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dimanche 6 octobre 2019

Si vous aviez la foi


6 OCTOBRE 2019

dimanche, 27ème Semaine du Temps Ordinaire — Année C - de la Férie
Première lecture« Le juste vivra par sa fidélité »Ha 1, 2-3 ; 2, 2-4
Psaume Aujourd’hui, ne fermez pas votre cœur, mais écoutez la voix du Seigneur ! Ps 94 (95), 1-2, 6-7...
Deuxième lecture« N’aie pas honte de rendre témoignage à notre Seigneur »2 Tm 1, 6-8.13-14
Évangile« Si vous aviez de la foi ! »Lc 17, 5-10


Mes chères sœurs, chers frères et sœurs,

« Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : ‘Déracine-toi et va te planter dans la mer’, et il vous aurait obéi. »
Comment avons-nous réagi ou réagissons-nous en entendant ce passage d’Évangile ? A l’heure de l’ouverture du synode sur l’Amazonie, alors que le Pape a planté un arbre dans les jardins du Vatican avec des indiens, et où nous forêts souffrent de la sécheresse, l’image est plus délicate à manier. Les amateurs d’Astérix et d’Obélix qui restent toujours jeunes se souviennent du vol gracieux de chênes bretons allant se planter sur le navire de quelques pirates égarés. Il est vrai que ces opérations se réduisent beaucoup dans les derniers albums.
En ces temps où l’accent est mis sur l’écologie, vous me permettez un peu de botanique biblique. Que nous dit le texte dans le grec ? Le Seigneur fait référence d’abord au grain de moutarde, que nous retrouvons dans une autre parabole. La deuxième plante, le grand arbre, est plus spécifiquement un mûrier, et même un mûrier noir dont on utilisait le fruit pour faire des confitures. Il paraît qu’on en donnait aussi aux éléphants, mêlé à du vin pour les stimuler au combat…. Cet arbre est mentionné au moins à deux reprises dans la Bible.
Dans le même ordre d’images utilisées par le Seigneur, saint Marc en a une encore plus forte en parlant d’une montagne qui se jette dans la mer avec un peu de foi Mc 11,24. L’apocalypse mentionne une montagne de feu précipitée dans la mer (Apoc 8,8).
Pour en venir au symbole, la Bible de Jérusalem à la suite des pères, nous dit que le mûrier est le signe du péché. La foi peut déraciner cette espèce sauvage, solide, aux fruits noirs comme les ténèbres, et aux épines tordues pour l’envoyer dans la mer. Il s’agit de l’interprétation de S. Jean Chrysostome.
Les images sont utilisées diversement. Saint Augustin y voit l’Evangile de la Croix de Notre-Seigneur, le bois où ses blessures sont comme autant de fruits, empourprés de son sang, qui doivent nourrir les nations et qui sera déraciné pour être transféré à toutes les nations. Nous pourrions pousser l’image et dire qu’il devient le mat du bateau de l’Église.
Vous voyez que les voies qui mènent à la connaissance du Seigneur sont variées et diverses.
Quittons les sentiers botaniques pour les chemins de la foi.
La foi on en parle tant et on en a tant parlé. Nous pouvons nous interroger sur la vigueur de l’interpellation du Seigneur. Saint Luc avait commencé par citer la parabole du pauvre Lazare et du mauvais riche, où le Seigneur avait conclu en disant que même si quelqu’un ressuscitait d’entre les morts, ceux dont le cœur est endurci ne croiraient pas. Le signe de cette disponibilité était dans l’écoute de la Loi et des prophètes. Des oreilles et des cœurs réceptifs à la parole de Dieu, il y en eût beaucoup parmi les nations païennes. Alors que nous sommes en pleine mutation de civilisation, cette disponibilité est présente, là où est recherchée la vérité et le bien. Mais la foi elle-même est un don de l’Esprit, elle dépasse le simple raisonnement. On parle d’adhésion ferme au donné révélé. Cela se produit à un moment pour l’un, à un autre moment pour un autre…
Et puis, d’une certaine manière elle est monnayée, elle devient active. Le Seigneur prend l’exemple du service et de notre indispensable attitude de serviteur. Il est devenu le premier Serviteur, le Serviteur souffrant. Tout ce que nous pouvons accomplir de bien provient de lui… Nous ne sommes pas des propriétaires des dons et des bienfaits de Dieu. Ce que nous réalisons de bien est en fait, une conséquence de l’action de Dieu en nous. Une petite phrase de l’encyclique la Lumière de la foi nous dit que : « Le croyant apprend à se voir lui-même à partir de la foi qu’il professe. La figure du Christ est le miroir où se découvre sa propre image réalisée. » L’orgueil consisterait à placer la meilleure photo de nous-mêmes à l’époque la plus brillante, de la coller sur le miroir, de se contempler soi-même et de nous dire : « Mon Dieu, comme tu es beau. » En fait : « Comme je suis belle ou beau en ce miroir. » Nous sommes serviteurs, il est vital de nous remettre en question pour que le bon pasteur puisse continuer à nous faire grandir, que son arbre soit projeté et planté encore plus loin. Le navire de la Sainte Église, avec la croix de Jésus comme mât, doit naviguer jusqu’au bout du monde. ‘Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le temps que je mange et boive. Ensuite tu mangeras et boiras à ton tour’ ? » Il se nourrit du fruit des arbres qu’il rencontre sur le chemin. Il a faim sur ce chemin ! Il boit à la cruche de la Samaritaine… Il crie sur la croix : « J’ai soif ! » Saint Augustin explique que « Le Seigneur doit faire sa nourriture et son breuvage de la confession et de la foi des nations, et cette nourriture lui est présentée par ses serviteurs, par les prédicateurs de la foi. » Cela nous y sommes tous appelés de par notre baptême, selon notre charisme propre.
Des chemins de la foi passons à l’autoroute de l’amour un des thèmes préférés du Carmel. Je l’ai retrouvé dans le sermon de Mgr Aupetit à la messe des funérailles de M. Chirac.  Il a cité Saint Jean de la Croix : « Au Ciel nous serons jugés sur l’amour ». C’est le meilleur véhicule pour transporter le Christ… Notre-Dame de la Route, des sentiers, des chemins et de l'autoroute de la Charité, Priez pour nous. Amen. 

mardi 1 octobre 2019

Viser les Cieux et voire grand en restant petit





La voie lumineuse de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus est un chemin qui pourrait se résumer, selon ce que j’ai retenu, en trois points : la petitesse et la voie d’enfance, l’amour de Dieu et des frères et soeurs, pour atteindre et recevoir la paix en atteignant les cieux non pas en gravissant le rude escalier de la perfection ou la fameuse échelle des Pères, mais sur l’aile du grand aigle, ou un ascenseur, certes moins poétique, mais plus pratique.
Pour rencontrer Jésus, faire connaissance avec notre aigle et bien s’accrocher à cette céleste monture, comme faire ? Ne serait-ce que pour gérer nos émotions, car il en procure…
Le pape François a publié hier en la fête de saint Jérôme, une lettre apostolique pour instituer un dimanche de la Parole de Dieu. La curiosité m’a poussé à rechercher quelques lieux où sainte Thérèse en parlait. Le premier endroit rencontré, plein de fraîcheur, relate sa première expérience de lecture : Elle raconte son lever et la prière qu’elle faisait. « Après, dit-elle, venait la leçon de lecture, le premier mot que je pus lire seule fut celui-ci: "Cieux." »
Quel merveilleux programme, le but est déjà déterminé, à coup sûr une prière ou/et un passage de l’Ecriture.
Plus tard, elle rapporte ses périodes d’aridité : Dans cette impuissance l'Écriture Sainte et l'Imitation viennent à mon secours; en elles je trouve une nourriture solide et toute pure. Mais c'est par dessus tout l'Évangile qui m'entretient pendant mes oraisons, en lui je trouve tout ce qui est nécessaire à ma pauvre petite âme. J'y découvre toujours de nouvelles lumières, des sens cachés et mystérieux... Je comprends et je sais par expérience "Que le royaume de Dieu est au-dedans de nous." Jésus n'a point besoin de livres ni de docteurs pour instruire les âmes, Lui le Docteur des docteurs, il est la parole, le Verbe...
On aimerait parfois se contenter d’une lecture plutôt que de se lancer dans un commentaire de notre petite Docteur de l’Église.
Sa méthode est à retenir, je crois d’ailleurs que nous la pratiquons tous et toutes. Qui d’entre nous n’a pas apprécié la lecture d’un psaume ou d’un passage d’évangile ne serait-ce que pour trouver une lumière.
Sainte Thérèse en fit usage, pour rechercher sa vocation, l’épisode est célèbre dans sa lettre à Sœur Marie du Sacré-Cœur que nous avons lu dans l’office romain des lectures de ce matin. C’est encore l’Écriture qu’elle ouvrit avec les Chapitres 12 et 13 de l‘épître aux Corinthiens. Vous le connaissez par cœur ainsi que sa conclusion : Je compris que l'Église avait un Cœur, et que ce Cœur était brûlant d'amour.  Ô Jésus, mon Amour... ma vocation, enfin je l'ai trouvée, ma vocation, c'est l'amour !... Nous avons une vocation, puis nous découvrons sur l’aile de notre grand aigle, qui nous a emporté au plus profond de nous-mêmes, pour ainsi dire son sommet caché derrière les nuages… Parfois nous nous sentons pleins de regrets devant un bon nombre d’occasions manquées, et notre céleste monture, nous dit pour ainsi dire comme à mon frère Paul, par la bouche d’une de ses conseillères : « Fiche-toi de ça et vois grand. » 
Aimer, oui, mais comment ? et on en a si souvent entendu parler qu’on l’assimilerait à une rengaine jusqu’à tester combien il coûte et son exigence, car il se cache. Terminons par une autre illustration tirée du carnet rouge… et sur un passage du cantique des cantiques :
« Nous vous ferons des chaînes d'or marquetées d'argent 20. » - « Quelle chose étrange! dit Sainte Thérèse à Sr Marie de la Trinité et de la Sainte Face. Il serait plus compréhensible que l'Epoux dise à sa bien-aimée: « Nous vous ferons des colliers d'argent marquetés d'or, ou des colliers d'or marquetés de pierres précieuses », car habituellement on ne rehausse pas un bijou de prix par un métal inférieur. Pendant mon oraison, Jésus m'a donné la clef du mystère, j'ai compris que ces colliers d'or figuraient l'amour, la charité et qu'ils ne pouvaient être agréables à Jésus qu'autant qu'ils étaient marquetés d'argent c'est-à-dire d'humilité, de simplicité, d'esprit d'enfance. Oh! qui pourra dire, ajouta-t-elle toute pénétrée, la valeur que Dieu attache à ces humbles vertus puisque, seules, elles sont trouvées dignes de rehausser l'éclat de la charité!
L’exégèse de simplicité est la meilleure, n’est-ce pas ? Elle doit aussi nous conduire à l’unité, on ne lit bien l’Écriture qu’avec l’intelligence d’un cœur qui écoute la voix de l’Esprit-Saint.
Terminons par le passage d’une prière adressée à Marie par Sainte Thérèse :
Ô Reine des Martyrs, en restant exilée, tu prodigues pour nous tout le sang de ton cœur ! La maison de Saint Jean devient ton seul asile, le fils de Zébédée doit remplacer Jésus. C'est le dernier détail que donne l'Evangile. De la Reine des Cieux il ne me parle plus. Mais son profond silence, ô ma Mère chérie, ne révèle-t-il pas que le Verbe Eternel veut Lui-même chanter les secrets de ta vie pour charmer tes enfants, tous Elus du Ciel ? Bientôt je l'entendrai cette douce harmonie. Bientôt dans le beau Ciel, je vais aller te voir, Toi qui vins me sourire au matin de ma vie. Viens me sourire encore... Mère... voici le soir ! Je ne crains plus l'éclat de ta gloire suprême. Avec toi j'ai souffert et je veux maintenant chanter sur tes genoux, Marie, pourquoi je t'aime et redire à jamais que je suis ton enfant ! Amen.