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mercredi 15 mars 2017

Serviteur mais pas d'un camp retranché



Maurice Zundel - Lausanne, 1956 8.  Sortons du Moyen Age
L'idée de Dieu n'a pas bougé, elle n'a pas du moins suffisamment progressé en nous pour donner à cette humanité armée de tels pouvoirs, le Dieu dont elle a besoin. Nous en sommes restés au Moyen Age, ce Moyen Age qui s'illustre dans les coupoles byzantines par le portrait du Christ Pantocrator: …
Il faut absolument sortir (du Moyen-Age et de la « conception d’une chrétienté camp retranché ») si le monde moderne, qui est justement fier de ses découvertes, veut continuer à trouver en Dieu sa fin, son espace, sa lumière et sa joie.
Sentez-vous cette situation tragique? Un Dieu trop petit pour un monde qui grandit immensément! On comprend que l'homme d'aujourd'hui, l'homme qui se sent un créateur, l'homme dont la puissance semble n'avoir plus aucune limite, on comprend qu'il n'accepte pas de se soumettre.
La soumission n'est pas une attitude pour l'esprit. L'esprit cherche, l'esprit veut crever son horizon, il veut aller plus loin, il veut aller au-delà, sans terme et sans fin. L'esprit veut bien se donner, il veut bien aimer, il veut déployer une générosité, une générosité toujours plus grande: Il ne peut pas se faire l'esclave d'une formule et s'assujettir à un gouvernement.
Et justement, par bonheur, un homme du Moyen Age  -  qui dépasse infiniment le Moyen Age  -  nous a ouvert une issue merveilleuse; et cet homme du Moyen Age, qui dépasse infiniment le Moyen Age, c'est Saint François d'Assise, Saint François d'Assise, ce chevalier de Dame Pauvreté, Saint François d'Assise, ce bourgeois qui veut devenir Seigneur, ce bourgeois qui rêve d'être un prince, de s'illustrer sur les champs de bataille et d'épouser la plus belle princesse du monde. Ce chevalier de la pauvreté, nourri des romans de chevalerie, alors qu'il s'en va équipé de pied en cap pour faire la guerre, entend une voix qui l'appelle à un plus haut service: "François, lequel vaut le mieux: être le serviteur du serviteur ou le serviteur du Maître lui-même?" C'est une parabole qui s'éveille dans son esprit, et il comprend qu'en allant combattre sous les ordres d'un capitaine qui est lui-même au service d'un prince, il sera le domestique d'un domestique.

C'est trop peu pour lui. Ce qu'il lui faut, c'est tout, c'est l'infini, c'est le monde entier, et il ne s'arrêtera pas avant d'en avoir fait la conquête; mais il faudra d'abord qu'il apprenne quel est son champ d'action, il faudra qu'il reconnaisse le Visage de cette voix qui lui a parlé en langage encore imparfait qui était celui qu'il pouvait entendre. Et bientôt, à travers la maladie, à travers le silence, il va découvrir Celui qui lui a parlé, et il va reconnaître Dieu sous les traits de la Pauvreté.

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