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dimanche 27 juin 2021

« Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! »

 


 27 juin 2021 dimanche, 13ème Semaine du Temps Ordinaire — Année B
  Première lecture « C’est par la jalousie du diable que la mort est entrée dans le monde... Sg 1, 13-15 ; 2, 23-...
Psaume Je t’exalte, Seigneur : tu m’as relevé. 29 (30), 2.4, 5-6ab,...
Deuxième lecture « Ce que vous avez en abondance comblera les besoins des frères pauvre... 2Co 8, 7.9.13-15
Évangile « Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! » Mc 5, 21-43

Chers Frères et Sœurs,

Un temps de grâce qu’il a d’abord été donné à quelques-uns de percevoir, tel a été ce moment privilégié où Dieu a visité son Peuple dans la personne de Jésus. Saint Paul VI disait de lui qu’il est « le Christ Jésus est le principe et la fin, l'alpha et l'oméga, le roi du monde nouveau, l'explication mystérieuse et ultime de l'histoire humaine et de notre destinée ; il est le médiateur et pour ainsi dire le pont entre la terre et le ciel. Il est, de la façon la plus haute et la plus parfaite, le Fils de l'homme, parce qu'il est le Fils de Dieu, éternel, infini. » Il se manifeste au monde, tout en se cachant dans l’Évangile d’aujourd’hui. Il enseigne et donne des signes, chasse les esprits impurs et aujourd’hui accomplit deux miracles concernant deux femmes.

Ces deux signes cachés nous touchent particulièrement. Ils concernent deux femmes l’une très jeune au chevet de laquelle Jésus est appelé d’abord, et la seconde concerne une femme adulte, mise au ban de la communauté en raison de sa maladie, de pertes de sang. Elle n’avait pas le droit d’aller prier avec les autres, on s’écartait d’elle parce qu’on craignait de contracter une  impureté rituelle. Le sang mystérieusement porteur de vie, devient une cause de mise à l’écart. Nous avons beaucoup de la peine à le comprendre aujourd’hui, qu’y pouvait-elle ? Elle qui avait reçu le don et la mission de donner la vie, elle est en quelque sorte sanctionnée parce qu’elle est une femme. Saint Matthieu précise qu’elle avait voulu toucher ne serait-ce que la frange du vêtement de Jésus. Celui que Jésus portait avait certainement, comme pour tous les juifs pieux un fil violet représentant le ciel et des franges aux nombres de 613 symbolisant les commandements de la loi, selon une prescription du lévitique « Quand vous aurez ces franges, vous les regarderez et vous vous souviendrez de tous les commandements de l'Éternel, pour les mettre en pratique, Vous vous souviendrez ainsi de Mes commandements, vous les mettrez en pratique et vous serez saints pour votre Dieu. » Leur finalité est la sainteté et c’est la foi en Jésus qui rend à cette femme non seulement la guérison, mais la sainteté et qui la réintègre au Peuple de Dieu. Ce ne sont pas les prescriptions de la Loi. Jésus réagit à la foi de cette femme. Beaucoup l’approchent, le touchent, mais ils n’ont pas cette clef qui ouvre la porte de la grâce. Jésus poursuit son chemin, mais elle doit percevoir qu’il est maintenant toujours avec elle, ce qui est le plus grand des cadeaux et ne peut que nous interpeller sur notre foi en la personne de Jésus. Croyons-nous  qu’il est toujours avec nous ?

Le Seigneur arrive ensuite chez Jaïre, le chef de la synagogue, et là encore intervient la foi. Lorsqu’on annonce à Jaïre que sa fille est morte, qu’il n’y a plus rien à faire : « À quoi bon déranger encore le Maître ? » . Quel bouleversement cela doit être pour lui. Lorsque des parents perdent un enfant, leur douleur est telle, que ce qu’ils disent, le plus souvent est : « Vous ne pouvez pas comprendre. » Qui le peut en effet, le chagrin est si fort qu’il isole. Jésus le réconforte et suscite à nouveau sa foi et celle de sa mère : « Ne crains pas, crois seulement. » Avec comme témoins privilégiés, Pierre, Jacques et Jean, il accomplit cette première résurrection, ce retour à la vie, en faveur d’une femme. Est-il nécessaire de le souligner ? Quel a dû être son éblouissement au moment où elle s’est réveillée ! On se plairait à croire qu’elle l’a suivie, qu’elle est devenue une de ses disciples. Il ne peut y avoir eu avoir qu’une histoire d’amour spirituel. Nous le saurons lorsque nous serons auprès de lui. Il n’empêche que le sujet n’est pas seulement émouvant et touchant. Ce miracle annonce la résurrection de Jésus, c’est évident. L’ancien pape Benoît relève dans un commentaire, qu’un rapprochement peut être fait avec la Transfiguration en raison de la présence des 3 témoins privilégiés, en plus des parents. Jésus avec Moïse et Élie parlait de sa montée vers Jérusalem et de sa propre résurrection. Le miracle qui se produit aujourd’hui est une image de la résurrection. Il s’agit surtout d’une réanimation d’un cadavre, comme pour le jeune homme de Naïm et Lazare. L’ancien pape mentionne la réanimation, grâce à l'habileté des médecins, de personnes cliniquement mortes.

Le sujet intéresse beaucoup aujourd’hui avec ce qu’on appelle les états de mort imminente, depuis les recherches de Mme Kübler-Ross. Ce sont des situations limites, naturellement, et qui sait les merveilles et la complexité qui se cache dans un cerveau humain, quels sont les modes de relation de notre corps et de notre âme ? C’est un grand mystère, et il est prudent de ne pas se fier à tout ce qu’on entend et lit sur ce sujet, en laissant toutefois, un point d’interrogation bienveillant. Les publications de toutes sortes, voire abusives foisonnent.

La Résurrection de Jésus est d’un autre ordre, « s’il ne s'était agi que du miracle d'un cadavre réanimé, cela ne nous intéresserait, en fin de compte, en aucune manière. », dit l’ancien pape Benoît. Tout de même un peu…

La Résurrection de Jésus est « l'évasion vers un genre de vie totalement nouveau, vers une vie qui n'est plus soumise à la loi de la mort et du devenir mais qui est située au-delà de cela - une vie qui a inauguré une nouvelle dimension de l'être-homme, une sorte de « mutation décisive »,  un saut de qualité. Je me permets une citation le sujet étant sensible.

Relevons encore que la Résurrection de Jésus et la nôtre est un des points de divergence irréductibles avec les religions orientales. On prend mieux conscience de cela avec l’expérience spirituelle du Père Henri Le Saux et certaines réflexions à ce sujet. La résurrection est historique, et nos personnalités ont un caractère irréductible. Elles ne sont pas appelées à se fondre dans un grand tout spirituel et divin. Il y aussi cette sorte de conservation et de transformation de notre dimension matérielle et corporelle. Rien de la création issue de Dieu n’est rejeté, tout est assumé jusque dans la vision de Dieu. A la résurrection notre corps sera « intégré » à la béatitude et y participera. Il est difficile d’utiliser des mots simples. Nous sommes créés à l’image de Dieu. Le sujet est vaste et appelle un saut dans la foi. Notre résurrection surviendra à la suite de la résurrection de Jésus, vrai Dieu et vrai Homme. « Dieu a créé l’homme pour l’incorruptibilité, il a fait de lui une image de sa propre identité. »

Nous sommes tous invités à la joie : « Que mon cœur ne se taise pas, qu’il soit en fête pour toi, et que sans fin, Seigneur, mon Dieu, je te rende grâce ! » Puisse-t-elle habiter en nous. Le Christ veut nous communiquer sa joie, que Notre-Dame nous aide à l’accueillir. Amen.

dimanche 13 juin 2021

Le Cédre du Liban chez nous. Ce n'est pas un rêve!

 




13 juin 2021 - dimanche, 11ème Semaine du Temps Ordinaire — Année B
Lectures de la messe
Première lecture « Je relève l’arbre renversé » Ez 17, 22-24
Psaume Il est bon, Seigneur, de te rendre grâce ! 91 (92), 2-3, 13-14,...
Deuxième lecture « Que nous demeurions dans ce corps ou en dehors, notre ambition... 2 Co 5, 6-10
Évangile « C’est la plus petite de toutes les semences, mais quand elle grandit... Mc 4, 26-34

 Chers Frères et Sœurs,

Lorsque nous entendons des mots tels que règne, et règne de Dieu, nous avons diverses représentations qui nous viennent à l’esprit, de l’épopée napoléonienne à la royauté de droit divin en passant par les intégrismes de tout poil, puis en intégrant l’abomination de la désolation de notre époque contemporaine, l’horreur totale : les personnalités narcissiques perverses, manipulatrices, incapables d’empathie, toxiques, etc… l’horreur à petite et grande échelle. Le vocabulaire est riche. L’Église étant composée de personnes humaines et donc faillibles et pécheresses n’est pas exempte… Il n’y a pas eu que les Borgia, et même Marozie et Théodora qui avait de la suite dans les idées.  

Le royaume de Dieu ce n’est pas cela. Les disciples ont eu bien de la peine à le comprendre. Même après la résurrection et avant l’Ascension, ils songeaient à un royaume terrestre, une domination d’Israël sur toute la terre. Les Apôtres envisageaient des postes de ministres, avec des miracles et Jésus ressuscité à leur tête, ç’aurait été une heureuse promenade de santé, le paradis sur terre. Jésus avec toute sa pédagogie n’arrivait pas à le leur faire comprendre. L’auraient-ils suivi s’il leur avait dévoilé tout ce qu’ils auraient du souffrir comme lui. Comme traumatisme, il ne pouvait d’ailleurs rien y avoir de plus fracassant et destructeur que sa propre mort. C’est bien ce qu’escomptaient pharisiens et grands-prêtres qui avaient condamné et fait exécuter Jésus : A la mort du berger, le troupeau aurait du se disperser. Les évangiles, les Actes et saint Paul nous disent pourtant que c’est le contraire qui s’est produit et vous-mêmes en êtes les témoins. Nous ne serions pas ici, si une force discrète et incroyablement puissante n’était entrée en scène et n’agissait pas en nous, n’agissait pas dans l’Église.

Même après des glaciations ou des hivers très rudes, la vie surgit à nouveau. Jésus prend l’exemple de la croissance des blés ; nous les voyons pousser dans nos champs en cette saison. Dans nos jardins, il arrive même qu’après avoir bien retourné la terre, surgissent quelques plants issus de l’année précédente. La vie est têtue, j’allais dire comme l’Esprit-Saint, mais il l’est encore plus, il est encore plus fort.

Vous avez retenu l’image du cèdre de la première lecture. « À la cime du grand cèdre, je prendrai une tige ; au sommet de sa ramure, j’en cueillerai une toute jeune, et je la planterai moi-même sur une montagne très élevée. Sur la haute montagne d’Israël je la planterai. » Il paraît qu’en Ajoie on va en tester en raison du réchauffement climatique. Je les aime beaucoup, parce que étant tout petit, il y en avait un à côté de la maison de mon grand-père. Je les aime, non seulement à cause du plus vieux de Suisse à Genève près de la gare, qui a vu Napoléon, mais encore parce qu’il rappelle le Liban qui souffre beaucoup aujourd’hui. Il nous faut prier pour ce pays. La lecture parle d’une tige emportée par le grand aigle, ce type de multiplication est plutôt difficile pour cette espèce. Le grand aigle, c’est le Seigneur, qui l’emporte sur la montagne où Jésus est mort et ressuscité. Le grand arbre va symboliser pour les Pères la première alliance et le rameau qui va devenir un grand arbre, l’Église. C’est la lecture qui en est faite aujourd’hui. L’Église grandit toujours.

Est-ce visible en permanence ? Mais alors ce fameux Royaume où se construit-il et quand? Il paraît bien discret et vieillissant en certaines périodes. Comment le discerner, quels chemins de croissance utilise-t-il ? Lorsque le Seigneur s’est élevé pour aller siéger auprès de son Père , il a demandé à ses Apôtres d’aller apporter la Bonne Nouvelle à toutes les Nations et de les baptiser au Nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit jusqu’à ce qu’il revienne. Rappelons-nous que nous avons reçu avec notre baptême et avec la confirmation deux dons extraordinaires qui laissent une marque dans notre âme. Les théologiens disent qu’il s’agit de sacrements à caractère. Ce sont des sources de vie, non seulement pour nous, mais pour ceux qui nous entourent.

Nous fêtions vendredi le Sacré-Cœur et un très beau texte de saint Bonaventure nous expliquait qu’il est la source de la vie et que le sang et l’eau signes de la vie et de l’amour de Jésus s’écoulait et se divisait en 4 fleuves qui arrosaient le paradis. Nous pourrions aussi dire qu’ils entrent dans le sol et la terre de notre humanité pour ressortir en nous et se répandre autour de nous, à la manière de résurgences comme certaines rivières, par la porte des sacrements que nous avons reçu. Le Seigneur entre en nous pour nous faire grandir et faire grandir son Église, pour que son amour vienne imprégner toutes nos vies. Le sacrement de mariage sert à fortifier et grandir l’amour de ceux qui se le donnent, par seulement pour que s’améliore leur confort personnel… « Notre chez nous à nous tous seuls, prière de ne pas déranger pour l’éternité », c’est au contraire pour que se répande le véritable amour dans sa totalité pour le bien de tous et pour que grandisse la communauté de ceux qui ont le bonheur de rencontrer Dieu. L’Église a un aspect visible et invisible. Elle est destinée à accueillir tous les hommes, car Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et il veut qu’aucun ne se perde, il aime toutefois notre liberté qui est à l’image de la sienne. Dieu est parfaitement libre et aime parfaitement. La Trinité est un mystère d’amour où les trois personnes se donnent totalement. Nous sommes appelés à partager cet amour, à notre place d’hommes et de femmes. Jésus en sa personne est venu montrer qu’il est possible à l’homme de rencontrer Dieu et de participer à son bonheur, non pas en restant à côté de la porte d’entrée en écoutant la musique de la fête, mais en devenant nous-mêmes participants du bonheur de ce Royaume où Dieu sera tout en tous. L’Eucharistie nous a été donnée pour grandir, pour marcher vers le Royaume. Notre croissance s’achèvera dans notre rencontre avec le Seigneur qui n’est pas une fin, mais une participation à son bonheur.

Le Royaume de Dieu est au-dedans de nous et nous serons un jour totalement en Dieu. Mais ce Royaume commence dès maintenant, l’invisible englobe le visible. Le pape François aime à rappeler que nous ne pouvons pas établir un mur de séparation entre le bonheur à venir et ce que nous vivons maintenant. « Le royaume de Dieu n’est pas seulement à placer dans le futur. « Le royaume de Dieu est parmi vous », il est déjà présent et nous pouvons dès maintenant faire l’expérience de sa puissance spirituelle. Dieu vient établir sa seigneurie dans notre histoire, dans l’aujourd’hui de tous les jours, dans notre vie ; et là où elle est accueillie avec foi et humilité germent l’amour, la joie et la paix. Le signe que nous pouvons retenir est celui de la joie qu’avait allumée dans le cœur des Apôtres l’Esprit-Saint. Il est assez particulier d’avoir reçu la bastonnade, d’avoir traversé les épreuves de Saint Paul et d’être joyeux. Nous pouvons demander à l’Esprit de nous donner cette joie que rien ne devrait pouvoir éteindre. Que Marie dont nous fêtions le Cœur Immaculé hier nous apprenne à accueillir cet Esprit et à le donner pleinement par notre oui. Amen.

 

dimanche 6 juin 2021

Le Sang du Christ et l'Alliance





6 juin 2021 Le Saint Sacrement — Année B - Solennité

Lectures de la messe
Première lecture « Voici le sang de l’Alliance que le Seigneur a conclue avec vous » Ex 24, 3-8
Psaume J’élèverai la coupe du salut,
j’invoquerai le nom du Seigneur.
Deuxième lecture « Le sang du Christ purifiera notre conscience » He 9, 11-15
Évangile « Ceci est mon corps, ceci est mon sang » Mc 14, 12-16.22-26

 

Chers Frères et Sœurs,

En célébrant cette solennité liturgique du Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Seigneur, nous sommes interpellés par des textes qui manifestent une particulière insistance sur le sacrifice de Jésus. Ce qui est souligné c'est le fait de l'Alliance Nouvelle. Notre passage de l'évangile de saint Marc n'a donc pas tant été choisi pour magnifier la présence réelle, que pour insister sur l'eucharistie comme Alliance Nouvelle. Et le texte choisi insiste en effet beaucoup sur les préparatifs de la Pâque, sur la salle où le repas va se dérouler. Il n’en demeure pas moins qu’il est là, comme il l’a manifesté aux disciples d’Emmaüs. Il rompt le pain, disparaît à leurs yeux, il demeure cependant réellement avec eux et en eux, nourriture pour leur chemin vers Jérusalem, signe de l’Église, signe de la Jérusalem d’en haut.

Le sang de l'Alliance constitue le motif principal du choix des lectures d’aujourd’hui. Dans le Nouveau Testament, le sang a pris une importance capitale, dès qu'il est rapproché de la mort du Christ. Malgré le point positif des transfusions sanguines, la seule évocation du sang provoque presque un mouvement de recul chez nous. Notre contexte contemporain ne paraît pas y être réceptif, ne serait-ce qu’en raison des modes alimentaires actuelles. Toutefois nous pouvons faire un rapprochement avec la mère qui allaite son enfant, puisque son lait provient de son sang. La comparaison est fréquente dans la littérature mystique.

Dans les moins, l’idée des sacrifices d’animaux nous gêne, et la seule pensée des sacrifices du temple de Jérusalem provoque la grimace. Ils font penser à une gigantesque boucherie à ciel ouvert. D’ailleurs comment Dieu pourrait-il être apaisé et se satisfaire par des sacrifices d’animaux, lui qui est pur Esprit. Cela paraît contradictoire.

La dernière Cène dont nous parle l’Évangile, se rapporte à la sortie d’Egypte et au sacrifice pascal. L’Écriture mentionne dans la Genèse les sacrifices d’Abel qui était berger et qui offrait les premiers-nés de son troupeau. Lorsque j’étais gosse et servant de messe, je me souviens du rappel de cet épisode dans les panneaux de bois sculptés par Laurent Boillat de part et d’autres du tabernacle à Tramelan. Nous avons également tous en mémoire, le sacrifice d’Abraham offrant un bélier en lieu et place d’Isaac. Le rapprochement nous aide à entrer dans le contexte sacrificiel de Jésus.

Avec Moïse et le récit de la conclusion de l’Alliance, avec l’aspersion du sang d’animaux, nous voici avec une idée supplémentaire, celle d’un accord et d’un engagement réciproque, bilatéral. Dieu s’engage à protéger son Peuple s’il est fidèle au contenu du traité mentionné sur les tables de la loi. Par la suite, les auteurs de l’Écriture vont relever que les infidélités du Peuple aux conditions de ce traité d’Alliance auront pour conséquence les malheurs qui le frapperont. Il s’agira de sorte de sanctions, parfois très rudes, que ce soit durant la traversée du désert ou une fois que le Peuple aura pris possession de sa terre.   

Jésus vient offrir un sacrifice qui permettra la conclusion définitive d’une Alliance entre Dieu et notre humanité. L’idée de la mort de Jésus est des plus pénibles. Comment la mort d’un homme, qui plus est celle du Fils de Dieu est-elle acceptable et même concevable. Elle ne peut l’être que vue sous l’angle de l’amour. La mort de Jésus en croix est la manière choisie par lui pour manifester l’amour qu’il a envers son Peuple et celui qu’il a pour chacun de nous. Il nous aime à la folie, et il a voulu l’exprimer par le geste le plus fou qui soit. Ce geste a une telle valeur et une telle force, une telle puissance que rien ne pourra jamais empêcher Dieu de nous manifester son amour. Dieu veut que tous les hommes soient sauvés, qu’ils puissent le connaître et le rejoindre. Rien ne pourra empêcher la miséricorde de nous atteindre si nous ne la refusons pas.

Le sang était fréquemment employé dans le contexte du temple pour les purifications rituelles. Il était dans les conceptions anciennes symbole de vie. Le sang est pour les Hébreux, le siège de l’âme principe de la vie, il a une sorte de personnalité. Dieu est seul Maître de la vie, source de la vie, car c’est lui qui la donne. Il est le Père et la Mère. Blesser un homme ou le tuer, c’est donc atteindre Dieu lui-même présent en son image créée. En la personne de Jésus c’est encore plus grave, important et fort. Mais ce qu’il y a de merveilleux, c’est le fait que d’avoir porté atteinte à sa vie a provoqué un phénomène inverse à celui d’une sanction. Une Alliance définitive a été conclue par Dieu avec les hommes. Quoiqu’il arrive, son amour pour chacun nous et pour nous tous est toujours offert, rien ne peut l’empêcher. La porte du ciel nous est définitivement ouverte. Il donne sa vie, elle ne lui est pas prise. Tout est transformé.

Ce qu’il y a de plus étonnant encore, c’est la forme que le Seigneur a voulu prendre pour nous rencontrer le plus fréquemment possible et pour nous accompagner dans notre croissance vers le Royaume. Il s’est fait pour nous, nourriture et boisson. Nous sommes en quelque sorte en construction permanente depuis le sein de notre mère, même lorsque nos forces diminuent jusqu’au jour où nous rencontrerons définitivement le Seigneur. Sa chair nourrit, son sang abreuve, mais le Christ tout entier demeure  sous chacune des espèces, dit la séquence « Sion célèbre ton Sauveur ». L’Eucharistie sous les deux espèces vient poursuivre notre transformation spirituelle qui a pour but de nous faire ressembler au Seigneur lui-même. « Il est présent totalement sous chacune des deux espèces du pain et du vin. Le voici, le pain des anges, il est le pain de l’homme en route, le vrai pain des enfants de Dieu, qu’on ne peut jeter aux chiens. » Il est notre nourriture pour la route. On parle de viatique, lorsqu’on donne la communion à ceux qui sont en fin de vie, pour la dernière partie de leur chemin. En fait le Seigneur est là pour nous durant la totalité du chemin. Nous avons reçu un pain de vie éternelle. J’aime beaucoup une remarque souvent évoquée à propos de l’Eucharistie. Nous croyons que c’est nous qui assimilons ce pain de vie, mais en fait, c’est lui qui nous transforme en Lui.

Ô bon Pasteur, notre vrai pain,
ô Jésus, aie pitié de nous,
nourris-nous et protège-nous,
fais-nous voir les biens éternels
     dans la terre des vivants.

 

Toi qui sais tout et qui peux tout,
toi qui sur terre nous nourris,
conduis-nous au banquet du ciel
et donne-nous ton héritage,
     en compagnie de tes saints. Amen.