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dimanche 9 septembre 2018
Vers un renouvellement de ses "OUI"
Hier, je fêtais mes 30 ans de profession solennelle et 33 ans de profession tout court... Me voilà aujourd'hui prêtre auxiliaire du Vorbourg et en approfondissement de mon appel. Le blog aura bientôt un nouveau nom, le temps de quelques jours de réflexion.
lundi 9 juillet 2018
"Voici, je reviens bientôt" - Un aurevoir du gardien de la chapelle du Vorbourg.
Merci d’être venus participer à cette célébration du 14ème
dimanche du Temps Ordinaire. Elle est assez particulière, puisque nous bénéficions
de la participation de la chorale de Courtételle dirigée par M. Joël Voyame.
Elle l’est aussi parce que pour moi, c’est certainement le dernier dimanche que
je célèbre en tant que Gardien du Vorbourg, le mandat de la communauté
prenant fin le 31 juillet. Il y aura des prolongations pour le mois d’août, mais
c’est le Père Jean-Marie qui va assumer la finale en tant que gardien
remplaçant. Pardonnez les analogies sportives, je n’ai pu m’empêcher. Je vous
donnerai de brèves explications après l’Évangile.
Le Seigneur nous interpelle aujourd’hui sur la manière dont
nous recevons la parole de Dieu de la part de ceux que nous connaissons et
côtoyons. Il n’est pas facile d’annoncer l’Évangile chez soi, vous en faites
l’expérience en famille. Mais les prêtres de nos paroisses savent que cela
n’est pas toujours, mais avec la grâce de Dieu, rien n’est impossible.
Prions les uns pour les autres et reconnaissons que nous
avons besoin de pardon et de miséricorde.
Frères et Sœurs,
L’Évangile nous interpelle certainement et si le Seigneur a
rencontré des difficultés dans son pays, il est difficile de relativiser son
expérience, le Seigneur étant le Seigneur.
La question peut être d’ailleurs retournée… qui est notre
famille ? Ceux qui nous ont vu grandir, passer nos examens comme les plus
jeunes aujourd’hui… S’agit-il de nos familles religieuses ? Le problème
est de reconnaître le Seigneur dans l’autre, tant les étiquettes et les
préjugés créent des murs aussi efficaces que ceux qui divisent certains pays
aujourd’hui.
Aujourd’hui, je vais me permettre de donner une certaine
satisfaction à ceux qui souhaitaient d’avoir de temps à autre, ce qu’on
appelait le sermon des foins autrefois. Ils sont terminés depuis longtemps, en
tout cas dans la vallée, mais ça ne fait rien.
Mon sermon sera une fameuse petite phrase de saint Augustin
que je vous laisse appliquer : « Aime et fais ce que tu veux. »
Amen.
Quelques explications maintenant. Il y a eu de nouvelles
options pastorales pour le sanctuaire et nous aurons la joie d’accueillir un
nouveau gardien en la personne de l’abbé Bernard Miserez que vous connaissez
presque tous. Mais en sus, vous vous demandez peut-être pourquoi, je dois déjà
m’absenter, car il était prévu que je fasse la transition jusqu’en septembre.
Je préfère être clair. Depuis au moins une année et demie, je ressentais de la
fatigue et j’ai passé un hiver vraiment éprouvant. Après toute une batterie
d’examens, on a enfin découvert la raison majeure de ces problèmes qui n’étaient
pas psychologiques : mes coronaires sont sérieusement obstruées et s’il n’y a
pas de pontages, les conséquences sont celles que vous devinez. Les médecins
voulaient me garder à Bâle, mais j’ai promis d’être sage pour vous dire au
revoir, pas totalement toutefois… Beaucoup sont passés par là et on sait que la
chirurgie ainsi que ses procédures ont bien évoluées depuis 40 ans. Mon papa,
Jean, qui s’était beaucoup dépensé pour ses constructions de réseaux de
télévision, les premiers de Suisse, est mort à 44 ans, dans ces circonstances.
J’en ai 20 de plus, et les temps ont changé. Alors on y va dans la confiance
avec votre prière. J’aimerais pouvoir encore vous rendre service. Pour le
futur, je serai encore prêtre auxiliaire dans la région et au Vorbourg. On ne déracine pas
facilement, un jurassien qui a passé tout son ministère de prêtre dans son
pays. J’avais célébré ma première messe à Develier, ce fut un bon moment.
Je ne pensais pas revenir dans le Jura une fois entré au
monastère, il y a 33 ans et j’ai vécu 2 fois plus longtemps ici que là-bas
depuis que je suis religieux. Je ne m’étonne pas trop de ce qui m’arrive, en me
rappelant les derniers gardiens de la communauté présente ici depuis 1949, le Père Maurice Ioset, mais aussi le
Père Robert Martin. Le Père Jean Ribeaud avait aussi eu une période difficile à la fin de son mandat.
Il nous faut tous avancer dans la confiance. C’est Notre-Dame du Vorbourg qui
attire ici, aide et soutien. Quant à nous, gardiens, nous ne faisons que
passer.
La communauté est, bien entendu, attachée à la chapelle. Quand
vous regarderez de temps à autre le petit vitrail à côté de celui de Mgr Haenggi,
ayez une pensée pour elle. Portez aussi fr. Paul dans votre prière. Il s’est
beaucoup dépensé au service du chant, des fleurs et de l’entretien. Nous avons
fait tout ce que nous avons pu avec notre pauvreté et nos qualités personnelles.
Durant les 13 premières années, je m’étais consacré à votre
service, mais aussi à un autre travail, en faisant des numérisations d'écrits de Pères de l’Église : Jean
Chrysostome, Augustin et autres http://www.abbaye-saint-benoit.ch/bibliotheque.htm que je vous ai resservi fréquemment, ils ont été repris
par un très grand nombre de séminaristes francophones de par le monde, ce qui a
été pour moi une forme d’apostolat missionnaire. Les 10 ans qui ont suivi, cela
a été le sanctuaire. La charge de gardien dans la communauté est éminemment
inconfortable. Vous êtes soumis au pape, à l’évêque, au chapelain puis recteur,
à l’Abbé. Bien que responsable de communauté sur le papier, vous êtes
court-circuité urbi et orbi, vous n’avez aucune autorité, mais la sympathie des
pèlerins et le secours de Notre-Dame. Elle est là heureusement. Et en plus tous
les devoirs et les réclamations à certains moments. C'est tout un labeur diplomatique et de suggestions perpétuelles au risque de paraître parfois importun… Un grand merci aussi à la Bourgeoisie de Delémont, toujours attentive.
Pour synthétiser une expérience, si vous aimez les
comparaisons parlantes, il m’en est venu une en voyant des chameaux à la
télévision il y a quelques jours. Au temps de Noël, et de l’Épiphanie,
quelqu’un avec un petit cadeau, nous avait surnommé les 3 rois, ce qui nous
avait bien fait rire. Nous étions venus des bords du lac avec des dromadaires à
une bosse, mais il a fallu passer au chameau à 2 bosses. Il y a les principes
et la discussion, une forme de pastorale. Ainsi fonctionne l’Église, dans la
durée…
Même si le passage officiel de témoin ne doit avoir lieu
qu’en septembre aux fêtes du Vorbourg, je voudrais déjà remercier tous ceux qui
nous ont aidés dans ce service. Un merci particulier à la bourgeoisie de
Delémont, aux chapelains puis recteurs qui se sont succédés et aussi à ma
famille. Nous avons vu passer plusieurs générations d’anciens et nous passons
aussi de ce côté de la barrière, mais le cœur spirituel reste jeune, et nous
vous assurons tous que nous vous portons dans notre prière.
Quant à moi, pour paraphraser la devise locale, avec les
médecins, la grâce de Dieu, et votre prière… « Je reviens bientôt ».
Le pape François m’a fait parvenir par la secrétairerie
d’État quelques mots chaleureux et une bénédiction à destination de tous. Je vous lis cette lettre :
dimanche 24 juin 2018
Nativité de saint Jean Baptiste
Nativité de Saint Jean Baptiste — Solennité
Première lecture« Je fais de toi la lumière des nations »Is 49, 1-6
PsaumeJe te rends grâce, ô mon Dieu,
pour tant de merveilles.Ps 138 (139), 1-2.3b...
Deuxième lecture« Jean le Baptiste a préparé l’avènement de Jésus »Ac 13, 22-26
Évangile« Son nom est Jean »Lc 1, 57-66.80
Texte non corrigé
Frères et Sœurs,
Nous célébrons rarement la Nativité de Jean-Baptiste le
dimanche. Il vaut la peine d’en dire quelques mots. Saint Augustin dans son
commentaire affirme que « l'Église considère la naissance de Jean comme
particulièrement sacrée : on ne trouve aucun des saints qui nous ont précédés
dont nous célébrions solennellement la naissance. Nous ne célébrons que celle
de Jean et celle du Christ. » Heureusement nous avons aussi la Nativité de
la Vierge Marie, mais c’est une fête et non une solennité. Pourquoi cette mise
en valeur ? En raison de l’évangile de Luc et d’une réflexion théologique
et liturgique s’articulant autour du mystère du Christ. Au 4ème et 5ème
siècle avaient émergé un certain nombre d’interprétations, dont celle d’Arius,
qui mettaient en cause sa nature divine et sa nature humaine, ses qualités de
vrai Dieu et de vrai Homme. Augustin est un témoin de ces maturations.
Nous sommes proche du solstice d’été, le soleil est à son
zénit, ce sont les jours les plus longs et dans 6 mois nous arriverons au
solstice d’hiver, la lumière vient dans le monde et l’illuminera. La luminosité
va bientôt diminuer… l’évènement astronomique est rattaché aux paroles de Jean
à propos du Christ : « Il faut qu’il croisse et que je
diminue. » Son martyre, identique à celui de saint Paul que nous avons
entendu dans la deuxième lecture, exprima de la manière la plus brutale et
violente cette diminution. Il est impossible de ne pas voir un lien entre ces
festivités des nativités et les célébrations païennes qui accompagnaient les
phénomènes solaires. Parmi elles les feux de la saint Jean existent encore dans
certaines régions. Toutefois, certains calculs basés sur les périodes de
service de la classe des prêtres à laquelle appartenait Zacharie, au temple
estiment que le rapprochement n’est pas nécessairement artificiel. La
symbolique est de toutes façons parlante.
La fête de la Nativité de saint Jean-Baptiste est donc la
Noël d’été. Marie a-t-elle été présente ? Si elle n’est pas mentionnée, sa
présence est probable. Saint Luc relate la visitation et l’annonce de l’ange à
Marie, alors qu’Élisabeth en était à son sixième mois. « La conception
prodigieuse du Christ lui avait été annoncée par l’ange, comme le signe que «
rien n’est impossible à Dieu » (Lc 1, 37), six mois avant le grand prodige qui
nous donne le salut, l’union de Dieu avec l’homme par l’action du Saint-
Esprit. »
Cette naissance est un joyeux moment, comme devrait l’être
toute naissance. La voix de celui qui va crier dans le désert aura été relayée
toutes les montagnes de Judée, « la crainte saisit alors tous les gens du
voisinage et, dans toute la région montagneuse de Judée, on racontait tous ces
événements. »
« "Dès les entrailles de ma mère tu m'a
appelé", dit le psaume. Dieu nous a connus et aimés avant encore que nos
yeux puissent contempler les merveilles de la création, disait saint
Jean-Paul II. En naissant, chaque homme reçoit un nom humain. Mais avant
encore, il possède un nom divin: le nom
avec lequel Dieu le Père le connaît et l'aime depuis toujours et pour toujours.
Il en est ainsi pour tous, sans exclusion. Aucun homme n'est anonyme pour Dieu!
Tous possèdent une valeur égale à ses yeux:
ils sont tous différents, mais tous égaux, tous appelés à être des fils
dans le Fils. »
« "Jean est son nom" (Lc 1, 63). Zacharie
confirme le nom de son fils, révélé par l’ange, en l'écrivant sur une
tablette. Dieu lui-même, par l'intermédiaire de son ange, avait indiqué ce nom,
qui en hébreux signifie "Dieu est favorable". Dieu est favorable à
l'homme: il veut qu'il vive, il veut son
salut. Dieu est favorable à son peuple:
il veut en faire une bénédiction pour toutes les nations de la terre.
Dieu est favorable à l'humanité: il en
guide le chemin vers la terre où règnent la paix et la justice. Tout cela est
inscrit dans ce nom: Jean! »
Jean est le fils de Zacharie et d’Élisabeth, l’enfant du
miracle. Laissez-moi vous rappeler la beauté, l’importance et la gravité de
devenir parents d’un enfant et d’accueillir la vie. Il vous faut du courage, de
l’audace, mais surtout beaucoup d’amour et de confiance en Dieu. Des enfants
vous les élevez ou avez élevé pour les conduire à pouvoir aimer librement le
Seigneur, pour qu’ils parviennent à un épanouissement humain et spirituel, pour
que la vie soit transmise. Ils sont un don et non un dû. Devenir père ou mère
devrait conduire à un épanouissement humain, malgré les difficultés inhérentes
au fait d’être parents. Mais aimer Dieu et son prochain y conduit aussi. Notre
temps aime les séquençages et les prestations. J’ai lu un article hier, dans
lequel on rapportait que dans certains pays on commercialisait les services de
femmes pauvres pour porter des enfants. Il est triste que la maternité soit
ainsi transformée en contrat de bail. Un enfant n’est pas simplement une sorte
de locataire d’un organe féminin. Curieuse civilisation.
La naissance de Jean est une bonne nouvelle annonciatrice de
la Bonne Nouvelle. « Jean, dit
saint Augustin, c'est la voix pour un temps ; le Christ, c'est le Verbe au
commencement, c'est le Verbe éternel. »
Les moines le vénèrent en raison de son genre de vie. Il vit
en ascète, il crie dans le désert, il annonce le Christ, il s’efface devant
lui. Il baptise… Les moines qui ne deviennent pas nécessairement prêtres, s’efforcent
de répondre à la grâce de leur baptême. Saint Benoît avait consacré une église
de son monastère du Mont-Cassin à Jean-Baptiste, mais aussi à saint Martin. saint
Jean baptiste est aussi le prototype de la vie monastique : il a conduit une
vie de prière, d’abstinence et de chasteté, proclamant la venue du Messie,
devenant un messager de Dieu comme les anges. Ce mode de vie est souvent
comparé à celui des anges.
Il est une question que nous pouvons nous poser aujourd’hui avec saint Jean-Paul II qui avait interpellé nos voisins de l’hexagone : Que faisons-nous de notre baptême ?
Marie s’est réjouie de la naissance de Jean, sa joie a été grande également lors de la nôtre, demandons-lui de nous aider à le vivre et à vivre en enfants de Dieu. Amen.
mercredi 20 juin 2018
MIséricorde
Image Zénit
A la veille de la venue du pape François qui insiste tant sur la miséricorde, un très beau texte de son prédécesseur :
APPELÉS A LA COMMUNION - Comprendre l'Église aujourd'hui - Joseph, cardinal Ratzinger.
Il me semble que c'est là un élément d'une très grande
importance. Au coeur même de cette nouvelle charge, qui enlève le pouvoir aux
puissances de la destruction, il y a la grâce du pardon. C'est elle qui
constitue l'Église. L'Eglise est fondée sur le pardon. Pierre lui-même en est
l'exemple personnalisé : lui qui, après avoir trébuché, a reconnu sa faute et
reçu le pardon, est habilité à détenir les clefs. L'Église est, par son
essence, le lieu du pardon et le chaos en est banni. Elle est maintenue par le pardon,
et Pierre en est l'image pour toujours : elle n'est pas une communauté de
parfaits, mais une communauté de pécheurs qui ont besoin du pardon et qui le
cherchent. Derrière le discours sur l'autorité suprême, la puissance de Dieu se
révèle être miséricorde, et en tant que telle pierre angulaire de l'Église.
Nous entendons en arrière-plan ces mots du Seigneur : « Ce ne sont pas les
bien-portants qui ont besoin du médecin, mais les malades : je ne suis pas venu
appeler les justes mais les pécheurs» (Mc 2, 17).
L'Eglise ne peut naître que là où l'homme rejoint sa vérité,
et cette vérité consiste précisément dans le fait qu'il a besoin de la grâce.
Là où l'orgueil l'empêche d'accéder à cette connaissance, il ne trouve pas le
chemin qui mène à Jésus. Les clefs du Royaume des cieux sont les paroles du
pardon, que bien sûr aucun homme ne peut prononcer de lui-même, mais que seule
la puissance de Dieu rend effectives. Nous sommes maintenant en mesure de
comprendre également pourquoi cette péricope est suivie immédiatement d'une
annonce de la Passion : par sa mort, Jésus a barré la porte à la mort, à la
puissance des enfers, et ainsi il a expié toutes les fautes, de sorte que de
cette mort sourd continuellement la force du pardon.
mardi 19 juin 2018
A propos de la première lecture de la messe d'aujourd'hui : Pélagianisme - Néo-Pélagianisme et Miséricorde
mardi, 11ème Semaine du Temps Ordinaire — Année Paire
S. Romuald
Mémoire facultative
Lectures de la messe
Première lecture« Tu as fait pécher Israël »1 R 21, 17-29
Psaume Pitié, Seigneur, car nous avons péché !Ps 50 (51), 3-4, 5-6...
Évangile« Aimez vos ennemis »Mt 5, 43-48
Faire retomber les conséquences du péché des parents sur
leurs enfants est-ce juste ? Pour moi, comme pour vous, je pense que c’est
très mystérieux et même incompréhensible. Achab s’est humilié devant Dieu et
celui-ci lui épargne de voir une peine terrible survenir sur sa maison de son
vivant. David s’était aussi humilié, nous nous souvenons de ce passage du livre
de Samuel et de l’épisode de Bethsabée. C’est l’enfant qui mourut, mais vint
ensuite la naissance de Salomon, ancêtre du Seigneur ou du moins figurant dans
sa généalogie… Dieu paraît s’arranger de tout et tirer le bien du mal, mieux
encore, faire preuve de miséricorde.
Saint Augustin avait cité le passage de l’Écriture que nous
avons lu lors d’une controverse avec Julien d’Éclan, un évêque italien qui
défendait l’enseignement de Pélage dont vous n’avez peut-être jamais entendu
parler. Cet auteur niait la transmission du péché originel et prônait la
capacité de l’homme de se sauver lui-même. Ci-gît le lièvre de l’énigme
semble-t-il… Je vous cite un passage de notre saint auteur :
« Nous lisons même dans les livres sacrés dit Augustin,
que le roi Achab ayant commis un péché énorme, Dieu épargna ce prince et
attendit que son fils soit monté sur le trône pour exercer sur lui ce qu’il
appelle sa vengeance (III Rois, XXI, 29.) … » il donne d’autres exemples
pour remonter à Adam dont la faute a eu des conséquences sur toute sa
descendance… avec un enchaînement de maux sans fin qui affligent l'humanité, et
qui, depuis les premiers pleurs de l'enfant au berceau jusqu'au dernier souffle
du moribond… » Il y a une sorte de schéma récurrent dans l’Ancien
Testament qui fait allusion au premier péché. C’est le seul moyen de comprendre
cette notion de punition héritée ou héréditaire. Il y a faute dont les conséquences
punitives, s’étendent à des générations, mais aussi miséricorde qui n’efface
pas tous les effets de la faute.
Le pélagianisme qui niait donc la transmission du péché
originel, est sous une forme contemporaine est un des thèmes favoris du pape François.
Il est contraire à l’Écriture. Non, l’homme ne peut se sauver lui-même et oui !
ce péché a des conséquences ! La
lettre Placuit Deo de Mgr Ladaria préfet pour la Congrégation pour la doctrine
de la foi, le dit ainsi. « Le salut que Dieu nous offre ne s’obtient pas
par les seules forces de l’individu, comme le voudrait le néo-pélagianisme,
mais à travers les rapports qui naissent du Fils de Dieu incarné et qui forment
la communion de l’Église. » Le culte de la toute-puissance de l’homme seul
et sans Dieu, est un des problèmes de notre culture contemporaine.
L’humilité d’Achab et celle de David, sont des invitations
pour nous à demander au Seigneur sa miséricorde. Pour être parfaits comme notre
Père céleste est parfait, il n’y a pas d’autre moyen que d’aimer comme lui, et
cela nous ne pouvons y parvenir que par la grâce. J’aimerais encore ajouter une
remarque de Benoît XVI à la question d’un journaliste : Dieu (qui punit les hommes sur plusieurs
générations) est-il aujourd'hui encore aussi colérique qu'autrefois, ou bien
a-t-il changé ? disait-il en substance.
Je voudrais ajouter à ce que vous dites, répond
Benoît XVI que l’Écriture affirme sa fidélité à des milliers de génération. La
miséricorde est multipliée par mille, comparée à la colère. La parole me
dit : lorsque j'ai mérité la punition et me suis éloigné de cet amour, je sais
que la miséricorde de Dieu est mille fois supérieure.
Demandons-là les uns pour les autres. Amen.
dimanche 17 juin 2018
Comme le cèdre de Genève
17 JUIN 2018 - 11ème dimanche du Temps Ordinaire — Année B
Lectures de la messe
Première lecture« Je relève l’arbre renversé »Ez 17, 22-24
Psaume Il est bon, Seigneur, de te rendre grâce !91 (92), 2-3, 13-14,...
Deuxième lecture« Que nous demeurions dans ce corps ou en dehors, notre ambition, c’es...2 Co 5, 6-10
Évangile« C’est la plus petite de toutes les semences, mais quand elle grandit...Mc 4, 26-34
Frères et Sœurs,
Le Seigneur nous donne une leçon de pédagogie dans l’Évangile
d’aujourd’hui. Les paraboles sont apparemment un langage qui peut permettre à
chacun de comprendre, mais si l’on approfondit, d’autres instruments deviennent
nécessaires. Il n’en demeure pas moins qu’il a voulu tous puissent globalement
comprendre. Son enseignement n’a pas été réservé à une caste d’universitaires ou
ni voulu mettre en place une gnose avec ses castes. Il n’en demeure pas moins
qu’il a vu une utilité certaine dans le savoir de Paul, de saint Paul, qu’il a
appelé à son service… La liturgie nous a donc offert des paraboles et des
comparaisons qui sont en harmonie avec cette période printanière de l’année, et
aux portes de l’été… Le pape vient à Genève pour le 1er jour de
l’été, le 21 juin et non le 14 juillet…
L’ensemble des lectures veulent nous faire comprendre la
mystérieuse croissance du règne de Dieu. Elle se réalise grâce à la lumière de
Dieu, mais dans une mystérieuse obscurité. Le Seigneur prend l’exemple du blé
et d’un champ de blé. Le grain peut se multiplier de manière assez
extraordinaire. Je ne sais pas ce que donneront les récoltes cette année, il
est plus que prudent de laisser aux professionnels de terrain et non de bureau
le soin de faire des prévisions.
Puis vient une autre comparaison, celle d’une graine de
moutarde. Cette graine minuscule produit une plante qui grandit à un point tel que les oiseaux
viennent nicher dans ses branches. Nous avions déjà vu que de tels
développements se produisent parfois au Proche-Orient. La petite graine de 1 à
2 mm produit une plante qui peut atteindre entre 2 et 3 m. Le mot sénevé,
sinapis est mentionné à 5 reprises dans les Évangiles, pour expliquer la
croissance de la foi.
La 1ère lecture et le psaume ne peuvent me laisser
indifférents. Qui a vu des cèdres millénaires ne peut qu’en avoir été impressionné.
Ils étaient employés dans l’antiquité pour la construction des navires, le bois
étant réputé imputrescible, et pour la construction des temples, dont celui de
Salomon. Ceux qui connaissent un peu Genève savent que ce canton-ville possède
les plus anciens exemplaires de Suisse, plantés officiellement en 1735. Les
plus âgés du Liban le sont 10 X plus paraît-il… « À la cime du grand cèdre, je prendrai
une tige et la planterai sur une haute montagne d’Israël… Elle portera des
rameaux, et produira du fruit, elle deviendra un cèdre magnifique. En dessous
d’elle habiteront tous les passereaux et toutes sortes d’oiseaux, à l’ombre de
ses branches ils habiteront. » Voilà qui dépasse encore le sénevé. Quel
passionnant exercice que celui de l’observation de la nature et des oiseaux. En
rentrant de notre réunion avec le Jura Pastoral à Courgenay, j’ai vu un vol de
martinets ou d’hirondelles pour la première fois de l’année. C’est heureux, ils
se font fait beaucoup attendre cette année.
Le Seigneur aime la nature qu’il a créée, et qu’il nous a
confiée, mais il porte encore plus d’intérêt à notre vie spirituelle, puisque
nous sommes les plus proches de lui dans l’ordre de la création. Il crée
directement nos âmes immortelles.
Le symbole du sénevé et celui du cèdre peuvent être
interprétés comme renvoyant à l’Église et à l’annonce du Royaume. Tous les
peuples viendront se réfugier comme ces oiseaux à l’ombre de ses branches. Comme
c’est aujourd’hui le dimanche des réfugiés, pourquoi ne pas relever aussi la
belle image qu’est celle de l’Église et du Christ rejetés? Issue d’Israël,
rejetée, elle a été transplantée ailleurs et a donné son fruit. Elle rassemble
maintenant les peuples de toutes les nations… Elle en fait un seul Peuple, le
Peuple de Dieu. D’Israël, l’Église a hérité le meilleur, en la personne du
Christ. Mystérieusement elle est issue aussi de son côté transpercé.
Ceux qui arrivent de l’extérieur dans notre pays, nous
apportent des éléments positifs de leurs
cultures, des rameaux issus de celles-ci. Il n’y a pas que leur capacité de travail… ou
leur misère parfois, mais aussi une sagesse ou un surcroît d’humanité, des
valeurs. Nous sommes dans un monde globalisé où difficultés, richesses et
misères ne restent pas longtemps cachées et ne peuvent être ignorées. Un peu de
chaleur méridionale de l’Italie, de l’Espagne du Portugal et d’ailleurs, un
sens de la famille, ne nuisent certes pas à une certaine raideur germanique…
attribuée aux gens du nord. Pour un peu de bonne humeur, vous m’excuserez de rappeler
un vieux film classique, le fameux faiseurs de Suisses qui nous a fait passer
d’excellents moments. Cela dit, il ne s’agit pas de nier les problèmes. Mais combien
d’entre nous n’ont-ils pas eu aussi de membres de leurs familles qui ont du
s’exiler ? On comptait en 2017, 752 000 Suisses de l’étranger. Il y a de
quoi tempérer certains agacements. Nous vivons grâce à notre commerce et à
notre industrie où beaucoup d’immigrés travaillent, encore un argument
modérateur. « Qui vous accueille, m’accueille. » dit le Seigneur. Le
pape François pour qui ce thème est cher nous permet une citation puisqu’il
vient nous rendre visite. « Une attention spéciale doit être réservée, disait-il
récemment, aux enfants migrants, à leurs familles, à ceux qui sont victimes des
réseaux de trafic humain et à ceux qui sont déplacés en raison de conflits, de
désastres naturels et de persécutions.» Tous les migrants attendent «que nous
posions sur eux notre attention, notre compassion et notre dévouement».
La foi nous permet de devenir au final un seul Peuple,
pouvons-nous oublier qu’elle est un puissant facteur d’intégration ? Elle
tisse des réseaux et unit. « L’interdépendance des créatures est voulue par
Dieu. Le soleil et la lune, le cèdre et la petite fleur, l’aigle et le moineau
: le spectacle de leurs innombrables diversités et inégalités signifie
qu’aucune des créatures ne se suffit à elle-même. Elles n’existent qu’en
dépendance les unes des autres, pour se compléter mutuellement, au service les
unes des autres » (catéchisme et laudato si). Pour les hommes c’est la même
chose, nous dépendons les uns des autres et du créateur.
Notre ambition à tous, c’est de plaire au Seigneur. Le reste
qu’importe, tout passe si vite. Tout passe Dieu seul demeure et nous-mêmes ne
faisons que passer. Ne sommes-nous pas en migration vers la vie éternelle,
comme ces hirondelles qui passent d’un continent à l’autre. Alors, ce sera d’un
monde à l’autre.
Marie est comparée au cèdre du Liban dans certaines Litanies
et à la Sagesse. Demandons-lui d’être
disponibles à l’action de l’Esprit comme elle l’a été, pour donner leur chance
à ceux qui en ont besoin. Par son oui, elle nous a donné à tous notre grande
chance, son Fils qui nous a obtenu la vie éternelle. Amen.
mardi 12 juin 2018
Elie et la pauvre veuve
PREMIÈRE LECTURE
« La jarre de farine ne s’épuisa pas, ainsi que le Seigneur l’avait annoncé par l’intermédiaire d’Élie » (1 R 17, 7-16)
Le prophète Élie est le
personnage central de la première lecture. Saint Augustin a écrit une petite
homélie de 4 pages sur ce passage du livre des Rois qui a été résumée ainsi :
la nécessité des bonnes œuvres, la grâce qui sait y disposer les cœurs et la
récompense qui leur est assurée.
Augustin commence par dire que le Seigneur ne veut laisser
périr aucun de nous ; il cultive son Eglise comme une vigne ; il demande du
fruit à ses arbres, même hors saison… Puis vient une longue énumération de ce
que nous ne pourrons plus faire au ciel. Il énumère les œuvres de miséricorde
si chère au pape François. Là-haut impossible d’aider ceux qui nous entourent… Nous ne pourrons que louer Dieu comme les moines devraient le faire ici-bas, et les anges dans le ciel.
Enfin Augustin en vient au prophète Élie… Il s’étonne
sur le fait que Dieu n’ait pas pourvu aux besoins du prophète sans passer par
cette femme. Ne le pouvait-il donc pas ? Élie n’avait-il pas été rendu heureux
au bord de son torrent ? Son corbeau lui apportait à manger, il avait à
boire… Une tranquille vie d’ermite, dans
une sorte de petit paradis, alors que le monde autour de lui avait faim et
soif. Dans de telles situations, quand tout va bien pour nous tout seul, je me
rappelle, un sketch de Fernand Raynaud qui commence par : Pardonnez-moi,
mais je suis heureux. Heureux! Le Bonheur qu’est-ce que c’est ?
Dieu envoie donc Élie à une femme, une pauvre veuve… Il y
est forcé parce qu’il n’a plus rien. La compagnie est tout de même plus
plaisante que celle de son oiseau. Cette pauvre veuve qui doit lui rendre
service, il la met à l’épreuve et quelle épreuve. « L'homme de Dieu la
vit quand elle cherchait deux morceaux de bois, dit Augustin. Cette femme
représentait l'Eglise; et comme la croix est formée de deux morceaux de bois,
cette femme mourante cherchait à vivre toujours. »
Comment se fait-il qu’elle réponde lorsqu’il lui demande
tout ce qu’elle a, alors qu’elle a encore un fils qui a faim. Accorder la priorité au
prophète pour une mère dans cette situation tient du miracle ou de la folie : « Dieu parle à la
pensée et il a des moyens admirables pour donner ses ordres. Si donc il
commanda à cette veuve, dit Augustin, ce fut, croyons-nous, en lui parlant au
coeur, en lui inspirant ce qu'il fallait faire, en lui persuadant ce qui était
bon. »
Sa merveilleuse récompense conclut-il ne dura que quelques
temps. Lorsque revint la pluie il fallut retourner au travail… « Le
miracle que Dieu faisait en sa faveur pendant quelques jours rappelait donc la
vie future où la récompense ne saurait finir. Notre pain sera Dieu lui-même. »
Qu’est-ce que le bonheur ? La vie éternelle…
Réjouissons-nous donc simplement aujourd’hui de ce que le
Seigneur nous donne le pain de son eucharistie et demandons-lui de nous parler
simplement au cœur et de le toucher pour dire oui dans notre service quotidien.
Amen.