Rechercher dans ce blog

dimanche 16 novembre 2025

Quelle est ta vraie richesse? Qui est-elle?

 


16 nov. 2025

 33ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine I du Psautier) — Année C

 
 

Lectures de la messe

Introduction

Chers frères et sœurs,

Bonjour à tous et à toutes et merci de venir célébrer ce 33ème dimanche du temps ordinaire au Carmel de Develier. Le soleil se lève sur le Raimeux et plus sur la dent de Courroux depuis chez moi. la nouvelle année liturgique approche. 33 est un beau chiffre il nous fait penser aux 33 ans de la vie terrestre du Seigneur, même si le rapprochement n’est pas fait explicitement par les auteurs du calendrier liturgique. Il m’a fait penser aussi aux 33 ans de la vie de Catherine de Sienne, 1er docteur de l’Eglise au féminin avec Thérèse de Jésus en 1970. J’ai vu leurs noms côte à côte dans la maison natale de Catherine à Sienne. Paul VI avait instauré ces premiers doctorats féminins. Nous sommes allés en pèlerinage avec un car du Jura pastoral pour l’année sainte à Rome et avons pu voir de près notre pape Léon, tout sourire. Il nous a parlé de la Résurrection. Vous savez peut-être que le pape Urbain VI avait essayé d’instaurer les années jubilaires tous les 33 ans. Ce pape était très dur et Catherine de Sienne devait s’adresser à lui avec grande prudence, sans être entendue. Ce trait de personnalité fut une des causes du grand schisme d’Occident qui nous valut le Concile de Bâle, notamment. Maintenant, ce sont tous les 25 ans qu’ont lieu les jubilés. 

Vivons ce 33ème dimanche avec les pauvres puisque c’en est le thème et leur Jubilé, avec la  IXe Journée Mondiale des Pauvres. Elle a été instaurée par le pape François.

Chers frères et sœurs,

L’Evangile et les lectures de ce dimanche ne sont pas rassurants. Saint Luc, le cher médecin, habitué à secourir la misère humaine, met dans la bouche de Jésus des mots qui ne peuvent que nous ébranler. Il annonce la destruction du Temple, de ce beau temple de pierre, si bien construit qu’Hérode n’avait pas terminé lui-même. Il ne le sera pas avant la mort de Jésus et sa résurrection.

Le vrai Temple c’est son corps, c’est l’Eglise, c’est nous. Ce Nouveau Temple se construit dans les persécutions et les difficultés. Je ne peux m’empêcher de penser à Saint Paul qui décrit toutes les épreuves qu’il affronte dans son ministère.

Jésus annonce des tremblements de terre, des persécutions, des horreurs et des martyrs jusqu’à la fin des temps. Il avait déjà posé une question significative, sans y répondre, un peu avant : « le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » 

Le Temple de pierre sera détruit, le temple de nos corps le sera aussi, mais pour ressusciter avec Jésus. N’y a-t-il pas là l’invitation la plus forte qui soit, à le laisser naître en nous, à le laisser vivre en nous, à le revêtir, à participer à son mystère ? Catherine de Sienne au début de son livre, le Dialogue, a une belle expression : Contemple ceux qui sont revêtus de la robe nuptiale. Ils sont un autre moi-même, car ils ont dépouillé et perdu leur volonté propre, et ils ont revêtu la mienne, ils se sont unis et conformés à la mienne.

Parmi les obstacles qui nous empêchent de le rejoindre, comment ne pas songer à une certaine forme de richesse, celle de notre autosuffisance et aussi à la peine que nous avons d’abandonner nos biens, d’abord le plus précieux, la santé, lorsque nous y sommes contraints par l’âge. Devenir pauvre comme le Christ l’a été et donner sa vie pour annoncer la Bonne Nouvelle, paraît un bel idéal. Mais qui peut prétendre que l’action du Saint-Esprit et sa force ne sont pas nécessaires pour devenir et demeurer pauvres, chastes et obéissants, selon nos vœux de religieux.

La pauvreté du Seigneur n’est-elle pas un signe d’espérance pour nous ? Pourquoi tout quitter pour annoncer une Bonne Nouvelle qui paraîtra d’abord  à tous comme un échec. Sorti du sein du Père, il y retourne. Celui qui s’est fait pauvre pour nous jusqu’à donner sa propre vie a fini sur une croix. Nous devrions nous le rappeler, lorsque nous en portons une autour du cou.

La question de fond que nous pouvons nous poser dans notre société d’abondance est celle de notre situation devant Dieu, de notre indigence et de notre dépendance  absolue. Le catéchisme (n°33) , nous dit que notre âme ne peut avoir son origine qu’en Dieu seul. Elle est un germe d’éternité que nous portons en nous-mêmes, irréductible à la seule matière (GS 18, § 1). Elle est immédiatement créée par Dieu (366). La pauvreté du Christ que nous sommes invités à imiter est un lieu d’expérience de la rencontre avec son Père et un moyen de construction spirituelle. Aimer de cette façon n’est pas confortable et va jusqu’à la dépossession et au don de soi-même à Dieu, en passant par le service de ses frères, et la reconnaissance de la présence du Christ en eux, de image dans celui qui est démuni et pauvre. Un des exemples les plus extrêmes est celui de François d’Assise. Comment ne pas mentionner Maurice Zundel ?

Nous voyons parfois des foules pauvres, lors de catastrophes entre deux images de guerre dans nos médias. Nous les devinons derrière les produits bon marché que l’on déverse maintenant chez nous, achetés un jour, jetés le lendemain.. Cela interroge. Certaines banlieues de grandes villes ne le font pas moins. La journée mondiale des pauvres introduite le 33ème dimanche du temps ordinaire par le pape François nous interpelle. Le contraste entre notre manière de vivre en Occident et la situation des pays du Sud lui faisait mal.  C’était une révolte et un message qu’il se sentait contraint de porter. Nous-mêmes, nous nous sentons bien souvent prisonnier d’un système qui a des avantages certains. Qui ne s’interroge pas ? Comment changer un système en modérant la casse que subiront les plus démunis chez nous ? Quels leviers utiliser ? Il reste au moins l’espérance à entretenir, des braises sous la cendre. La première exhortation apostolique de notre pape Léon  sur l’amour envers les pauvres, « Je t’ai aimé » est sur ce thème. Son expérience missionnaire ne pouvait pas le laisser, lui d’abord, indifférent au drame de la grande pauvreté.

Le Seigneur veut nous combler de sa richesse, nous apprendre à tout recevoir de lui en nous faisant aussi prendre conscience qu’il nous a créés. Il nous accueille et nous pardonne dans le Christ. Il nous fait miséricorde : «  En lui, par son sang, nous avons la rédemption, le pardon de nos fautes. C’est la richesse de la grâce. Dieu a voulu  montrer, au long des âges futurs, la richesse surabondante de sa grâce, par sa bonté pour nous dans le Christ Jésus. À moi qui suis vraiment le plus petit de tous les fidèles, dit saint Paul, la grâce a été donnée d’annoncer aux nations l’insondable richesse du Christ. » Dieu est aussi le plus grand pauvre et est il est assoiffé de notre amour. Il est le plus petit, il est le serviteur.

Comment devenir petits à son image et témoigner de l’insondable richesse du Christ dans sa pauvreté ? « Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur. » Qu’est-ce que je considère comme mon trésor ?

Marie nous dit dans son cantique : « Il a renversé les puissants de leurs trônes et élevé les humbles. Il a comblé de biens les affamés, renvoyé les riches les mains vides » (Lc 1, 52-53). Il a dilaté son cœur, il a fait pour elle des merveilles. Puisse-t-il dilater le nôtre. Amen.


samedi 1 novembre 2025

Toussaint d'hier, d'aujourd'hui et de demain, pour un éternel présent : l'Apocalypse.

 


1 nov. 2025

 Tous les Saints —
Solennité

 
 

Lectures de la messe


Introduction  

Chers Frères et Sœurs, nous célébrons aujourd’hui la Solennité de la Toussaint, nous fêtons les vivants et non les morts… Nous sommes partagés à l’image du spectacle qu’offrait la nature devant chez moi  ce matin : le soleil qui perçait le brouillard. Il y a cette image et l’immense parterre des saints sur les représentations des jugements derniers du Moyen-Age. J’aime beaucoup me relire certains passages de la Divine Comédie de Dante dont la tombe est à Ravenne. Paolo Rumiz place dans son bouquin, Le fil sans fin, le début de son voyage près de Nursie dévastée par un tremblement de terre. C’est le lieu de naissance de Saint Benoît. La Sainteté est un état de communion avec Dieu. Il veut être tout en tous. Tous ensemble, réjouissons-nous donc dans le Seigneur, célébrons ce jour de fête en l’honneur de tous les saints avec les anges.

Chers frères et sœurs,

Le tableau de l’Apocalypse nous parle toujours. Ce ne sont pas que les saints du commencement de l’Eglise qui nous impressionnent, ni même ceux d’hier. Saint Jean-Paul II avait fait un grand nombre de canonisations pour montrer que les saints sont ceux d’aujourd’hui. (Le pape Léon vient de proclamer saint John Henry Newmann co-patron de l’éducation pour accompagner ceux qui le serons demain). Nous n’allons pas nous attarder à ce qu’elle sera effectivement et quand elle se produira. Cela nous échappe, mais il y en aura bien une. Aujourd’hui on nous parle d’un zéro absolu, et le perpétuel retour n’est plus  trop à la mode, le cycle des renaissances aussi.

Ce qu’il y a d’intéressant avec l’âge de la retraite active est que le questionnement  des fins dernières interpelle plus et que notre curiosité en est aiguisée. Les notions oubliées de la Somme Théologique de Saint Thomas, au détour d’une page, nous réveillent : Exitus : nous sommes sortis dans l’existence. Reditus : nous sommes appelés à retourner à Dieu. N’est-ce pas notre parcours et celui de la création ? C’est le plan de sa Somme de théologie qui lui était venu à l’Esprit. (Aujourd’hui saint John-Henry Newmann devient co-patron de l’éducation, pour quelle révolution ?)

Toutes les explications sur la fin des temps et l’Apocalypse ne sont pas bonnes. Mais elles nous aident à nous approcher d’un mystère prenant. La sottise humaine vient réveiller un souvenir de la 2ème bombe atomique qui avait éclatée un 6 août, détruisant la communauté chrétienne de Nagazaki. Elle nous a valu le témoignage du médecin japonais Takashi Nagai. Relisez les cloches de Nagasaki.

La foule immense que nul ne peut dénombrer, une marée humaine dépasse les grands rassemblements de toutes sortes que l’on peut voir aujourd’hui. Dieu sera tout en tous. C’est cela qui nous interpelle le plus aujourd’hui. Qu’aura-t-elle de si particulier ? Quelle sera la musique qui va les rassembler ? Pour me distraire, n’étant pas musicien, je me suis demandé si cette musique serait une gamme nonatonique, à neuf tons, un pour chacune des béatitudes, avec un extraordinaire accord pour manifester la joie, en utilisant les grandes orgues de l’univers. L’expression est de Saint Nicolas de Flüe : « Réjouissez-vous, soyez dans l’allégresse, car votre récompense est grande dans les cieux ! » Mais voilà, ce n’est pas du grégorien. Il paraît que c’est une gamme de Blues. Il est vrai qu’il existe une messe Jazz très en vogue. Quelle sera la musique céleste ?

Le Dieu Saint, lui que nous acclamons avec les anges après la Préface, nous communiquera sa sainteté. Qu’est-ce que donc que la sainteté de Dieu ? Personne ne peut la définir exactement, parce qu’aucun de nous ne la connaît et n’est entré en totale communion avec Lui, sinon celui qui est sorti de Lui. Il est apparu sous un aspect si fragile en revêtant notre humanité, en souffrant et en mourant que nous restons perplexe. Il est ressuscité, mais nous avançons dans l’obscurité de la foi. Il nous a donné les neuf clés de son mystère avec les neuf béatitudes et le passe-partout de l’Amour.

Le catéchisme renvoie la sainteté à la définition de Dieu , laquelle renvoie à la Trinité, c’est dire la témérité qu’il y a à dire quelque chose d’elle.

La sainteté de Dieu, selon le Catéchisme, est sa perfection absolue, sa transcendance, sa pureté d’amour et de vérité, qui le distingue de toute créature.

« Il est totalement autre, parfaitement pur, sans ombre de mal, et plein d’amour. »

Dieu seul est saint par essence, mais il sanctifie ceux qui s’unissent à lui. Nous sommes appelés à le rencontrer et à vivre avec lui et en lui pour toujours et lui en nous. Douter de son amour et de sa faculté de nous transformer, c’est douter de sa toute-puissance. Il est vrai qu’il y met une limite, notre volonté.

La sainteté de Dieu est le foyer inaccessible de son mystère éternel ! Sa manifestation est ce qu’on appelle sa gloire.

« L’Église, à laquelle tous sont appelés dans le Christ Jésus, et dans laquelle, par la grâce de Dieu, nous acquérons la sainteté, a été fondée par le Christ pour être une communion de vie, de charité et de vérité. » Il met sa gloire en nous, dans ce que nous vivons. Il ne s’agit pas des couronnes du Louvre, mais de la manière dont nous vivons les béatitudes. Nous nous sentons petits devant lui, mais il s’est fait encore plus petit pour nous et devant nous. Il vient en nous pour nous rendre semblables à lui. « Dieu appelle chacun à la sainteté : “Soyez saints, car moi, je suis saint” (Lv 19,2). ».

C’est en raison de cette petitesse de Dieu que nous le regardons avec confiance. Sans lui, nous ne pouvons rien faire. La mythologie grecque raconte qu’une femme, Sémélé, avait demandé à Zeus de lui montrer sa gloire. Elle en brûla… Dieu qui se communique à nous, c’est l’inverse, il nous aime et nous transforme par l’amour qu’il nous porte, en se faisant plus petit que nous. Devant les difficultés de la vie et celles que nous provoquent d’autres personnes, nous nous sentons parfois comme paralysés, devant une sorte de mur. Seul le Seigneur est assez petit et assez puissant pour en venir à bout, pour ouvrir la porte de tous les  cœurs y compris du nôtre.

Le scepticisme ambiant, en forme de haussement d’épaules, nous interpelle quant à une rencontre possible avec Dieu. Maintenant on se laisse un peu plus fréquemment interroger par ce qu’on appelle les états de mort imminente. J’ai lu il y a quelques jours un médecin de Lourdes, le Dr Patrick Theillier. Il a écrit trois livres sur ce sujet, et dit que Sainte Thérèse de Jésus en avait eu un à l’âge de 23 ans. On avait ouvert sa tombe, coulé de la cire sur ses paupières. Il s’agit peut-être d’une approche, mais ce n’est pas encore la rencontre. Même après avoir lu le Livre des Demeures, on n’y est pas encore arrivé, cela ne suffit pas ! Lisez cependant les livres de saints et des biographies de saints. Ils sont notre famille de là-haut avec ceux que nous avons connus et aimés, pas toujours assez.

Aujourd’hui est proclamé docteur de l’Eglise le cardinal Newman qui osa donner la priorité à sa conscience. Si vous en avez l’occasion essayez de vous renseigner sur sa vie. Je voudrais achever avec lui. Il faisait des sermons de 30 à 40 minutes qu’on se pressait pour écouter… Il insistait sur le fait qu’on ne pouvait se limiter en matière religieuse au seul raisonnement. Il parlait d’assentiment. La foi, aussi grande soit-elle, tout au plus « ne produit que le héros », mais « c’est l’amour seul qui fait le saint ». Pourquoi ? Parce que c’est l’Esprit Saint, présent en nous, qui nous rend saints.

Soyons témoins de l’espérance qui nous habite, soyons-le pour nous et pour tous ceux que nous portons dans notre cœur. Quels sont ceux que nous aimerions revoir ? Nous pourrions y en ajouter quelques autres chaque jour pour nous habituer à changer nous-mêmes, à devenir comme Dieu et à manifester notre confiance en lui et en sa Toute-Puissance.

Marie Mère de l’Eglise, Mère de tous les saints, priez pour nous. Amen.