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mardi 3 mai 2022

Dans la Maison de Nicolas de Flüe

Oeuvre de Philipp Schönborn inaugurée au Ranft
dans la maison natale de Nicolas de Flüe, le 1er mai 2022

Chers Frères et Sœurs,

Cet épisode de la pêche miraculeuse est bien curieusement placé chez saint Jean. Il se déroule en Galilée, au bord de la mer de Tibériade, alors que les autres ont lieu à Jérusalem. Il est pourtant appelé troisième manifestation. Il parle aux lacustres actuels de Sarnen, du lac des 4 cantons, en passant par Bienne et Neuchâtel, jusqu’au plus beau, le Léman. Notre pays est un pays de lac, ce qui dispense de les citer tous, mais nous permet de nous représenter facilement la scène. Ce n’est pas la symbolique qui manque chez saint Jean, mais il faut nous limiter. On sent une construction une sorte de raccommodage de pièces dans le texte, mais il est mieux de laisser cela aux spécialistes. Les disciples partent pêcher, ils se remettent à leur besogne quotidienne, peut-être pour se mettre à l’abri, attendre et gagner leur vie. Cela nous pouvons d’introduire le thème du travail en ce dimanche qui est également la fête de saint Joseph artisan et travailleur. Nous devons être liturgiquement diplomates en ce 3ème dimanche de la résurrection et ce pèlerinage chez Nicolas de Flüe.  Imaginons-nous que les Apôtres attendent l’Ascension et la venue de l’Esprit. Lorsque Pierre leur fait jeter les filets, les pauvres ne prennent rien. Il est nécessaire qu’intervienne Jésus pour qu’ils réussissent à prendre quelque chose, et que la pêche soit abondante.

Pierre et les autres entendent mais il ne comprend pas qui les interpelle. Il faut que le disciple que Jésus aimait particulièrement révèle son identité à Pierre pour qu’il le reconnaisse et se jette à l’eau. Nous comprenons qu’il s’agit là d’une clef fondamentale de lecture, celle de l’amour.

Cette pêche est un signe qui préfigure la pêche gigantesque que décrit l’Apocalypse, avec ses myriades de myriades. Il y a de quoi faire se pâmer d’admirations les petits enfants qui apprennent à compter. Nous les verrions presque appuyer quelques minutes sur un chiffre de leur ordinateur pour expliquer à leur maman combien ils veulent de bonbons ou autres. Quel émerveillement devant pareils chiffres. L’émerveillement est un thème cher au Pape François. C’était celui des foules à la multiplication des pains. Ils en voulaient encore, et encore… Dans notre Évangile, nous trouvons trois mots dans le grec pour exprimer le mot poisson. L’un d’eux est utilisé pour traduire qu’il est pris comme nourriture avec du pain. Nous comprenons qu’il y a un rapprochement avec l’Eucharistie.  C’est avec l’amour que va l’Eucharistie. Le Seigneur veut avant tout nous proposer la vie éternelle. La clef en est l’amour, comme pour des amoureux capables de tout lâcher pour se retrouver. Il est vrai que parfois la machine à calculer reprend le dessus. Un amour cela s’entretient. La vie trinitaire est amour, et elle nous invite à le partager.

Jésus ne va pas dire à ses Apôtres de rester au bord du lac, ils vont être envoyés au loin, pour pêcher avec Pierre. L’Évangile nous montre qu’il aura un rôle privilégié, et même un rôle clef, si vous me permettez. La première lecture a témoigné que la rencontre avec Jésus ressuscité et la venue de l’Esprit le transforme au point de devenir un vrai témoin. Une source a commencé de couler en lui.

Celle qui coule dans le cœur de frère  Nicolas nous montre qu’il n’y a pas besoin de courir le vaste monde. Nous avons chacun notre mission. Il a laissé le lac près de chez lui pour entrer dans le palais où coule la fontaine de vie à côté de laquelle passe beaucoup de monde sans la voir et s’y arrêter. Frère Nicolas est devenu juste, il a été justifié parce qu’il a écouté l’appel du Seigneur dans le fond de son cœur, comme Jean. Qui pourrait mettre en doute son travail. Il est parti alors qu’il était déjà considéré comme un vieillard. La vie d’un paysan de montagne n’est pas une sinécure, aujourd’hui encore. Le mois qui vient de s’écouler a peut-être fait naître quelques questionnements chez nous, sur des sujets que nous considérions comme basiques, en raison de la guerre.

Le choix de Nicolas, sa vocation, son oui, si rare sous cette forme, s’est-il fait tout seul ? En relisant quelques pages d’un ouvrage hélas un peu ancien, celui de Philippe Baud : Nicolas de Flüe, un silence qui fonde la Suisse, j’ai été arrêté par une citation d’Alexandre Soljenitsyne tout au début. Comme vous, cette guerre en Ukraine m’interpelle et me rappelle la guerre plus que froide. Le livre avait été écrit dans le contexte du dégel (merci saint Jean-Paul II). Voici cette citation : « ce Juste sans lequel ne subsiste aucun village. Ni  aucune ville.  Ni notre Terre entière. » Le grand écrivain et témoin aurait-il écrit quelque chose sur notre ermite ? Ces mots s’appliquent bien à Nicolas de Flüe, mais il s’agit d’une citation partielle d’une phrase tirée de son petit livre « Matriona ». Il parle d’une pauvre paysanne : « Nous vivions tous à côté d’elle, sans comprendre qu’elle était ce Juste du proverbe, ce Juste sans lequel ne subsiste aucun village. Elle était le Juste, sans qui il n’est village qui tienne. Ni ville. Ni la terre entière.» 

Un commentateur sur un blog (Médiapart) dit qu’il ne trouve pas ce proverbe. » Ce doit être en fait le juste du livre des Proverbes. La référence à la citation originale complète, nous fait penser bien entendu à Dorothée. Ils avaient reçus tous les deux une part de l’Esprit pour mener à bien leur mission personnelle et sans son épouse, notre Nicolas n’aurait pu accomplir la sienne. Etre juste et justifié, c’est suivre le Seigneur. « M’aimes-tu plus que ceux-ci ? » « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi ! Comme dit l’Écriture : De son sein couleront des fleuves d’eau vive. » (Jn 7,38)

Fêtant cette année le 75ème anniversaire de la canonisation de Nicolas de Flüe par le pape Pie XII, je suis parti en exploration de ce côté, mais rassurez-vous je ne vous ferai pas remonter le courant. Ces temps sont éloignés, mais Pie XII avait été impressionné par la protection dont avait bénéficié notre pays. Cela légitime un regain d’attention et de recours à saint Nicolas de Flüe lorsque des bruits, des images et des mots détestables dont celui d’atome nous atteignent. Ces gens qui doivent fuir leur pays ne peuvent que nous interpeller… Du travail, oui, la paix mille fois oui aussi. Pie XII n’a pas une cote extraordinaire, mais il y avait aussi des prémices parus en même temps que la canonisation de  frère Nicolas, une encyclique qui annonçait un renouveau liturgique : « il n'est pas sage ni louable de tout ramener en toute manière à l'Antiquité. » Il avait aussi encouragé par un autre écrit l'apostolat des laïcs dans le monde. Tout cela est bien loin, mais puissions-nous apprécier avec frère Nicolas les dons reçus et les valoriser. Il a vécu au Moyen-Âge mais son esprit n’est pas prisonnier du temps. Conclusion de son homélie : « Fasse le Seigneur que tous les hommes, sans distinction de classes, se tournent avec vénération vers saint Nicolas de Flue et apprennent de lui à se servir des biens passagers de cette terre, qui trop souvent entravent et retardent l’élan de l'âme, comme d’une voie qui les mène vers les joies du ciel qui ne connaîtront point de déclin ! » C’est ce que dit sa célèbre prière : « Mon Seigneur et mon Dieu, enlevez-moi tout ce qui ni empêche d'aller à vous. Donnez-moi tout ce qui me conduira jusqu’à vous. Prenez- moi à moi et donnez-moi pleinement à vous. » Amen

Philippe et la Divine Miséricorde


Nous fêtons ce matin les apôtres Jacques et Philippe et nous entendons le fameux dialogue entre Philippe et le Seigneur : "Montre-nous le Père et cela nous suffit". Tout au long de son encyclique Dives in Misericordia, saint Jean Paul II nous expliquait que "dans le Christ et par le Christ, Dieu devient visible dans sa miséricorde, c'est-à-dire qu'est mis en relief l'attribut de la divinité que l'Ancien Testament, à travers différents termes et concepts, avait déjà défini comme la «miséricorde»." Il cite le nom de Philippe trois fois.
Sa tombe se trouverait en Turquie, nous en avons déjà parlé.
Selon la tradition, Philippe mourut en l'an 80 après JC, âgé d’environ 85 ans , martyr pour sa foi, crucifié la tête en bas comme Saint-Pierre. Il a ensuite été enterré à Hiérapolis. Dans la nécropole antique de cette ville a été trouvée une inscription qui mentionne une église dédiée à Saint-Philippe, tandis qu’à une date non précisée, le corps de Philippe a été emporté à Constantinople pour le soustraire au danger de profanation par les barbares. Et au sixième siècle, sous le pape Pélage I, il a été transféré à Rome et enterré avec l'apôtre Jacques, dans une église construite spécialement pour eux (maintenant appelé l'église «des saints apôtres» ). Voir Zénit (italien). Sur les reliques présentes à Rome : Article de Trente Jours.
Une curiosité : Dans la basilique des Saints Apôtres, on trouve le coeur de Clémentine Sobieska, illustre dame polonaise, bien sûr, qui épousa   Jacques Stuart (leur sépulture est dans la basilique Saint Pierre de Rome).  
 

Une religieuse de l'Assomption nous offre une synthèse récente sur la découverte du professeur Francesco d'Andria de ce qui paraît être la tombe de l'Apôtre Philippe. Un sceau comportant une reproduction de la basilique et du martyrium constitue un indice très intéressant.