CELEBRATION D’OUVERTURE DES FETES DU VORBOURG
DIMANCHE 11 SEPTEMBRE 2016 - 16 h
« Miséricordieux comme le Père »
Vorbourg, le dimanche 11 septembre 2016
Homélie
Lc 6, 36-38
Nous avons mieux découvert cette année que ce qui
caractérisait Dieu, le Dieu des chrétiens, le Dieu auquel nous croyons, c'était
la miséricorde. Nous nous inscrivons ainsi dans la tradition reçue du peuple de
la première Alliance. Et Jésus le rappelle quand il dit à ses disciples
rassemblés : « Soyez miséricordieux comme votre Père est miséricordieux. »
La miséricorde est ce qui dit le mieux qui est Dieu. Quand
il se révèle à Abraham, puis à Moïse et aux prophètes de l'Ancienne Alliance,
Dieu exprime cette miséricorde en entrant en relation avec ceux qu'il appelle
et en se mettant à l'écoute des hommes marqués par la souffrance. A Abraham, il
dit : « Je ferai de toi une grande nation, je te bénirai, je rendrai grand ton
nom, et tu deviendras une bénédiction » (Gn 12,2) Et après qu'Abraham eut
décidé d'offrir son fils Isaac, Dieu dit encore : « Parce que tu ne m'as pas
refusé ton fils, ton unique, je te comblerai de bénédictions, je rendrai ta
descendance aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que le sable au bord de
la mer [...] Puisque tu as écouté ma voix, toutes les nations de la terre
s'adresseront l'une à l'autre la bénédiction par le nom de ta descendance. »
(Gn 22, 16-18) A Moïse, Dieu se révèle comme celui qui ne cesse pas d'accompagner
son peuple, les fils d'Israël, y compris quand ils se trouvent en esclavage. «
Du fond de leur esclavage, les fils d'Israël gémirent et crièrent. Du fond de
leur esclavage, leur appel monta vers Dieu. Dieu entendit leur plainte ; Dieu
se souvint de son alliance avec Abraham, Isaac et Jacob. » (Ex 2, 23-24) Et Le
Seigneur dit : « J'ai vu, oui, j'ai vu la misère de mon peuple qui est en
Égypte, et j'ai entendu ses cris sous les coups des surveillants. Oui, je
connais ses souffrances. Je suis descendu pour le délivrer de la main des
Égyptiens. » (Ex 3, 7-8)
L'écoute et la vue de la misère du peuple de Dieu et de tout
homme, la fidélité de Dieu à son Alliance et sa proximité caractérisent la
miséricorde de Dieu. A beaucoup, Dieu paraît comme lointain et inaccessible. La
réalité est tout le contraire. Dieu créateur ne cesse de créer et de s'occuper
de ses créatures. Il est si discret qu'il est oublié et ignoré. Notre monde vit
souvent comme si Dieu n'existait pas. Dieu n'est plus honoré, il n'est plus
prié. L'homme s'attache aux créatures et oublie le Créateur. Alors que Dieu
Père ne cesse pas d'aimer ses enfants que sont tous les hommes et de leur
donner la vie, y compris sa propre vie. Cet amour a pris forme en Jésus, icône
parfaite du Père, dont l'attention aux malades, aux pécheurs, aux personnes
mises de côté a exprimé le cœur miséricordieux de Dieu. En Jésus de Nazareth,
Dieu est venu à notre rencontre, il s'est anéanti en donnant sa vie, pour que
tout homme retrouve sa dignité de fils bien-aimé du Père.
Ce que demande Jésus dans l'évangile entendu, il l'a
lui-même accompli et continue de le faire. Il a été miséricordieux comme son
Père. Il n'a pas jugé, il n'a pas condamné : souvenez-vous de sa rencontre avec
la femme pécheresse et de ses paroles libératrices du péché : « Moi non plus,
je ne te condamne pas. Va, et ne pèche plus. » (Jn 8,11) Jésus révèle la
miséricorde du Père. Il se laisse approcher par les lépreux et va à leur
rencontre. Il les guérit et ils peuvent retrouver une vie normale. Il remet debout
les paralysés. Il laisse la femme malade de pertes de sang toucher son
vêtement. Il appelle des apôtres qui ne lui seront pas fidèles au moment de
l'épreuve. Il s'invite à la table des pécheurs, chez Lévi, chez Zachée. Dans la
maison de Simon le pharisien, il autorise la femme pécheresse à se jeter à ses
pieds, à les essuyer de ses cheveux, à les couvrir de baisers et à répandre sur
eux un parfum. Il libère ceux qui sont tourmentés par des esprits mauvais. Il
accorde le pardon aux pécheurs. Il pleure devant le tombeau de son ami Lazare,
parce qu'il est touché au plus profond de ses entrailles par la mort de son
ami. Il exprime sa profonde déception envers Jérusalem qui a refusé tant de
fois l'unité : « Combien de fois ai-je voulu rassembler tes enfants comme la
poule rassemble ses poussins sous ses ailes et vous n'avez pas voulu ! » (Mt
23, 37) Ces paroles expriment toute la peine et la compassion éprouvées par
Jésus qui a tout donné pour rassembler les enfants de Dieu dispersés. Sur la
croix, il va jusqu'à demander à son Père d'accorder le pardon à ses bourreaux.
Il promet le paradis à l'un des malfaiteurs. Il verse son sang pour le salut du
monde marqué par le péché, le mal et la mort. Par son enseignement, en
particulier, ses paraboles, il traduit par des paroles qui touchent les cœurs
la miséricorde infinie du Père.
Devant la miséricorde du Père et la miséricorde du Fils,
Jésus Christ, je vous invite à deux attitudes. La première est de redécouvrir
le visage de Dieu, du Dieu de votre foi chrétienne, à le purifier des fausses
images qui obscurcissent sa bonté et sa miséricorde, sa tendresse et sa
patience. Dieu est le Père de Jésus, il est aussi votre Père, il est notre
Père, un Père qui nous donne notre identité de fils. Père, dit le pape
François, est le mot employé le plus souvent par Jésus. Il est le chemin de la
vraie prière. « Si nous ne disons pas que nous sommes des fils, si nous ne nous
sentons pas des fils, si nous ne disons pas « Père », notre prière est païenne,
c'est une prière faite que de mots. » S'il est bon de prier la Vierge Marie,
c'est parce qu'elle est une fille bien aimée du Père et qu'elle a fait
l'expérience de la miséricorde de Dieu. Est-ce que vous faites l'expérience de
la paternité de Dieu pour vous ? Vous sentez-vous fils de Dieu Père ?
La deuxième attitude est de pratiquer la miséricorde du
Père. Soyez miséricordieux comme le Père à la suite du Christ. Certes, vous ne
serez jamais à la hauteur. Mais en accueillant l'Esprit de Dieu, vous pouvez
devenir de dignes fils, et comme le Père, pardonner et donner, comme dit
l'évangile, « une mesure bien pleine, tassée, secouée, débordante, qui sera
versée dans le pan de votre vêtement. » « À semer trop peu, écrit Saint Paul
aux Corinthiens à propos de la collecte pour l'Eglise de Jérusalem, on récolte
trop peu ; à semer largement, on récolte largement. » (1 ICo 9, 6) Il convient
d'inscrire dans le temps la pratique de la miséricorde, car ce n'est pas
facile. On y parvient en contemplant le Père, en le priant, en méditant les
paroles et les gestes de Jésus, en se laissant éclairé par l'Esprit. Être
miséricordieux comme le Père demande patience et persévérance. Être
miséricordieux comme le Père est source de grande joie et de reconnaissance,
car nous devenons davantage des fils, nous appartenons à la même famille.
D'ailleurs, nous disons « notre » Père. Plus nous sommes miséricordieux comme
le Père, plus nous nous rapprochons de Dieu, plus Dieu a une plus grande place
dans notre vie, plus nous lui ressemblons, et aussi, plus nous devenons frères
les uns des autres, notre fraternité grandit avec le Christ et entre nous.
Prenons le temps de contempler et d'expérimenter la
miséricorde de Dieu Père, afin d'être nous-mêmes miséricordieux.
+ Mgr Philippe GUENELEY
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