La colère et la miséricorde du Seigneur manifestées par l’exil et la d... 2 Ch 36, 14-16.19-23
Psaume Que ma langue s’attache à mon palais si je perds ton souvenir ! 136 (137), 1-2, 3, 4...
Deuxième lecture « Morts par suite des fautes, c’est bien par grâce que vous êtes sauvé... Ep 2, 4-10
Évangile « Dieu a envoyé son Fils pour que, par lui, le monde soit sauvé » Jn 3, 14-21

Homélie :

« De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse dans le désert, ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. »

Chers frères et sœurs,

Le serpent de bronze nous a, je pense tous impressionnés lorsque nous l’avons découvert dans le livre des Nombres. Le serpent associé à la guérison a été longtemps le symbole des pharmacies et pharmaciens. Il se réfère à des divinités grecques : la déesse de la santé Gigeya et son père, le dieu de la médecine et de la guérison Esculape, étaient accompagnés d’un serpent. Toutes les infirmières sont des déesses et les médecins des dieux, c’est bien connu, mais avec une minuscule. Nous le sommes tous d’ailleurs selon l’Écriture. Place aux laïques.

La guérison est aussi rattachée à ce fameux serpent de bronze élevé dans le désert, qui guérissait ceux qui regardaient vers lui et lui seul. Le Seigneur lui-même s’identifie à ce symbole qui interroge. C’est une créature ambivalente car dans la symbolique, on rapproche saraph, le serpent brûlant et les séraphins. Celui qui est fourbe et trompeur et celui qui garde la porte d’entrée du paradis. Le fameux serpent d’airain, conservé par les hébreux, ayant engendré un culte idolâtrique, c’est le roi Ézékias qui le fit disparaître (2R18,4). Saint Jean nous rappelle la valeur salutaire de cette image. Le Seigneur Jésus est celui qui guérit et sauve ceux qui se tournent vers lui. « Ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit élevé, afin qu’en lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. » Celui qui regarde la croix de Jésus avec amour demande la vie éternelle. Nous avons chez nous un crucifix ou nous portons une petite croix pour demander la vie éternelle. « Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. »

Le Seigneur essayait de ramener à lui son peuple par ses prophètes, avons-nous entendu dans le livre des chroniques, mais n’étant pas écouté, ce n’est pas seulement un symbole qui a été détruit, mais le temple lui-même. Nous nous représentons bien cette catastrophe et l’exil à Babylone. Nous percevons en arrière-fond, le paradis terrestre, Abraham, toute une symbolique attachée aussi au pèlerinage du pape François. La conversion qui a du se réaliser  en exil pour le Peuple de Dieu a été un temps de purification et d’évolution liturgique. Aux sacrifices du temple, Dieu a préféré la louange sortie des lèvres et des cœurs de ceux qui voulaient retourner à lui et à Jérusalem « Je veux que ma langue s’attache à mon palais, si je t’oublie Jérusalem et ne t’élève au sommet de ma joie. » Le Seigneur pardonne et reconstruit Jérusalem : « Quiconque parmi vous fait partie de son peuple, qu’il monte à Jérusalem. » La joie revient, Jérusalem au sommet de notre joie, de celle de tous les peuples qui vont chanter les psaumes des montées, des montées vers la Jérusalem d’en-haut. Ce retour et la guérison complète va se réaliser avec l’élévation du Fils de l’Homme sur la croix et son sacrifice.

L’épître mériterait d’être lue et méditée sans commentaire, le tableau est grandiose et englobe toute l’histoire du salut et du mystère du Christ jusqu’à la résurrection et notre installation dans la gloire : « il nous a fait siéger aux cieux, dans le Christ  Jésus. » Plus d’exil, la vie sans fin. Le séraphin devant la porte s’écarte. Tenons ouverte la porte de l’espérance dans nos cœurs. Ne laissons pas les courants de la tristesse et des difficultés la refermer. Peut-être avons-nous besoin de la calle de la charité d’un frère ou d’une sœur pour la maintenir ouverte à certains moments. N’avons-nous pas le devoir d’être les serviteurs de la joie de ceux qui nous entourent, de nos compagnons de pèlerinage vers le Royaume.

Qui nous rappellera que Dieu est riche en miséricorde ? «Seigneur, montre-nous le Père et cela nous suffit». Saint Jean-Paul II a utilisé ces mots « riche en miséricorde » comme titre de sa fameuse encyclique : « la miséricorde ne fait pas partie seulement de la notion de Dieu; elle caractérise la vie de tout le peuple d'Israël, de chacun de ses fils et de ses filles: elle est le contenu de leur intimité avec le Seigneur, le contenu de leur dialogue avec lui. » C’est un des thèmes les plus chers au Pape François. Il l’a exprimé avec force en Irak par ces mots : « De ce lieu source de foi, de la terre de notre père Abraham, nous affirmons que Dieu est miséricordieux et que l’offense la plus blasphématoire est de profaner son nom en haïssant le frère. »

Qui nous rappellera le grand amour dont le Seigneur nous a aimés ? Qui en témoignera par sa vie ? Qui sera pour nous une présence de Jésus miséricordieux ? Qui nous rappellera le don de Dieu ?

Dieu nous a faits, il nous a faits pour le Paradis et la joie. Il nous a créés dans le Christ Jésus. Il nous a créés en vue de la réalisation d’œuvres bonnes qu’il a préparées d’avance pour que nous les pratiquions. Il veut faire de nous des témoins de sa miséricorde. Nous pourrons contempler un jour ce qu’elle a été pour nous.

Sainte Thérèse de Jésus concluait une de ses lettres ainsi : Que le Seigneur soit toujours béni, j'espère en sa miséricorde que nous nous retrouverons vous et moi là où nous verrons plus clairement ce qu'il a opéré de grand en nous; et nous le louerons à jamais. (Au P. Garcia de Toledo à Avila)

Ô Mère de miséricorde, soyez le secours, le soutien de tous les pauvres affligés, la consolation de ceux qui pleurent, le remède des malades. Vous qui êtes la fille bien aimée de Dieu le Père, la Mère immaculée de Dieu le Fils, l’épouse de l’Esprit-Saint, Vous que l’archange a saluée pleine de grâces, soyez notre avocate, demandez miséricorde pour les pécheurs que nous sommes. Rendez-nous notre joie d’enfants de Dieu, car le Fils de l’homme a été élevé, afin que par lui tout homme qui croit ait la vie éternelle. Amen.

 

mardi 2 mars 2021

Le pigeon et le poisson-chat

 

Source Futura-Science


2 mars 2021 - mardi, 2ème Semaine de Carême —  de la férie

Première lecture « Apprenez à faire le bien : recherchez le droit » Is 1, 10.16-20
Psaume À celui qui veille sur sa conduite, je ferai voir le salut de Dieu. 49 (50), 7ab.8, 13-1...
Évangile « Ils disent et ne font pas » Mt 23, 1-12

Voilà un Évangile, qui nous remet régulièrement en question, et pas seulement ceux qui vivaient au temps de Jésus.

Le Seigneur fait allusion aux prescriptions tatillonnes imposées par les interprétations de la loi auprès de laquelle la casuistique chrétienne est en très bonne place, c’est un des sujets du pape François. Selon la tradition rabbinique, il y a 613 commandements contenus dans la Torah, 248 positifs et 365 négatifs.

De manière globale, nous pouvons remarquer que dans son enseignement, le Seigneur va lui, vers une simplification, vers l’essentiel, les dix commandements bien entendu, et il réduit tout à l’amour de Dieu et du prochain, ainsi qu’à la règle d’or : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même »

Le Seigneur dans l’Evangile nous parle également de phylactères, c’est la traduction grecque des tephillims. Chez les juifs, c’est une petite boîte cubique enfermant des bandes de parchemin sur lesquelles sont inscrits des versets de la Torah. Ils se les attachent au bras gauche (lié au cœur) et sur le front (lié à l'esprit), pendant la prière du matin. Les franges ou tsitsit concernent le talith ou voile de prières qui avait 4 coins pourvus de ces franges en vertu d’une prescription biblique. Dans le judaïsme orthodoxe, il n'est porté que par les hommes. Il y a toute une symbolique dans le nombre de fils avec lesquels ils sont tressés.

Le pape François s’élevait voici quelques années contre les tromperies qui consistaient de faire semblant d'aller parler avec le Seigneur, « de faire semblant de ne pas être pécheur. C'est ce que le Seigneur reproche aux docteurs de la loi (cf. Mt 23,1-12). Ces personnes accomplissent les œuvres «pour se faire remarquer des hommes. » Là il mentionne les phylactères, les franges, le titre de Rabbi, le goût des premiers sièges dans les synagogues, des salutations sur les places publiques» (vv. 5-6). » Les titres, les salutations et tout cela fait tellement de bien. Ils ne glissent pas sur les plumes d’un canard, mais pénètrent profondément dans le plumage des oiseaux que nous sommes, et jusque dans leurs cœurs. Ils les empêchent de s’envoler et provoquent des crises cardiaques. J’ai vu l’autre jour les images, de poissons-chats, des silures qui faisaient la chasse aux pigeons sur les bords d’un lac ou d’une rivière. Les pauvres pigeons tout à la joie de la baignade, alourdis par l’eau se faisaient croquer. L’apparence et la vanité sont des spécialités hélas parfois trop religieuses. Il est difficile de s’en guérir et peut-être devrons-nous attendre le vêtement, lavé dans le sang du Seigneur, et orné de broderies de son cru, fruits de la foi, de l’espérance et de notre charité, lorsque nous le verrons. Nous pourrons enfin être tranquilles sur ce sujet.

La vanité est précisément un grand moyen pour se fermer à l'appel du Seigneur. En revanche, son invitation est celle d'un père, d'un frère: “Venez! Parlons, parlons. A la fin, Moi, je suis capable de changer ta vie du rouge au blanc”. Quant aux titres ils passent aussi et finissent par appartenir à l’armoire aux souvenirs lorsque la mémoire s’effiloche. Que le Seigneur nous aide à devenir doux et humbles de cœur, comme lui. N’est-ce pas ce qu’il attend de nous avant tout. Amen.

 

dimanche 28 février 2021

La Transfiguration 2ème dimanche de Carême


 

28 février 2021 - 2ème Dimanche de Carême — Année B

Première lecture Le sacrifice de notre père Abraham Gn 22, 1-2.9-13.15-1...
Psaume Je marcherai en présence du Seigneur sur la terre des vivants. 115 (116b), 10.15, 1...
Deuxième lecture « Dieu n’a pas épargné son propre Fils » Rm 8, 31b-34
Évangile « Celui-ci est mon Fils bien-aimé » Mc 9, 2-10

 

« Voici mon Fils Bien-Aimé, écoutez-le. »

Mes sœurs, chers frères et sœurs,

La Transfiguration du Seigneur est un encouragement durant le temps du Carême. Elle doit nous conduire jusqu’à Pâques, à la lumière de la résurrection que nul ne pourra éteindre. C’est elle qu’il nous faut regarder sans cesse, elle est notre consolation et notre espérance, elle est au cœur de notre foi. Si le Christ n’était pas ressuscité, nous serions les plus malheureux d’entre les hommes. Le thème de nos trois lectures est celui de la réponse à l'appel jusqu'à l'offrande du sacrifice ; nous l’avons reconnu dans la 1ère lecture : le sacrifice d'Abraham ; dans la deuxième où saint Paul rappelle que Dieu a livré son propre Fils pour nous sauver. Jésus en tant que Fils bien-aimé de toute éternité ira jusqu’à son accomplissement dans son humanité par le don de sa vie : « Voici mon Fils bien-aimé ».

Les deux premières lectures nous l’aurons constaté n’en restent pas au sacrifice. Celui d’Abraham se conclut par la promesse d’une descendance innombrable. Nous connaissons l’usage des sacrifices humains en usage à son époque et pour longtemps encore en usage chez les phéniciens et puniques, jusqu’à l’époque romaine. Nous sommes toujours heurtés par cette demande que Dieu a faite à Abraham. C’est une annonce du sacrifice de Jésus évidemment que symbolise celui du bélier pris dans les épines en remplacement d'Isaac. Lorsque Jésus l’annoncera à ses Apôtres cela va les scandaliser et susciter leur incompréhension dont celle de Pierre.

Saint Paul quant à lui souligne l’importance de la résurrection. « Le Christ Jésus est mort ; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu, il intercède pour nous. » Mort et Résurrection de Jésus sont liées inexorablement. N’est-ce pas là pour nous le plus grand des mystères ? Il n’en demeure pas moins que le résultat est là, le Seigneur est ressuscité et cette résurrection nous est destinée à tous.

Saint Léon le Grand à l’office des lectures de ce matin nous disait que « Par la transfiguration le Seigneur voulait avant tout prémunir ses disciples contre le scandale de la croix et, en leur révélant toute la grandeur de sa dignité cachée, empêcher que les abaissements de sa passion volontaire ne bouleversent leur foi. » Ils en ont été ébranlés et seul Jean sera présent au pied de la croix, avec Marie. Mais quel était son état spirituel ? N’est-ce pas Marie qui lui a permis d’être présent et de supporter ce choc terrible. Il fallut le tombeau vide pour croire : « Il vit et il crut ».

Jésus avait pris avec lui sur la montagne, Pierre, Jacques et Jean et il y eut deux autres personnages Moïse et Elie, la Loi et les Prophètes, pour être témoins de ce moment. Ils étaient cinq. Lui-même et ses vêtements, devinrent resplendissants. Ce moment extraordinaire va marquer à un tel point Pierre qu’il le mentionnera dans sa deuxième lettre : (17 Car) il a reçu de Dieu le Père l’honneur et la gloire quand, depuis la Gloire magnifique, lui parvint une voix qui disait : Celui-ci est mon Fils, mon bien-aimé ; en lui j’ai toute ma joie. 18 Cette voix venant du ciel, nous l’avons nous-mêmes entendue quand nous étions avec lui sur la montagne sainte.

Le thème de la lumière traverse les Écritures et les Évangiles, nous avons en mémoire le Buisson ardent, et la nuée de feu qui conduit le peuple à travers le désert en lui montrant le chemin, la nuit. Il existe aussi une icône connue montrant Marie portant l’enfant, au cœur du Buisson ardent. La première lecture nous y fait penser, avec l’image du bélier pris par ses cornes dans les épines et qui va être sacrifié et brûlé. Le buisson, le feu et la victime du sacrifice, les trois symboles sont présents.

Vous me permettez une association avec un reportage passé sur Temps Présent jeudi sur les États de Mort Imminente. Ce thème impressionnant a été fréquemment mis en avant ces cinquante dernières années, avec raison. On y entend rapporter parfois la vision d’une lumière qui attire les personnes concernées. Les scientifiques n’arrivent pas à trouver encore d’explications physiologiques satisfaisantes et chacun y va de ses interprétations.  Comment se passera cette rencontre ? Nous l’ignorons, mais l’idée de la lumière plaît et la foi nous dit que le Seigneur viendra un jour à notre rencontre pour nous faire entrer dans sa lumière, à la découverte de la Trinité Sainte. Le sacrifice de Jésus est en quelque sorte une image de ce qui se passe dans la communion et l’unité d’amour des trois personnes divines. Il réalise le don total d’amour qui se passe en elle. Les théologiens parlent de circumincession, terme barbare qui traduit aussi nos interrogations et nos efforts pour approcher ce mystère. Dieu veut que tous les hommes soient sauvés. Même s’ils ne le connaissent pas, ils le seront, ils seront sauvés par l’unique sacrifice que le Seigneur va accomplir à Jérusalem.

J’ai eu un peu de peine à trouver des mentions de la Transfiguration dans les écrits du carmel que j’avais sous la main. En plus d’une prière de consécration très significative à la sainte Face de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, composée en cette fête-là, Saint Jean de la Croix la mentionne pour nous rappeler que c’est par le chemin sûr de la foi que nous avons à nous approcher du Seigneur. Nous avons un témoignage plus sûr que cette vision du Thabor … dire que nous regardons la foi annoncée par les prophètes comme la chandelle qui luit en ténèbres, c'est nous avertir de demeurer en obscurité, les yeux clos à toutes ces autres lumières, et qu'en cette ténèbre, seule la foi - qui aussi est obscure - soit la lumière où nous nous appuyions. Les difficultés de Pierre témoignent que ce moment extraordinaire ne suffit pas. Avant sa passion, le Seigneur lui dira une parole qui doit tous nous interpeller : « J’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères. »

Que Notre-Dame nous accompagne sur notre chemin à la suite de son Fils, pour passer de la montagne de la Transfiguration à celle du Golgotha pour ressusciter avec Lui.

Salut, Reine des cieux, salut, Reine des anges, salut, tige féconde, salut, porte du ciel ! Par toi la lumière s'est levée sur le monde. Réjouis-toi, Vierge glorieuse, belle entre toutes les femmes ! Salut, splendeur radieuse : implore le Christ pour nous. Amen.