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dimanche 25 juin 2023

Les moineaux et les cheveux... (et le vélo)




25 juin 2023 - 12ème dimanche du Temps Ordinaire — Année A
Lectures de la messe
Première lecture « Il a délivré le malheureux de la main des méchants » Jr 20, 10-13
Psaume Dans ton grand amour, Dieu, réponds-moi. Ps 68 (69), 8-10, 14...
Deuxième lecture « Le don gratuit de Dieu et la faute n’ont pas la même mesure » Rm 5, 12-15
Évangile « Ne craignez pas ceux qui tuent le corps »

Intro

Chers Frères et Sœurs,
Bonjour à tous et à toutes. Je suis heureux de pouvoir vous retrouver aujourd’hui. Il y a eu tant de demandes que malheureusement j’ai eu l’occasion de célébrer dans notre église durant cette année pastorale. Je suis aussi content de le faire aujourd’hui parce que Saint Imier en est le patron. Pour le 23 juin j’ai eu droit à Saint Ursanne et à Saint Marcel… avec Germain et Randoald. Comme Moutier va bientôt nous rejoindre les 2 martyrs seront totalement chez eux. A Develier nous représenterons un peu le Sud. Ca pourrait être assez long. On peut y penser avec le sourire.
Aujourd’hui le slow up nous oblige à nous déplacer à pied sinon en vélo, nous demanderons au Seigneur de protéger tous ceux qui se déplacent. S’il vous plaît soyez prudents si vous allez en vacances et même habituellement, il y a tant de circulation aux abords des grandes villes et de manière très personnelles de conduire que cela est parfois inquiétant. 
Le Seigneur en ce 12e dimanche du temps ordinaire nous dit que tous nos cheveux sont comptés, mais il ne précise pas qu’il ne nous les conserve pas nécessairement en place. Ce que les plus jeunes vérifieront plus tard. Il nous demande de lui faire confiance pour toute notre vie, car c’est lui qui nous la rendra au dernier jour. Il nous demande de lui faire confiance jusqu’à l’audace du don de soi. 
Préparons-nous à célébrer le mystère de l’Eucharistie en reconnaissant que nous sommes pécheurs.

Homélie

Chers frères et sœurs,

Nous associerions bien volontiers cette journée à une sorte de préparation des vacances et pourtant, le contenu des lectures provoque dans nos esprits quelques éléments d’inquiétude. Les traductions sont délicates, les mots épouvante de tous côtés avec une majuscule se réfèrent au début du chapitre 20 de Jérémie au nouveau que celui-ci a donné au prêtre du responsable du sanctuaire qui l’a fait attacher au pilori. Ton nom ne sera plus Paschehour, qui signifie Liberté, mais l’épouvante de tous côtés. C’est devenu en quelque sorte le sobriquet de Jérémie le prophète de malheur.

L’invasion de Babylone est annoncée, mais le Seigneur, un guerrier redoutable est là qui se tient à côté de lui pour qu’il donne son témoignage. Guerrier redoutable, cela fait penser à cette affreuse guerre proche de nous.

Dans l’Évangile, le Seigneur encourage ses disciples à porter leur témoignage. Cela signifie, qu’ils ne s’exprimeront pas en position de force.

Tout est disproportionné et à l’envers du bon sens avec le Seigneur. Les mots sont durs à entendre : Epouvante de tous côtés, trahison des amis qui guettent les faux pas et veulent prendre leur revanche, on parle de persécuteurs, de guerrier, de défaite, de don de sa vie, de la mort du corps, de risque d’être renié par Dieu même. Nous aimerions dire pitié Seigneur, n’en jette plus.

Mais voilà qu’il nous annonce la victoire et sa fidélité. Le combat fondamental est celui de la réconciliation et de la paix avec le Dieu. Vous me concéderez qu’il est bien particulier. Habituellement lors d’une bataille, les chefs aujourd’hui restent en arrière, dirigent, coordonnent et observent. Ce sont les soldats qui combattent. Au service militaire, j’en ai fait très peu, je faisais les comptes pour les soldats, blessés, pansements, et autres, mais j’en ai tout de même retenu cet élément.

Ici, dans cette mystérieuse bataille, le Seigneur la livre en premier, il meurt mais ressuscite et nous dit d’avoir confiance en lui et de faire comme lui, parce qu’il est avec nous, sans cesse.

« Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le en pleine lumière ; ce que vous entendez au creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits. »

Quel est ce message sinon, celui-ci : «  Combien plus la grâce de Dieu s’est-elle répandue en abondance sur la multitude, cette grâce qui est donnée en un seul homme, Jésus Christ. » Il a remporté la victoire sur son seul ennemi qui est la mort. Il nous demande de regarder la nature et la puissance de Dieu qui s’y exprime jusque dans les détails. Deux moineaux sont vendus pour un sou et Dieu les connaît tous. Peut-être le Seigneur fait-il aussi au psaume 123 : « 07 Comme un oiseau, nous avons échappé au filet du chasseur ; * le filet s'est rompu : nous avons échappé. »  « Notre âme, comme le passereau, a été arrachée au filet des oiseleurs. Le filet a été déchiqueté, et nous, nous avons été délivrés. Notre secours est dans le nom du Seigneur qui a fait le ciel et la terre. » Comme nous sommes un peu en vacances, vous me permettez 2 anecdotes. Ils ont leur charme les moineaux sur les toits. Quand j’étais enfant dans le Jura Sud, nous croyons que c’étaient les seuls oiseaux, tellement ils faisaient de bruit en paillant sur le toit, le matin. Une sorte de réveille-matin. J’avais vu un article en son temps à propos de ce qu’on appelle la campagne des quatre nuisibles en Chine. On voulait supprimer les moineaux en les empêchant de se poser lorsqu’ils volaient, jusqu’à ce qu’on s’aperçoive qu’ils mangeaient des céréales, mais surtout beaucoup d’insectes… Il nous faut protéger la nature c’est une leçon. Mais celle du Seigneur en est une autre en dépit de la rudesse de la conclusion. « Vie et joie, à vous qui cherchez Dieu ! » Car le Seigneur écoute les humbles, il n’oublie pas les siens emprisonnés. Les moineaux comme notre âme échappe au filet de l’oiseleur.

Les chemins du Seigneur sont difficiles à comprendre et bien souvent nous avons peur de ce qui va nous arriver. L’argument que nous donne le Seigneur sur la grandeur et la toute-puissance de Dieu est cependant une indication précieuse. Nous ne voyons pas simplement les moineaux aujourd’hui, mais les mystères de la création, ce qui est infiniment grand et infiniment petit, on nous dit même que la matière a un comportement ondulatoire. On compte approximativement les galaxies et les étoiles, la durée de l’univers, son commencement et sa fin. Celui qui est derrière tout cela nous connaît mieux que nous-mêmes. Il nous demande cependant notre foi en lui, et il nous confie un message : Lui, Dieu est amour et veut que tous les hommes soient sauvés et il veut qu’aucun ne se perde. Pour arriver à cette confiance, nous avons les promesses du Seigneur, mais aussi l’exemple des saints. L’Eglise nous a donné en exemple notamment sainte Edith Stein co-patronne de l’Europe le témoignage de cette philosophe venue au Christ et au Carmel depuis le Judaïsme est extraordinaire, jusqu’à sa mort en camp de concentration. Il en va aussi ainsi d’une autre figure, Etty Hillesum. 

Nous n’allons pas faire plus long aujourd’hui. Prions aussi Notre-Dame avec Benoît XVI : La Femme de l’Apocalypse qui est Marie, qui est l’Eglise, apparaît sans défense, vulnérable. Et véritablement, Dieu est vulnérable dans le monde, parce qu’il est l’Amour et que l’amour est vulnérable. Et toutefois, c’est Lui qui a l’avenir entre ses mains: c’est l’amour qui l’emporte et non la haine, c’est en définitive la paix qui l’emporte. Prions Marie, la Reine de la Paix, disait-il, pour qu’elle aide à la victoire de la paix, aujourd’hui : « Reine de la Paix, prie pour nous ». Amen !

dimanche 18 juin 2023

« Vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte »

 


18 juin 2023 11ème dimanche du Temps Ordinaire — Année A

Lectures de la messe

Première lecture « Vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte » Ex 19, 2-6a 
Psaume Il nous a faits, et nous sommes à lui,     nous, son peuple, son troupeau. Ps 99 (100), 1-2, 3,... 
Deuxième lecture « Si nous avons été réconciliés par la mort du Fils, à plus forte rai... Rm 5, 6-11    Évangile « Jésus appela ses douze disciples et les envoya en mission » Mt 9, 36 – 10, 8

Introduction

Chers frères et sœurs, bienvenue à tous et à toutes et merci à nos sœurs carmélites qui nous accueillent ce matin.
Nous célébrons en ce 18 juin le 11ème dimanche du temps ordinaire. La moisson est abondante et les ouvriers sont peu nombreux nous dit Jésus dans l’Évangile. Comment répondre à son appel ? par un engagement direct dans nos communautés et nos familles, mais aussi par notre cœur, en le laissant nous rejoindre. « Vous, vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte. »
Le calendrier liturgique de la Suisse Romande mentionne que c’est aujourd’hui la journée du réfugié. Nous prenons dans notre prière, ceux qui ont du tout quitter en raison de la guerre et aussi poussés par l’espoir d’une vie meilleure. Quelle Bonne Nouvelle avons-nous à proposer ?
Nous allons également prier pour la personne décédée hier soir dans le tunnel de l'A-16 entre Saint-Ursanne et Courgenay, ainsi que pour les familles. Nous ne sommes jamais à l'abri d'impondérables, de distractions ou d'incidents techniques. Mais à la veille des vacances, que cela soit au moins une triste invitation à modérer notre manière de conduire et à la prudence.

Homélie

Chers Frères et Sœurs,

Nous voilà quasiment à la veille de vacances, un temps de pause liturgique, de retour au temps vraiment ordinaire. Le Sacré-cœur de Jésus est passé ainsi que le cœur immaculé de Marie hier. C’est une période d’apaisement même s’il fat clore des dossiers. Les étudiants regardent désespérément le ciel bleu et pensent à leurs sorties, alors qu’il faut se concentrer. Le calme apparaît tout de même dans les courses d’écoles et les virées collectives des anciens. Bientôt vraiment du calme, et du temps pour partir à l’étranger pour le soleil et de tranquillité, avec cette particularité que tout le monde va presque partir s’agglomérer sur divers bords de mer et un peu  à la montagne, à la même date. Parmi les questions fleuves fondamentales, est-ce que j’ai bien la dernière version du GPS, une connexion wifi qui fonctionne, etc…

Dans l’Évangile, le Seigneur choisit des Apôtres pour les envoyer vers les brebis perdues de la maison d’Israël, pour leur apporter la Bonne Nouvelle, avec peu de choses à disposition. Il est ému en voyant ceux qui viennent à lui, comme des brebis sans bergers.

Dans la première lecture, nous participons à la migration des fils d’Israël dans le désert. Ils y établissent un camp, mais ils n’étaient certes pas en vacances. Lors de cette rencontre, le Seigneur va leur rappeler par la bouche de Moïse les grands moments de l’action de Dieu qui les a libérés des Égyptiens et de leur condition d’esclavage. Ce n’étaient pas de très beaux reportages comme on en voit aujourd’hui sur de très grands écrans et au frais. Le Seigneur fait d’eux son domaine particulier parmi tous les peuples : « vous, vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte. » Il leur donne une charte de promesses et de devoirs.

Peut-on être saints pour soi tout seul et un royaume de prêtres à l’exclusion de tous les autres. Le but d’un sacerdoce quel qu’il soit  est d’assuré une médiation. Le but est de permettre une rencontre, pour faire de tous les hommes un peuple qui loue le Seigneur. Le Seigneur se révèle à Moïse, pour qu’il donne clairement à ce peuple issu d’Abraham, la méthode pour remplir sa mission.

Jésus paraît donc constater une forme d’échec dans la mission transmise par Moïse et par le mode d’annonce de ceux qui en étaient chargés, prêtres de Jérusalem, scribes et pharisiens. Son sentiment est celui d’une profonde compassion devant ces brebis sans bergers. Il en envoie de nouveaux, ses apôtres pour une mission intérieure. Elle va aussi aboutir à un échec, devant ce mur d’opposition d’autorités religieuses. Dieu respecte de manière étonnante ses représentants jusqu’aux schismes, mais en les maintenant dans leur acquis. L’élection des Apôtres demeure pour porter aux nations, la Bonne Nouvelle de l’Évangile après la Pentecôte.

Le drame que vivent certains réfugiés ces dernières années et celui de la semaine passée nous incitent à nous rappeler globalement, que le Message de Jésus a été transmis par des disciples qui se sont exilés ou l’ont été. De chez soi, on ne part pas joyeusement, les rencontres ne sont pas nécessairement bonnes et les risques sont grands.

Le défunt pape Benoît commentait notre évangile en relevant l'amour du Christ pour son peuple, en particulier pour les petits et les pauvres. La compassion chrétienne n'a rien à voir avec le piétisme, avec l'assistentialisme. Elle est plutôt un synonyme de solidarité et de partage, et elle est animée par l'espérance. Quelle est notre espérance, comment se traduit-elle ?

Quel est le message qui doit être transmis ? Il est simple, Saint Paul nous l’a rappelé tout à l’heure, « Dieu nous Aime ». Nous avons malheureusement un réflexe d’appropriation, nous créons nos propres enclos où nous transformons celui qui nous aime en idole. Or, il nous aime à un tel point qu’il a donné sa vie pour nous :     « alors que nous n’étions encore capables de rien, le Christ, au temps fixé par Dieu, est mort pour les impies que nous étions. » Il nous a réconcilié avec son Père et nous serons sauvés en ayant part à sa vie. Il nous donne la faculté de participer à la vie même de Dieu. « Vous serez pour moi un royaume de prêtres, une nation sainte »… Qu’est-ce que cela veut dire, sinon que nous sommes appelés à transmettre l’amour de Dieu autour de nous et dire que notre vie a un sens. Dieu peut dilater notre cœur aux dimensions du sien. Personne ne doute que cela soit difficile, il suffit de regarder la croix de Jésus. Nous ne sommes pas des monuments historiques… Ceux que nous voyons dans les villes finissent par se désagréger, y compris les églises. Aimer c’est un investissement en Dieu, il serait bien de nous le rappeler. Avec le temps, nous percevons de mieux en mieux que notre calendrier de vie a de moins en moins de feuillet, il est encore temps de fixer ses priorités.

Nous pouvons porter le monde à Dieu dans notre cœur, si nous n’avons plus que lui après avoir tout donné. N’est-ce pas cela être un peuple sacerdotal et saint, un peuple missionnaire. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus voulait être le cœur de l’Église, son intuition est célèbre. Comme il faut des Apôtres et des priants, mes sœurs me permettront une anecdote. Cette semaine, j’ai vu par hasard qu’aujourd’hui était l’anniversaire d’un appel fameux au début de la 2ème guerre mondiale, celui du 18 juin depuis Londres. L’illustre général en exil avait eu alors pour secrétaire là-bas, une certaine Élisabeth de Miribel qui le tapa à la machine à écrire. La pauvre avait de la peine à le faire à cette époque sans ordinateurs et dictées automatiques. Après un temps au Carmel, elle écrira plus tard une vie de sainte Édith Stein. Le hasard m’a permis de parvenir  à en trouver une citation. Une de ses élèves raconte : « Elle ne nous parlait guère de religion. Pourtant nous sentions qu’elle vivait sa foi. En la voyant prier à la chapelle, il nous semblait toucher au mystère de Dieu présent dans une âme. […] Nous devinions en elle quelque chose de très rare : la totale harmonie entre l’enseignement et la vie personnelle… » Le soutien de la prière est indispensable au ministère, mais aussi une vie de communion avec le Seigneur. Ne pas vouloir passer pour saint avant de l’être dit saint Benoît.

Mettons notre fierté en Dieu par notre Seigneur Jésus Christ.

Il est bon aujourd’hui de prier Marie pour que s’éteignent les causes de tant de souffrances qui provoquent l’exil en Ukraine et en Afrique :

Reçois , ô Mère, notre supplique.
Toi, étoile de la mer, ne nous laisse pas sombrer dans la tempête de la guerre.
Toi, arche de la nouvelle alliance, inspire des projets et des voies de réconciliation. Toi, “terre du Ciel”, ramène la concorde de Dieu dans le monde.
Éteins la haine, apaise la vengeance, enseigne-nous le pardon. Amen.


jeudi 8 juin 2023

Solennité du Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Seigneur.

 


Miracle de Favernay

Solennité du Saint-Sacrement du Corps et du Sang du Seigneur.

Lectures de la messe

  • Première lecture « Dieu t’a donné cette nourriture que ni toi ni tes pères n’aviez conn... Dt 8, 2-3.14b-16a
  • Psaume Glorifie le Seigneur, Jérusalem ! Ps 147 (147 B), 12-1...
  • Deuxième lecture « Puisqu’il y a un seul pain, la multitude que nous sommes est un seul... 1 Co 10, 16-17
  • Séquence
  • Évangile « Ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson » Jn 6, 51-58


Introduction

Chers Frères et sœurs, bonjour et bienvenue à chacun et à chacune, pour célébrer cette solennité du Saint Sacrement du corps et du sang du Christ.  L’Eucharistie est un mystère dont nous avons la plus grande difficulté à percevoir clairement ne serait-ce que le commencement de la profondeur. Il se découvre tout au long de notre vie. Avec la réflexion nous pouvons envisager que Dieu soit un pur esprit, mais le concevoir comme un homme de chair et de sang, avec une âme, cela dépasse notre entendement. Nous entrons dans une sorte d’obscurité. C’est encore plus difficile lorsqu’il se rend présent sous les apparences du pain et du vin.

Nos sœurs du Carmel, ainsi que nous l’avait dit Mgr Denis en la fête de Marie mère de l’Église, nous avait mis en valeur le fait que nos sœurs du Carmel ont fréquemment tout un programme spirituel et théologique dans les noms qu’elles choisissent et reçoivent. On le retrouve facilement en cherchant un peu. Nous avons par exemple une bienheureuse Marie-Candide de l’Eucharistie, béatifiée en 2004, Sœur Marie de l’Eucharistie une nièce de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, la prieure du Carmel du Pater à Jérusalem porte le nom de Sœur Agathe Marie de l’Eucharistie. 

Nous aurons une pensée pour le pape François dont l’opération des intestins s’est bien déroulée hier. Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et ses parents dont le pape a vénéré hier encore les reliques présentes sur la place Saint-Pierre, l’ont certainement aidé. Il a rappelé le rôle et la passion de Thérèse pour l’évangélisation.

Mais rappelons-nous que Jésus d’abord est réellement présent au centre de nos vies et nous accompagne sur nos chemins à travers le désert.


Homélie

Chers Frères et Sœurs,

La séquence « Ecce panis angelorum » Voici le pain des anges que nous entendons avant l’Évangile lors de cette fête du Saint-Sacrement a pour origine saint Thomas d’Aquin et le pape Urbain IV, au 13ème siècle. La tradition rapporte qu’un miracle était survenu à Orvieto après qu’un prêtre ait douté de la présence du Christ dans l’Eucharistie. Le sacrement de l’ordre ne nous rend pas parfaits.

« Le voici, le pain des anges, il est le pain de l’homme en route, le vrai pain des enfants de Dieu, qu’on ne peut jeter aux chiens. » L’expression pain des anges, doit plutôt être entendue comme la manne donnée par les anges aux Hébreux dans le désert (art. du Père J-B Frey sur l’angélologie Juive). Il est vrai qu’ils sont nourris aussi et perpétuellement par la vision de Dieu, eux qui sont de purs esprits. Nous-mêmes, dans l’éternité, nous n’aurons plus besoin de la médiation du sacrement de l’ordre dans l’éternité. Notre croissance sera achevée et nous verrons Dieu de nos yeux de chair.

C’est au passage du Deutéronome, que nous avons lu tout à l’heure, que fait allusion le Seigneur. Il n’est pas là d’abord comme un don  statique, une adoration immobile, si vous me permettez, mais bien d’une nourriture sur le chemin, pour grandir jusqu’à la vie éternelle. « Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. » Même Thérèse voulait passer son ciel à faire du bien, elle voulait être active. Mais l’adoration est importante, et les anges voient sans cesse la face de Dieu, adorent et remplissent des missions.

Le pain et le vin avaient un rôle important dans la liturgie du temple, et aussi dans les liturgies familiales juives. en particulier celles de la Pâque. Le lien entre le sacrifice de la Pâque et l’institution de l’Eucharistie sont incontestables. Lors des sacrifices le fait de consommer une partie de l’offrande manifestait un lien entre ceux qui le faisaient et le Seigneur. Le sacrifice personnel du Seigneur est rendu présent dans la célébration Eucharistique. Il se rend présent au milieu de nous. Présent, il va aussi l’être à chacun de ceux qui le reçoivent et il entre en communion avec eux. Il nous transforme.

Que Dieu devienne homme, et que Jésus se soit déclaré Fils de Dieu, cela a été le grand scandale de ceux qui l’ont entendu. Lorsque le Seigneur a dit que celui qui ne mange pas son corps et ne boit pas son sang, n’aura pas la vie en lui, cela a du être une cause de scandale. C’était insupportable, pour ceux qui l’entendaient. Le sang a une symbolique extrêmement forte, il représente, il est la vie de la personne. Nous nous rendons un peu compte du pas intérieur qu’ont eût à franchir les Apôtres et les premiers disciples pour faire de l’Eucharistie non seulement un signe de ralliement, mais le moment principal de leurs rencontres. Jésus est parti auprès de son Père, mais se rend réellement présent, chaque jour, à chaque eucharistie, dans son Église. Il le fait pour nous aider à avancer, à marcher. 

La première épître aux Corinthiens est pour nous un précieux témoignage de ce que faisaient les communautés et saint Paul lui-même dans celles qu’il avait fondées. Une datation de son épitre remonte à 55 environ. C’est un témoignage précieux.

Quelqu’un m’a demandé hier, par hasard, ce que disait saint Augustin aux catéchumènes plus de 300 ans après saint Paul, dans son catéchisme. Je vous le partage : « Le Seigneur donne à tous les êtres les aliments et le breuvage; il est le pain des esprits et la source où ils viennent se désaltérer. Et cependant, il s’est condamné à la faim comme à la soif. Il a supporté les fatigues du voyage, et c’est lui qui s’est fait notre voie pour nous conduire au ciel ; il a mis fin à nos tourments, et il a enduré celui de la croix; enfin il a ressuscité les morts. » 

Et ailleurs dans un sermon : « Ce pain donc que vous voyez sur l'autel, une fois sanctifié par la parole de Dieu, est le corps du Christ. Ce calice, ou plutôt ce que contient ce calice, une fois sanctifié aussi par la parole de Dieu, est le sang du Christ; et le Christ Notre-Seigneur a voulu par là proposer à notre vénération son propre corps et ce sang qu'il a répandu en notre faveur pour la rémission des péchés. » 

Le Seigneur doit être vénéré et adoré dans son Eucharistie, nous avons la chance de pouvoir venir l’y adorer. Mais n’oublions pas qu’il se fait pour nous pain et nourriture de notre voyage vers Lui, pour le moment, jusqu’au jour où il sera tout en nous et tout en tous. Il n’y aura alors plus besoin de prêtres. Il nous aide à accomplir notre chemin vers lui, mais aussi vers les autres. 

Selon le pape François, Pierre a du lui aussi accomplir tout un chemin pour reconnaitre que le centre n’est pas son Jésus, celui qu’il se représentait, mais le vrai Jésus. Il tombera encore, mais de pardon en pardon, il reconnaîtra toujours mieux le visage de Dieu. Et il passera d’une admiration stérile du Christ qui est en fait une sorte d’admiration et d’adoration de soi-même et de ses représentations à l’imitation concrète du Christ. L’Eucharistie doit nous aider à rencontrer l’autre en vérité et en croissance, avec des hauts et des bas.

Il est le pain rompu pour donner la joie au monde et pour notre joie. 

Depuis le 19ème siècle, inspiré par le miracle eucharistique de Faverney se déroulent des congrès eucharistiques, régionaux et pour l’Église universelle. Je vous rappelle pour mémoire que celui qui a eu lieu en  2021 en Hongrie a eu pour thème : «En toi, toutes nos sources !» (Ps 87, 7), et que le prochain, le 53ème , aura lieu en 2024 à Quilto en Equateur. "La fraternité pour guérir le monde". "Vous êtes tous frères" (Mt 23,8).

Je vous ai mentionné tout à l’heure le nom d’une bienheureuse carmélite, Marie-Candide de l'Eucharistie. J’ai vu dans ses éléments de biographie, qu’elle était en admiration devant l’obéissance de Jésus jusque dans l’Eucharistie. C’est vrai qu’il se fait très dépendant de nous, d’abord du prêtre qui aurait bien besoin de vivre en accord avec ce qu’il célèbre, mais aussi de nous tous qui le recevons et le rencontrons lorsqu’il est au tabernacle ou exposé… Nous sommes toujours émus et dans l’admiration devant une maman qui s’occupe en particulier d’un bébé complètement dépendant. Ne devrions-nous pas avoir un respect et amour analogue pour l’Eucharistie ? Il se fait petit et dépendant dans la petite hostie. Respectons-nous aussi le Christ dans notre voisin ?

Concluons avec Marie dans l’Église naît de l’Eucharistie : « Si le Magnificat exprime la spiritualité de Marie, disait saint Jean-Paul II, rien ne nous aide à vivre le mystère eucharistique autant que cette spiritualité. L'Eucharistie nous est donnée pour que notre vie, comme celle de Marie, soit tout entière un Magnificat! » Amen !) 


dimanche 4 juin 2023

Trinité trois fois sainte

 


4 juin 2023 - Sainte Trinité — Année A - Solennité 

 Lectures de la messe

Première lecture « Le Seigneur, le Seigneur, Dieu tendre et miséricordieux » Ex 34, 4b-6.8-9

Cantique À toi, louange et gloire éternellement ! Dn 3, 52, 53, 54, 55...

 Deuxième lecture « La grâce de Jésus Christ, l’amour de Dieu et la communion du Saint-E... 2 Co 13, 11-13

 Évangile « Dieu a envoyé son Fils, pour que, par lui, le monde soit sauvé »

Mes sœurs, chers frères et sœurs,

J’aime beaucoup me remémorer en la solennité de la Sainte Trinité, de la Très très très sainte Trinité, la visite Apostolique de saint Jean-Paul II à Sion le 17 juin 1984 et la célébration eucharistique avec les ordinations sacerdotales.  J’étais postulant à l’époque, encore chevelu et pas encore trentenaire… Saint Jean-Paul II, qui ne l’était pas encore, avait placé le Mont-Blanc en Suisse, et ça m’est resté. 

Il avait commencé son homélie en faisant référence à ce cadre majestueux alpins et au don de la loi à Moïse. La Pentecôte cadre aussi avec cette lecture, puisqu’elle est, cinquante jour après Pâques la fête du don de la Loi au Peuple, Juif. L’Esprit vient la graver dans les cœurs, en y imprimant le sceau vivant du Christ et ouvre la porte de l’union à la Trinité. 

“Elevons notre cœur!”, avait dit le Saint Pape, «  Aujourd’hui le cœur de l’Eglise réagit avec une ferveur particulière à cette invitation qui introduit chaque prière eucharistique. Aujourd’hui nous répondons avec une intensité de foi toute spéciale: “Nous le tournons vers le Seigneur!”. » Aujourd’hui nous contemplons dans la foi, le mystère insondable de Dieu, l’Etre au-delà de tout ce que nous pouvons concevoir, plus grand que ce qui monte au cœur de l’homme. “Le Père n’a été fait par personne, il n’est ni créé, ni engendré; le Fils vient du Père seul, il n’est ni fait, ni créé, ni engendré; l’Esprit Saint vient du Père et du Fils, il n’est ni fait, ni créé, ni engendré, mais il procède d’eux”. (Saint Athanase).

En Suisse nous devrions être presque des spécialistes de la contemplation de la Trinité, avec également Nicolas de Flüe, ses visions et son célèbre tableau de méditation. Nous avons aussi l’aide du trèfle à trois feuilles des irlandais. 

Un jour nous verrons Dieu tel qu’il est et entrerons dans le partage et la communion à son mystère. Les barbarismes théologiques, tels que circumincession et périchorèse,  essayent d’approcher  de cette vie d’un Dieu en trois personnes.

Nous sommes désarmés pour approcher de cette connaissance d’un Dieu qui paraît si lointain et même impossible à comprendre. Il est si différent de nous. Pourtant dit l’Évangile, « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne se perde pas, mais obtienne la vie éternelle. Dieu a envoyé son Fils dans le monde ». Dieu a donné une mission à son Fils, et non seulement à lui, mais à l’Esprit-Saint, c’est ce qu’on appelle les missions de deux des personnes divines. En Dieu, le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont trois Personnes, mais partagent le même et unique être et non pas seulement la même nature divine. Une seule substance, trois Personnes. C’est impossible pour tous les êtres vivants autres que Dieu, mais en Dieu, il en est ainsi.

L’intuition devrait nous conduire à nous interroger, comme les enfants avec leurs pourquoi. Pourquoi Dieu a-t-il envoyé son Fils avec une vraie âme humaine et un vrai corps parmi nous, s’il n’y avait pas de moyens de communication entre ce corps et ce mystérieux Dieu en trois personnes ? Les théologiens nous disent qu’il y a une analogie entre nous et la Sainte Trinité, par notre mode de connaissance. Nous avons une mémoire qui représente le Père, une intelligence, une sagesse qui est une image du Fils et une volonté ou un amour, qui manifeste l’Esprit-Saint. 

En Jésus, Dieu est là. Nous n’avons pas affaire à un pur esprit inatteignable et lointain. Avec nos modestes mots et notre réflexion, nous pourrions nous demander, mais à quoi sert-il d’avoir un corps, si nous sommes tous embêtés lorsqu’il est touché par la maladie, une infirmité ou une blessure, de la tristesse. Quel poids parfois ! Serions-nous le résultat d’un mystérieux égarement de Dieu qui aurait oublié quelques parties de lui-même à quelques milliards d’exemplaires et de reprises et qu’il attendrait de récupérer. Est-il vraiment raisonnable de penser et de conclure, qu’il est tellement lointain qu’il en est inatteignable. Les questions sont innombrables sur ces sujets, et dans nos limites et notre pénombre matérielle, nous y répondons par des mythes, des hypothèses ou des avis péremptoires. Lorsqu’on lit quelques articles récents sur les neuro-sciences et les fonctionnements mystérieux de notre cerveau on s’interroge. Ne sommes-nous que matière, énergies et réseaux cellulaires plus ou moins bien câblés ? Nous recherchons un sens à nous-mêmes, à ce que nous vivons.

N'est-ce pas dans le Christ vrai Homme et vrai Dieu, que nous avons la meilleure réponse ? Il nous ouvre à une dimension qui dépasse infiniment ce que nous percevons par nos sens, tout en assumant notre chair, notre corps. Non, ce que nous vivons n’est pas inutile, et la réponse à nos pourquoi se trouve dans le Christ né, mort et ressuscité qui accomplit sa mission. Il est le Verbe incarné et le Rédempteur de l’homme, qui est mort, qui est ressuscité et glorieux. Il est la porte qui nous conduit vers le Père, par le souffle de l’Esprit, ce deuxième missionnaire.

Hier nous fêtions les martyrs de l’Ouganda, ces 35 jeunes qui ont été torturés et martyrisés parce qu’il croyaient en Jésus.  Ils n’étaient pas de la même culture que lui et que ceux qui leur ont annoncé l’Évangile, parfois avec des préjugés qui nous interpellent. Le Seigneur né dans la culture de son Peuple, a voulu passer par ces missionnaires du 19ème siècle. Il veut passer par nous, aujourd’hui avec nos limites, parce qu’il veut nous conduire à la vie éternelle et à la contemplation de la Trinité, dans cette circulation d’amour qui nous est encore incompréhensible. Dieu aime sa création et veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à partager sa vie. Nous ne pouvons commencer que par nous aimer nous-mêmes, grâce au premier amour de nos parents, pour parvenir à l’aimer lui, lui qui nous tend la main en son Fils. Certains aiment le chiffre 4 dans la symbolique, et bien disons que la Trinité nous invite personnellement d’abord à une rencontre à quatre. L’Esprit nous conduit. J’aime beaucoup un passage de saint Basile qui nous parle de la danse avec les anges. Nous marchons sur beaucoup de pieds aujourd’hui, il doit nous rendre plus légers, plus souples et attentifs. Mais d’abord, il veut ouvrir l’oreille de notre cœur. « Il veut que je loge chez toi » nous rapportait sainte Elisabeth de la Trinité, dans sa dernière retraite. C’est mon Maître qui m’exprime ce désir ! Mon Maître qui veut habiter en moi, avec le Père et son Esprit d’amour, pour que, selon l’expression du disciple bien-aimé, j’aie société avec Eux. » Sainte Marie, Mère de Dieu, Mère de l’Eglise, du cœur de la Trinité trois fois sainte, prie pour nous, pécheurs. Amen.