Comment saint Benoît a-t-il pu traverser tant de siècles ?
Comment son message peut-il continuer à se transmettre ? La question à
poser n’est-elle pas plutôt qui transmettait-il ? S’il ne s’agissait du
Christ, rien ne tiendrait et ne survivrait. Il aurait été impossible que son
monastère ne se relève à plusieurs reprises. Il avait pleuré pour que les biens
soient épargnés, tout ce qu’il avait construit, il n’obtint grâce que pour sa
communauté. Pourtant ce fut un grand saint.
Nous connaissons un peu l’histoire du Monastère. Il y eut des barbares,
des invasions musulmanes, etc… Jusqu’à la dernière guerre mondiale qui le
détruisit dans une bataille dont un bon nombre juge qu’elle
était inutile. Pour la petite histoire on rapporte que le bombardier
américain qui bombarda le premier le Mont-Cassin portait le numéro 666. (film).
Certes la bibliothèque avait été sauvée et mise à l’abri.
Le 18 mai 1944, il ne restait que des ruines, mais le monastère fut
relevé. Combien de soldats perdirent la vie ?
Un monastère ce n’est pas une bibliothèque. La conservation
et la transmission de ce qu’on peut appeler la mémoire de l’Eglise en chemin y
a toutefois son importance. L’approfondissement de l’Ecriture, et la
connaissance des Pères est tenue normalement en haute estime, saint Benoît
mentionne ces aspects dans sa règle, citant saint Basile. Si la louange divine joue
un rôle central, elle n’est pas non plus la finalité. On pourrait concevoir la vie monastique selon sa
conception, comme un équilibre de vie qui permet de découvrir le Christ et d’apprendre
à vivre en disciple du Christ, en chrétien, sous la conduite d’un abbé éclairé.
Sur
la tapisserie qui est devant l’autel nous avons deux lignes d’inscription en
latin qui se rapportent au trois archanges, à saint Benoît et au Christ :
QUIS SICUT HEL (Michel) FORTIS (Gabriel) MEDICUS (Raphaël)
SOTER (le Christ) BENEDICTUS (Benoît). Une
des traductions peut être celle-ci : « Qui est, comme Dieu, un médecin
fort, un sauveur béni. ».
Second vers : PROSPICE TERRIGENAS CLEMENS MEDIATOR
USIAS
« Sois bienveillant aux (créatures) terrestres, clément
médiateur. ».
Dans la vocation de Saint Benoît, il y a une vocation de
guérisseur de l’âme, un médecin de l’âme et donc de l’homme et de la
civilisation. C’est un grand mot, mais les faits sont là. Il construit la Paix
par son action.
Le Bienheureux Paul VI avait me semble-t-il cette pensée en
lui lorsqu’il le déclara patron de l’Europe, accompagnant par ce geste le
relèvement du monastère après une guerre dévastatrice. Il a voulu envoyer un
message spirituel et un appel à la Paix.
« Paix à cette maison et à tous ceux qui l'habitent. »,
disait-il parlant de la paix
bénédictine.
La paix, nous la trouvons ici (au Mont-Cassin), comme un
trésor jalousement gardé, et Nous l'apportons comme le meilleur don de Notre
ministère apostolique. En dispensant les mystères divins, celui-ci offre en
effet avec une prodigalité aimante cette effusion de vie qu'est la grâce,
source première de paix et de joie. La paix, nous la célébrons ici comme une
lumière resplendissant de nouveau après la guerre qui avait éteint sa flamme
sainte et bienfaisante. »
Paul VI ne voulait pas d’un retour au Moyen-Age, à des
sortes de médiévales. Saint Benoît a appris à être frères, l’apprentissage de
la vie commune. Ce qui l’intéressait c’était donc la paix et deux autres
éléments : deux motifs qui font toujours, selon les mots de Paul VI,
désirer l'austère et douce présence de saint Benoît parmi nous : « la foi,
que lui et son ordre ont prêchée dans la famille des peuples, spécialement dans
la famille Europe, la foi chrétienne, la religion de notre civilisation, celle
de la sainte Eglise, mère et éducatrice des nations, et l'unité par laquelle le
grand moine solitaire et social nous a appris à être frères, et par laquelle
l'Europe fut la chrétienté. Foi et unité, que pourrions-nous souhaiter
de meilleur pour le monde entier, et spécialement pour cette portion de choix
qu'est l'Europe? Qu'y a-t-il de plus moderne et de plus urgent, de plus
difficile et de plus contrarié, de plus nécessaire et de plus utile pour la
paix? »
Est-ce que nous-mêmes nous désirons la paix qui vient de
Dieu ? Sommes-nous suffisamment guéris nous-mêmes pour être nous-mêmes des
médecins de la paix ? Question à laquelle chacun peut essayer de répondre,
s’il le peut. Est-ce vers le Christ que nous voulons nous tourner, comme les tournesols vers le soleil, ou voulons-nous surtout que tout tourne autour de nous, de notre petite personne?
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