“Là où je
vais, vous ne pouvez pas aller”, je vous le dis maintenant à vous aussi. » « Là
où je vais, tu ne peux pas me suivre maintenant ;
tu me
suivras plus tard. » Une pensée de début de commentaire : « Ne pas
se laisser arrêter ou démonter par ses propres limites, lorsque nous y sommes
confrontés, par son péché même… Attendre avec confiance et persévérance le
temps de Dieu et de sa miséricorde. « Ne jamais désespérer de la
miséricorde de Dieu » dit saint Benoît en finale de ses instruments des
bonnes œuvres.
Quelques mots
en préambule pour le mardi saint. A Rome lors des stations de carême l’Eucharistie
était célébrée par le pape ce jour-là à sainte
Prisque, première église sur l’Aventin, dont le titre appartint un temps à
celui qui allait devenir saint
Jean XXIII.
C’était la
passion selon saint Marc qui était lue dans l’ancienne liturgie. Mardi Saint
jour de pénitence et de célébration du sacrement de réconciliation là-bas.
C’est un
jour modeste que ce troisième jour de la semaine, jour où dans la Genèse Dieu
dit : Que la terre produise de la verdure, de l'herbe portant de la semence,
des arbres fruitiers donnant du fruit selon leur espèce et ayant en eux leur
semence sur la terre. Et cela fut ainsi. Nous nous le rappellerons durant la
veillée pascale.
En
contraste, le mardi saint est un jour de déconstruction à lire l’Evangile
d’aujourd’hui, tout paraît aller jusqu’à la mort de Dieu lui-même, dans trois autres
jours.
Les camps
paraissent se former pour ce dernier combat, Juda se laisse saisir par l’Esprit
du mal. Saint Augustin dans son commentaire sur saint Matthieu concluait :
On
parle par la pensée. A-t-il été influencé par saint Jean ?
Est-ce que tout
s’est passé dans un échange de regard entre Jésus et Judas? Augustin imagine
ailleurs un échange de regard sauveur entre le bon larron et Jésus qui l’amène à
se convertir. « Les
Prophètes ne m'ont rien annoncé; mais le Seigneur, qui était devant moi, m'a
regardé, et son regard a percé jusqu'au fond de mon coeur. »
Judas ne
croit pas en Jésus… au contraire de Pierre, habité par une foi qui n’est pas
encore purifiée.
Est-ce que
Juda a seulement compris que c’était mu
par une sorte d’intuition humaine que Jésus s’était exprimé ? Était-il un de
ces réalistes qui regardait Jésus comme un doux rêveur manquant de sens du
concret et d’habileté ? Avait-il ressenti les paroles et l’attitude de
Jésus comme une provocation et un rapport de force? Un peu de foi aurait
pu le conduire à demander à Jésus sa miséricorde. Manifestement, cela lui était
impossible. « La miséricorde est le propre de Dieu
dont la toute-puissance consiste justement à faire miséricorde ».[5] dit saint Thomas dans Misericordiae
Vultus, la bulle d’indiction du Jubilé. Il faut donc croire en Dieu et en
la divinité de Jésus pour la demander. Dans Dives
in Misericordia, saint Jean-Paul II disait que : Le Seigneur aime
Israël d'un amour d'élection particulier, semblable à l'amour d'un époux 37;
c'est pourquoi il lui pardonne ses fautes, et jusqu'à ses infidélités et ses
trahisons. S'il se trouve en face de la pénitence, de la conversion
authentique, il rétablit de nouveau son peuple dans sa grâce 38. Dans la
prédication des prophètes, la miséricorde signifie une puissance particulière
de l'amour, qui est plus fort que le péché et l'infidélité du peuple élu.
Cela était valable pour Juda aussi. Il n’a pas cru en celui qui était devant
lui et se révélait à lui depuis trois ans. Il n’a pas cru en l’amour de celui
qui était venu en sa rencontre, qui avait marché avec lui. Comment croire en sa
résurrection et en la miséricorde qui lui était destinée ? Ni foi, ni
espérance, ni charité. Et nous quelle est la nature de notre foi ? S’agit
de formules assénées ? S’agit-il d’une foi diplomatique qui compose et qui
perd sa saveur et toute valeur ? Ou s’agit-il d’une foi forte et humble, porteuse
de miséricorde ?
Jésus savait
que c’était son heure, celle où il allait nous sauver tous, où la miséricorde
de Dieu allait nous être communiquée définitivement. Son affirmation ne manque
pas de nous étonner encore après ce moment de la sortie de Juda. Humainement elle
ne peut être lue que comme un échec.
« Maintenant
le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui. Si Dieu est
glorifié en lui, Dieu aussi le glorifiera ; et il le glorifiera bientôt. »
Il fait
allusion à la gloire de la croix, à la gloire de sa résurrection, à celle de
son ascension.
C’est à
cette gloire proposée à tous, par lui, avec lui et en lui, dans le pardon
offert à Juda et auquel il n’a pas cru, dans le pardon offert à Pierre et en
lequel il a cru, dans le pardon offert à chacun de nous qu’il faut nous
attacher. « Pierre m’aimes-tu ? » « Pierre m’aimes-tu
vraiment ? ».
Près
de la croix, Marie avec Jean, le disciple de l’amour, (après avoir été
témoin du drame des trahisons) est témoin des paroles de pardon qui
jaillissent des lèvres de Jésus. Le pardon suprême offert à qui l’a crucifié
nous montre jusqu’où peut aller la miséricorde de Dieu. Marie atteste que la
miséricorde du Fils de Dieu n’a pas de limite et rejoint tout un chacun sans
exclure personne. Amen.
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