20 juillet 2025
16ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine IV du Psautier) — Année C
Cher Frères et Sœurs,
Quel autre thème prendre aujourd’hui que celui de l’accueil, après avoir écouté nos lectures ? Nous recevons des visiteurs et pouvons aussi ouvrir notre porte à d’autres visiteurs spirituels en même temps.
La première lecture nous parle des
trois visiteurs accueillis par Abraham. Elle est représentée notamment sur une
icône célèbre d’Andreï Roublev que j’avais pu voir dans la galerie Tretiakov à
Moscou. Elle a été transférée à la Cathédrale du Christ-Sauveur de la même
ville. Nous n’aurons certainement pas le temps de la revoir, vu le cours actuel
des choses et les circonstances de la vie. Il s’agit de l’hospitalité d’Abraham.
Le psaume qui suit nous parle
encore de tente, mais il introduit un autre élément, celui de l’accueil dans la
tente de Dieu. Seigneur, qui séjournera sous ta tente… Celui qui se conduit
parfaitement.
La deuxième lecture amène un
autre élément qui n’a rien à voir avec des échanges de politesse : «
Je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous ; ce qui reste
à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair. »
Le centre de l’accueil vient
enfin, celui de Jésus dans la maison de Marthe et de Marie qui est aussi celle
de Lazare. La partie masculine de humanité se demande : Pourquoi Saint Luc
ne mentionne-t-il pas Lazare ? Et nous alors ? C’est une
caractéristique de Saint Jean. Jésus le
réserve pour sa résurrection, ce qui n’est pas mal. Résurrection de l’homme… Les
Pères de l’Eglise ne se osent même pas la question. Les Evangélistes veulent
certainement s’intéresser à la leçon spirituelle que veut donner Jésus.
Sans aucun doute, il veut que
nous soyons d’abord attentif au cœur à cœur avec lui, à notre prière. Le temps
de vacance est idéal pour cela. Marie, « s’étant assise aux pieds du
Seigneur, écoutait sa parole. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui
sera pas enlevée. » Il est certain que lorsque nous recevons un hôte, c’est
faire preuve d’une élémentaire délicatesse que quelqu’un reste avec lui et qu’il
ne soit pas laissé seul devant la télé. Permettons-nous
un anachronisme : est-ce qu’on peut laisser seul Jésus devant la télé ?
Il n’est pas venu pour cela, mais pour nous rencontrer.
Nous avons remarqué la différence
entre l’évangile avec l’accueil de Marthe et Marie celui d’Abraham. Abraham va vite faire travailler sa femme, tue
le veau gras, accompli tout ce travail pour bien recevoir. Les trois hôtes
restent seuls. Pourtant l’hospitalité orientale est proverbiale. Peut-être Abraham
pense-t-il que ces trois étrangers peuvent parler entre eux ? Quelle
langue parlent-ils ? La question n’est pas sans intérêt. Ils se
comprennent certes, la Trinité parle le même langage de l’amour et du don de
soi, Mais avec Abraham quel dialogue ? Il se s’agit de l’établir. Pour ce
faire, les trois personnages veulent le remercier par un cadeau royal, celui du
don de la vie. Cela va faire rire Sara. Qui croirait à la naïveté
féminine ? Empathie, serviabilité, savoir faire, mais l’expérience
aguerrit rapidement.
Sur l’icône de Roublev où les
trois personnes représentent dans la tradition chrétienne les trois personnes
de la Trinité, on voit sur la table au centre, un plat avec semble-t-il un
agneau selon certaines interprétations, ce qui nous fait penser à l’Eucharistie
et au don de la vie, à l’agneau qui se sacrifie pour créer ce lien de l’amour,
ce langage commun en elle-même, mais aussi langage entre elle et nous.
Le Seigneur vient chez Marthe et
Marie non seulement pour un repas, ce qui est important, mais pour être
accueilli lui-même dans les cœurs. Il existe une langue du cœur entre lui et
nous. Il veut venir habiter en nous pour que nous puissions à notre tour,
habiter en lui. Il veut nous inviter, nous faire le don de la vie. Avec le
temps qui passe, nous sentons de plus en plus l’importance et même l’urgence
d’être bien accueillis nous aussi et de pouvoir accueillir. Pourquoi ne pas y accorder autant d’importance
que pour les urgences de nos hôpitaux ? Où se trouve la clef de la salle
d’urgences de mon cœur ? de la salle d’urgence pour mon cœur ? Cette clef de l'Amour, cette clef qu'est le Christ?
Je ne vous apprendrai rien en
nous rappelant que si charité bien ordonnée commence par soi-même, l’accueil du
prochain est tout aussi important. Dans la Lettre aux Hébreux, il y a ce
passage significatif : « N’oubliez
pas l’hospitalité : elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez
eux des anges ». Hb 13,2. Saint Augustin le mentionne dans sa Cité de
Dieu : « Il n’est pas dit qu’Abraham vit trois dieux, mais trois hommes.
Et quand ils lui parlent, c’est souvent un seul qui parle comme Dieu. Le
mystère de la Trinité dans l’unité y est voilé. » Deux homélies de saint Jean
Chrysostome en parle aussi, montrant Abraham comme un modèle d’hospitalité
chrétienne : « Remarquez combien il est empressé, combien il est humble…
Abraham court, il s’abaisse, il s’adresse à eux comme à des seigneurs. »
Quel message le Seigneur nous
délivre-t-il ? Après l’annonce, l’écoute, il y a la croix puis la
résurrection. Cela se fait par étape. Il est destiné à tous. Qui serait assez
naïf pour croire à une solution de facilité universelle ?
Posons-nous encore une seule
question : Suis-je capable de reconnaître le Christ dans mes visiteurs de
cet été ?
Impossible de passer à côté de
l’hospitalité de Marie à l’Annonciation. Elle reconnaît l’Ange et accueille son
Fils et son Seigneur en elle. A l’inverse de Sara, elle ne rit pas devant
l’impossible. Marie est le modèle du cœur qui entend la parole de l’Ange, qui
l’écoute, l'accueille et lui permet de donner son fruit. « Qu’il me soit
fait selon ta parole. Amen. »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire