16 JUILLET 2023 -- dimanche, 15ème Semaine du Temps Ordinaire — Année A
Lectures de la messe
Première lecture« La pluie fait germer la terre »Is 55, 10-11
PsaumeTu visites la terre et tu l’abreuves, Seigneur,
tu bénis les semailles.Ps 64 (65), 10abcd, ...
Deuxième lecture« La création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu »Rm 8, 18-23
Évangile« Le semeur sortit pour semer »Mt 13, 1-23
Homélie
Celui qui a reçu la semence dans la bonne terre, c’est celui qui entend la Parole et la comprend : il porte du fruit à raison de cent, ou soixante, ou trente pour un.
Chers frères et sœurs,
Je vous ai lu tout l’Évangile et
pas le raccourci parce qu’en vacances vous avez du temps et que les
températures vont devenir plus supportables.
Il arrive fréquemment dans les
ouvrages de spiritualité et les commentaires que l’on fasse une comparaison
entre les manières de prêcher du Seigneur et celle de Saint Paul. Le Seigneur
utilise des comparaisons tirées du milieu rural dans lequel il a été élevé et a
vécu. Ses paraboles nous montrent bien la manière dont il procédait. Elles sont
tirées de la nature, de la vie dans les villages, du travail de la terre, du
monde pastoral, de la pêche. Il essayait de rejoindre les petites gens de son
milieu de vie. Nous comprenons qu’il connaissait ce qu’ils vivaient tous les
jours et voulait leur permettre d’aller au plus profond et de les aider à le
rejoindre en donnant un sens à leur vie… Il leur expliquait comment rejoindre
et comment connaître son Père et leur Père. Il leur ouvrait l’esprit au sens des
Écritures et à sa mission. Dieu aime tous les hommes et veut qu’aucun ne se
perde. Saint Paul, lui était un intellectuel, capable de développer une vue d’ensemble,
de l’histoire du salut, à un point tel que Pierre lui-même avoue ne pas pouvoir
le suivre à certains moments. Saint Paul devait certainement se dire :
Pourquoi être simple quand on peut être compliqué ? Pourtant il savait
aussi marcher et pratiquer un travail manuel. On parle de 5.000 kilomètres dont
2.000 à pieds dans les premiers voyages. Daniel Marguerat dit qu’avec lui, Dieu
a émigré. Le Seigneur est resté en Palestine, mais sa parole était accompagnée
de signes et surtout il touchait les cœurs. Comme quoi le talent oratoire et la
connaissance exprimée ne sont pas les seuls talents.
Le Seigneur dans l’évangile prend
donc une parabole simple à comprendre, il nous parle de bon grain qui germe et
porte du fruit, mais un fruit spirituel. Cela paraît simple mais est éminemment
compliqué et long. Mais ils écoutaient patiemment. Pourquoi en effet ne pas
donner une explication très claire et faire un bon miracle indiscutable pour
que tout le monde s’aligne une bonne fois. Pourtant, s’il réunit beaucoup de
monde, beaucoup ne comprennent rien. Ils
sont durs d’oreille et aveugles, en état de pré-infarctus spirituel… incapables
d’accueillir Dieu et de le voir. Un médecin ORL m’avait expliqué il y a
quelques années, qu’il fallait faire attention à une petite baisse de l’audition
et y pallier, parce que le cerveau a la fâcheuse habitude d’éliminer
définitivement les cellules qu’il n’utilise pas… Le Seigneur vise bien entendu
notre état de santé spirituelle.
Si la première lecture a pris la
nature en exemple, il ne s’agit pas d’un traité scientifique nous expliquant un
fonctionnement harmonieux, mais pour nous rendre attentifs au fait que Dieu
parle à travers elle. Il veut entrer en contact et en dialogue avec nous, nés
dans un monde bien réel, à l’issue d’un processus devant lequel nous nous émerveillons
tous les jours. Nous cherchons à en trouver le sens, en passant du bigbang de la
création aux poussières d’étoiles et aux dinos de Porrentruy. Nous cherchons un
sens à notre vie et souhaitons une rencontre qui pourra nous apporter une vie
belle et qui n’aura pas de fin. Dans une de mes lectures, j’ai lu que cette
recherche du sens pour chacun, en thérapie, portait un nom la logothérapie (Viktor Frankl). Le thérapeute
en question avait remarqué dans son camp de concentration que ceux qui
résistaient le mieux à cette situation étaient ceux qui avaient donné un sens à
leur vie. Non seulement notre vie personnelle a un sens, mais ce sens concerne
toute la création. Saint Paul l’exprime une vision extraordinaire, profonde et
totale du mystère du salut, de la création. Elle est soumise à un esclavage
depuis la rupture avec Dieu et est en attente d’être transfigurée. Elle veut
connaître la gloire donnée aux enfants de Dieu, débarrassés de leurs problèmes,
etc… Nous aussi, en nous-mêmes, nous gémissons ; nous avons commencé à
recevoir l’Esprit Saint, mais nous attendons notre adoption et la rédemption de
notre corps.
Saint Paul parle d’un intervenant
avec lequel il faut compter. Nous ne pouvons pas seulement nous contenter d’histoires,
de rêver à des lieux ou des états qui nous calment psychologiquement et nous
apportent un peu de paix, des lieux de vacances sans bouchons, un beau film, un
concert.
Nous nous posons chacun de toute
évidence la question de savoir comment transformer nos existences, comment rechercher
le Seigneur, le trouver, le voir et l’écouter, et aussi à partir de quand et
jusqu’à quand est-ce possible ?
Il arrive parfois que l’on soit
renversé par un événement imprévisible, un accident qui nous force à nous poser
des questions de fond. Nous voudrions trouver une solution de vie et pas seulement
nous dire que tout va s’arrêter là. C’est parce que Dieu nous aime. Je me
permets un exemple pour nous montrer l’amour que Dieu a pour nous et pour notre
liberté. Notre pape François a publié un superbe document pour le 400ème
anniversaire de la naissance de Blaise Pascal. Il est très intéressant et pas
seulement en raison de ses bagarres avec les jésuites au 17ème
siècle. Il s’est posé une question que tout le monde se pose : « Qu’est-ce
que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard
du néant ». Nous ne sommes presque rien, mais pas rien, il doit y avoir une
raison et un but à notre vie, un sens, quelque chose et surtout quelqu’un
au-delà du visible. Sinon toute la création serait absurde. Lui, le
mathématicien de génie, avance encore la conclusion de son fameux pari : « Mais
votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, pariant que Dieu est. Estimons
ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout; si vous perdez, vous ne perdez
rien. Pariez donc qu'il est, sans hésiter. » Parler de pari implique une
fragilité, celle de la liberté que Dieu nous laisse dans son amour. Il veut un
oui donné dans la foi, avec une part d’obscurité. Il se propose, mais n’impose
pas sa volonté, parce qu’il est souverainement libre et nous veut à son image. Le
pape François dit dans sa lettre que nous devons, comme chrétiens, nous tenir
éloignés de la tentation de brandir notre foi comme une certitude incontestable
qui s’imposerait à tous. Pascal avait certes le souci de faire connaître à tous
les hommes que « Dieu et le vrai sont inséparables ». Mais il savait que l’acte
du croyant est possible par la grâce de Dieu, reçue dans un cœur libre. Pour
que le bon grain puisse germer, il faut l’amour autour de lui et dans nos cœurs,
un amour partagé pour nos frères et toute la création.
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