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mardi 16 février 2016

Quel est donc, pauvre François, l'esprit qui t'anime ?

Un des buts de Saint François de Sales avait été d'appliquer la réforme du Concile de Trente, en prenant Saint Charles Borromée en exemple.

Prévôt du Chapitre de Genève, il élabora un discours programme célèbre où il expliqua qu'il fallait prendre comme armes la charité pour ébranler les murs de la ville de Genève, ce fut tout son programme d'action pastorale et de vie spirituelle. Excellent juriste, il était conduit par une conception unitaire de l'Etat dépendant de l'Eglise, et catholique, comme il se devait.

Cependant, si contexte et vision politique sont bien différents aujourd'hui, tout comme la forme du langage, nul ne le conteste, le grand moyen mis en avant pour la nouvelle évangélisation, celui de la CHARITÉ, est le même. C'est celui que préconise le pape François. Relevons au passage que saint François de Sales passa quelques années dans un collège jésuite, à sa demande, mais qu'il traça sa propre voie.

L'un des éléments les plus importants de cet assaut de charité est la sainteté du clergé.


HARANGUE POUR LA PRÉVÔTÉ
Fin décembre 1593
Rédaction définitive

« O Dieu qui venez de m'élever à cette charge, que votre puissance me garde toujours, afin que j'évite tout péché dans l'exercice de mes fonctions, et que l'accomplissement de vos lois si justes soit le motif et la règle de mes pensées, de mes paroles et de mes œuvres. »

Vénérables Pères, je débute par cette prière que j'ai déjà répétée plusieurs fois, et que je me propose de répéter désormais plus souvent encore. Cette prière et votre si agréable et si douce présence (la vôtre surtout, Révérendissime Evêque, qui nous cause d'autant plus de bonheur qu'elle était moins attendue), Pères vénérables, mes auditeurs à la fois très aimants et très aimés, mes chers parents et amis, etc., cette prière, dis-je, et votre présence ont apaisé le trouble de mon âme. S'il eût persévéré aujourd'hui encore, le cœur et l'esprit m'eussent fait défaut ; je n'aurais pu ni accepter votre Prévôté, ni vous adresser un seul mot; mon courage, maintenant fortifié et relevé, aurait défailli. Et comme ces préoccupations provenaient de causes toutes légitimes, pour ne pas être téméraire, je vais, avec votre assentiment, vous les expliquer, afin qu'au début de mon ministère aucun mauvais soupçon ne s'élève dans vos âmes à mon sujet.
Les préfets des provinces avaient coutume, en entrant en charge, de former de grands, de magnifiques projets, pour signaler les débuts de leur administration par quelque action d'éclat. Voici l'entreprise que je propose à vos délibérations ; elle est aussi grande que difficile, elle n'est pourtant pas plus impossible qu'elle n'est indigne de nous : il s'agirait de recouvrer Genève, ce siège antique de votre assemblée. Pour mener ce projet à bonne fin, je vous exposerai mon plan et la ligne de conduite à tenir. Le développement de ces deux points devrait, si j'étais quelque peu orateur, merveilleusement enflammer mon éloquence et exciter en vous la plus grande attention. Ce projet de recouvrer Genève, dont l'accomplissement est si vivement désiré depuis longtemps, doit, quel qu'en soit l'auteur, être adopté par nous avec enthousiasme, et il le sera, je l'espère. Il pourrait toutefois être ébranlé et compromis suite de soupçons défavorables que je vous inspirerais. Aussi, vous prié-je d'abord d'apprendre en patience avec quelle anxiété, quel profond sentiment de mon indignité, je suis arrivé à occuper le premier siège de votre Chapitre.
Pendant les fêtes de Noël qui viennent de passer, la solennité même de ces jours me faisait rentrer en moi-même, et je pensais à ce qui me reste de cette vie mortelle. Entre plusieurs difficultés qu'offrait ma traversée sur cette mer, la première, non moins grave et plus proche que toutes les autres, fut ma nomination par le bon plaisir du Souverain Pontife, à la Prévôté du Chapitre de l'Eglise Cathédrale de Saint-Pierre de Genève.
Cette faveur me parut bien prématurée, pleine de périls. Ignorant, inexpérimenté, simple soldat, me voir à l'entrée même du noviciat ecclésiastique, honoré d'une telle dignité, être préposé avant d'avoir été posé, parfait avant d'être fait! Et je me rappelai cette parole de David : C'est en vain que vous vous levez avant le Jour ; levez-vous après vous être reposés. Bien que le sens littéral concerne un autre objet, ne pourrait- on pas facilement, grâce à l'esprit qui vivifie, appliquer ces paroles à ceux qui cherchent à présider avant d'avoir siégé, et qui, semblables à des fruits printaniers et hâtifs, ne peuvent être conservés longtemps sans se corrompre.
Et alors je voyais se dresser devant moi comme une apparition, votre vénérable Chapitre. A sa tête, siégeait l'Apôtre qui tient les clefs du Ciel, et il m'adressait ce grave reproche : Quel est donc, pauvre François, l'esprit qui t'anime ? Eh quoi, le dernier de tous par la science, les vertus et le talent, tu prétends être préposé aux premiers ! Ne sais-tu pas que les honneurs sont extrêmement onéreux? Ne crains-tu pas cette sommation dont l'époque est incertaine, il est vrai, mais assurément prochaine : Rends compte de ton administration ? Ces paroles m'émurent à tel point dans l'intime de mon être, que, serait-il même utile de me remémorer cette émotion, je n'aurais pas de termes assez forts pour l'exprimer. Je répétais alors en moi-même : O Dieu, j'ai entendu vos paroles et j’ai craint.
Cependant, ce jour a lui; ma terreur s'est presque évanouie, et ma confiance en Dieu s'est grandement accrue. Oui, la présence de votre tout aimable et bienveillante assemblée, Pères vénérables, me ranime et me réconforte à tel point qu'il serait difficile de dire ce qui m'a le plus vivement impressionné, de la terreur que j'éprouvais ou du bonheur que je ressens.

Ce Prévôt aurait à craindre, qui eût été préposé à des hommes difficiles à contenir dans le devoir; mais moi, mes Pères, quelle appréhension puis-je avoir en cette occasion, en face de vous dont la charité et la prudence remportent sur celles qu'on pourrait désirer du Prévôt le plus accompli. Pourquoi rappeler mon inexpérience et ma faiblesse, puisque dans mes fonctions, je n'aurai jamais à user de mesures de discipline ou de correction? A moins qu'on ne veuille « instruire Minerve, » « prêcher saint Bernard, « ou, selon notre proverbe, poser pour la latinité parmi les Cordeliers.
Je suppose volontiers, je reconnais même, qu'habitués jusqu'à ce jour à des Prévôts si distingués, vous éprouviez nécessairement en face d'un tel changement, et, à mon avis, pour dire vrai, d'un tel déclin de la première dignité de votre Chapitre, une répugnance qui vous rappelle ces vers :
«Quel étranger ici s'installe sur nos sièges ? »
De Pierre, quel osé franchit l'auguste seuil ?
En réalité, mes Pères, cette conjoncture est-elle heureuse ou non, ce n'est pas à moi de le dire. La chose parle d'elle-même, et vos cœurs vous répondent assez.
Mais tranquillisez-vous. Rappelez-vous, je vous prie, et considérez que Dieu choisit ordinairement ce qu'il y a de plus infime et de plus infirme en ce monde pour confondre ce qui est fort, et que, généralement, c'est de la bouche des enfants et de ceux qui sont à la mamelle qu'il tire sa plus parfaite louange. C'est ainsi que nous lui rapportons plus facilement « ces biens qui procèdent tous de lui. » O Dieu immortel, que vos voies sont éloignées de nos voies ! O suprême Protecteur des petits, vous pouvez, des pierres, susciter des enfants d'Abraham.
C'est lui, mes Pères, qui réjouira ma jeunesse quand je monterai à son autel. Qu'il assaisonne du sucre et du miel de sa charité nos fruits printaniers, précoces et encore verts, et nous n'aurons pas à craindre qu'ils se gâtent.
Je répéterai donc sincèrement, quoique dans une condition différente et bien inférieure, ce que disait autrefois le plus sage des hommes : Je suis l'être le plus insensé et je ne possède pas la sagesse des homm.es ; je n'ai pas appris la sagesse, j'e ne connais pas la science des saints. Mais aussitôt après, je relèverai mon âme avec David : Parce que je n'ai pas connu les lettres, j'entrerai dans les puissances du Seigneur. C'est-à-dire : par mes talents et mes connaissances, je suis bien faible, mais je fonderai toutes mes espérances en Celui qui est puissant pour rendre éloquentes les langues des enfants, et qui ne « refuse jamais son secours à celui qui fait ce qui est en son pouvoir, » comme nous l'enseignent avec tant de charme et de vérité tous les bons théologiens.
On me dira peut-être : rien ne vous autorise à présumer si grandement de la bonté de Dieu, vous qui avez volontairement gravi un degré d'où il est si facile de déchoir et de se précipiter. Dieu, il est vrai, porte secours au besoin à ceux qui ne se sont pas jetés dans le danger ; quant à ceux qui aiment le péril, ils y périront. Si vous l'agréez, je lèverai cet obstacle aux espérances que vous pourriez concevoir de moi.
Je m'étais ouvert de mon intention d'embrasser la carrière ecclésiastique à plusieurs personnes dont l'autorité me fut toujours sacrée. A mon insu (je vous le déclare ingénument, mes Pères, et je ne saurais dissimuler en leur présence), elles pressèrent par écrit leurs amis de solliciter pour moi, s'il était possible, votre Prévôté alors vacante. Ces lettres précédèrent toutes les requêtes du même genre ; leurs prières furent accueillies, et la faveur demandée me fut accordée.
Que vouliez-vous, ô Pères, que je fisse en de telles conjonctures? Rejeter absolument cette faveur? je voyais dans cette conduite je ne sais quoi d'ingrat, de grossier, de méprisant pour ceux qui m'avaient obtenu cette dignité.
L'accepter? Ce parti me paraissait plein de périls et d'angoisses. Dans cette perplexité, je résolus d'attendre jusqu'à ce jour, et ce jour venu, si vous me rejetiez comme indigne, votre sentence était pour moi arrêt de justice et je me retirais très volontiers comme indigne. Si, au contraire, vous ne me trouviez pas indigne, j'inclinais promptement les épaules sous ma charge, assuré que votre décision m'indiquait la voie à suivre.
Mais, je le constate, vous me recevez tous avec les plus aimables félicitations. Si je suis coupable en acceptant cet honneur, vous engagez tous, croyez-m'en, votre conscience avec la mienne, et la peine de la faute commise devra s'étendre à ceux qui y ont consenti. Si vous voulez vous libérer de toute responsabilité, il ne vous reste qu'à aider et soutenir ma faiblesse par vos conseils et votre exemple, à suppléer par votre charité aux qualités qui me manquent, et je sens trop combien nombreuses elles sont ! Soyez persuadés que Dieu vous a ordonné, comme à ses Anges, de me garder en toutes mes voies, de me porter dans vos mains, afin que je ne me heurte pas à cette table de pierre sur laquelle sont gravés les dix commandements du Seigneur sur laquelle il est écrit : Tu adorer.is le Seigneur ton Dieu et le serviras lui seul; et portant ainsi les fardeaux les uns des autres, nous accomplirons la loi du Christ. Veuillez croire que je recevrai toujours humblement, dans le Seigneur, les avis de chacun d'entre vous, de telle sorte que si vous n'avez tous qu'un seul Prévôt, moi seul je paraisse en avoir autant que je compte de Chanoines, et que je sois moins appelé préposé aux Chanoines que Prévôt des Chanoines.

Dans une de leurs fréquentes communications épistolaires, le grand Augustin écrivait à Jérôme (je cite deux brillantes lumières de l'Eglise) : « Bien que, comme titre honorifique, l'épiscopat soit supérieur au simple sacerdoce, cependant, sous bien des rapports, Augustin est inférieur à Jérôme. » J'applique cette parole à notre situation. La Prévôté, sans doute, l'emportera toujours sur le canonicat; toutefois, je placerai très humblement après tous les Chanoines
François de Sales, ou, ce qui revient au même, votre Prévôt actuel, me souvenant de l'artiste Antigonus qui appelait toute dignité, fût-elle royale, une honorable servitude. Ainsi le plus grand se comportera comme le plus petit, ainsi, grâce à une sincère charité, les premiers seront les derniers et les derniers les premiers. La charité sincère peut tout, l'emporte sur tout, elle ne finira pas, elle n'agit pas précipitamment. C'est par la charité qu'il faut ébranler les murs de Genève, par la charité qu'il faut l'envahir, par la charité qu'il faut la recouvrer. Cette idée m'amène insensiblement et d'elle-même à la seconde partie de mon discours.

Je ne vous propose ni le fer, ni cette poudre dont l'odeur et la saveur rappellent la fournaise infernale; je n'organise pas un de ces camps dont les soldats n'ont ni foi ni piété. Que notre camp soit le camp du Dieu dont les trompettes font entendre, avec des accents pleins de douceur, ce chant : Saint, Saint, Saint est le Seigneur Dieu des armées. C'est sur ce camp, vaillants Compagnons d'armes, que vous devez fixer vos regards; et ce que votre fidélité doit à Dieu, à l'Eglise, à la Patrie, à vos autels et à vos foyers, lorsque l'occasion s'en offrira, faites-le, montrez-le, accomplissez-le. 'Vous entrevoyez enfin, je pense, toute l'étendue du plan que je vous propose pour reconquérir Genève. C'est par la faim et la soif, endurées non par nos adversaires mais par nous-mêmes, que nous devons repousser l'ennemi. C'est par la prière que nous le chasserons; car ce genre de démons, vous le savez, ne peut être chassé que par la prière et le Jeûne. rQue l'exemple d'Holopherne nous apprenne, je vous prie, la meilleure manière d'emporter une ville d'assaut ! Voulez-vous une méthode facile pour emporter rapidement une ville d'assaut? Je vous prié de l'apprendre de l'exemple d'Holopherne : il est bien permis, en effet, de retourner contre l'ennemi ses propres armes et d'en tirer profit, comme l'a si bien démontré Plutarque. Holopherne assiégeant Béthulie, coupe l'aqueduc et fait garder soigneusement toutes les fontaines. La soif torture si cruellement les malheureux assiégés qu'ils sont forcés de penser sérieusement à se rendre. A notre tour, je vous en conjure, employons pour nous emparer de Béthulie et de cet Holopherne enfermé dans Genève la méthode dont lui-même nous a montré l'usage.

Il est un aqueduc qui alimente et ranime pour ainsi dire toute la race des hérétiques : ce sont les exemples des prêtres pervers, les actions, les paroles, en un mot, l'iniquité de tous, mais surtout des ecclésiastiques. C'est à cause de nous que le nom de Dieu est blasphémé chaque jour parmi les nations, et c'est avec pleine raison que le Seigneur s'en plaint si amèrement par ses Prophètes. Voilà l'eau de contradiction qui me paraît étancher la soif brûlante des hérétiques, boisson vraiment digne de ceux qui la prennent ; c'est notre iniquité que boivent ces hommes iniques, ainsi qu'il est écrit : Ils boivent l'iniquité comme l'eau.

Ils devraient au moins reconnaître leurs vices, et ceux d'autrui ne les scandaliseraient plus. Salomon, dans l'Ecriture, sous cette même comparaison de l'eau, donne ce sage avertissement : Buvez l’eau de votre citerne. Mais puisqu'il en est ainsi, mes Compagnons d'armes, puisqu'ils regardent les actions d'autrui et non les leurs, arrêtons le cours de cette eau, je vous prie ; que chacun veille à ce que sa source privée ne coule pas jusqu'à l'ennemi. Faisons refluer à leur source les courants de nos péchés, et là, comme desséchés par le Soleil éternel dans notre propre cœur, que ces courants n'offrent plus de cette eau de scandale ni à nos ennemis ni à nous. Alors sûrement, le Jourdain retournera en arrière, et Israël sortira de l'Egypte.

Il faut renverser les murs de Genève par des prières ardentes, et livrer l'assaut par la charité fraternelle. C'est par cette charité que doivent frapper nos têtes de ligne. Il est une éternelle cité dont on a dit tant de choses glorieuses, qui est défendue par une position si haute et si avantageuse, que la vue elle-même ne la peut découvrir; or, nous savons que l'on peut s'emparer de cette cité céleste par la prière et les bonnes œuvres. Le Chef suprême de cette place forte, le Christ Notre-Seigneur, en cédera le butin à ceux qui l'auront enlevé avec ces armes. Le Royaume des cieux, en effet, souffre violence et ce sont les violents qui le ravissent. S'il en est ainsi, et c'est la vérité, combien sera-t-il plus facile d'enlever par les engins de la prière et des bonnes œuvres, une ville au modeste circuit, humble et méprisée! En avant donc et courage, excellents Frères, tout cède à la charité ; l'amour est fort comme la mort, et à celui qui aime, rien n'est difficile.

Nous laisserait-elle donc insensibles cette douleur que nous devrions éprouver au sujet d'un exil d'autant plus lourd et moins honorable que nos péchés à tous en prolongent la durée ? Les Israélites s'assirent sur les rives des fleuves de Babylone, et pleurèrent au souvenir de Sion. Que ferons-nous donc. Chanoines de Genève ? Ne sommes-nous pas exilés et pèlerins sur une terre étrangère, celle que nous habitons et foulons aux pieds? Asseyons-nous donc sur ces rivages des fleuves de Babylone, c'est-à-dire de la confusion, des péchés ; pleurons au souvenir de cette Sion genevoise, jadis si glorieuse des trophées du Christ, et aujourd'hui, pour les crimes de notre époque et de nos ancêtres, gisant accablée sous la plus honteuse servitude de l'hérésie.

L'exemple que Jérémie nous cite de ces mêmes Israélites, nous montre la tristesse que Genève, perdue pour le Christ et pour nous, devrait nous inspirer: Ils se sont assis sur la terre, les vieillards de la fille de Sion; ils ont couvert de cendre leurs têtes, ils se sont revêtus de ciliées ; les vierges de Juda ont baissé leurs têtes vers la terre. Je voudrais que nous comprissions ainsi ce passage: nous, Chanoines, comme sénateurs de l'Eglise, nous imiterions les vieillards d'Israël, et nous réserverions aux vierges de Sainte Claire, survivantes aussi du clergé de Genève, le rôle des vierges de Juda. Ainsi, par la miséricorde de Dieu, nous recouvrerions les biens que nos ancêtres perdirent par son juste jugement.

A votre avis, Messieurs, pourquoi les citoyens de Genève, si obstinés contempteurs de la discipline ecclésiastique, ont-ils cependant conservé tous les noms et tous les monuments qui rappellent cette discipline ? Evêché, Pré l'Evêque, Rue des Chanoines, Maison du Chantre, notre Temple de Saint-Pierre, ceux de la Madeleine, de Saint-Gervais : tous ces anciens noms, les novateurs, comme oublieux de leur rôle, continuent à les employer. L'hérésie, partout où elle passe, renverse, détruit les temples, brise les images des Saints. Genève conserve ses temples intacts, le visage seul de ses images a été récemment détérioré ; les stalles des Chanoines subsistent encore. Bons signes, mes Collègues, bons signes ! Conduite providentielle qui rappelle à nos ennemis l'usurpation de nos sièges, nous excite à recouvrer notre bien, par un heureux retour, et à choisir notre sépulture dans le même tombeau
que nos ancêtres. Pour atteindre ce but, rendons-nous Dieu propice par la pénitence. En un mot, car il faut terminer ce discours, nous devons vivre d'après la règle chrétienne, de telle sorte que nous soyons Chanoines, c'est-à-dire réguliers, et enfants de Dieu, non seulement de nom mais encore d'effet.

Qu'il en soit ainsi, mes Pères, ou plutôt (pour ramener notre discours à la pensée de Dieu par laquelle il a commencé), puissions-nous vous rendre honneur et gloire, Dieu tout-puissant ! A la Bienheureuse Vierge, aux Saints Anges, aux Bienheureux Pierre et Paul, au Bienheureux François, louanges et actions de grâces! Et qu'en retour, ô Dieu, vous nous accordiez votre grâce, vous qui êtes souverainement exalté dans les siècles, Père, Fils et Saint-Esprit.

Qu'il en soit ainsi, Dieu immortel, qu'il en soit ainsi.

Excellents Collègues, je vous vois assez portés de vous-mêmes à cette entreprise... espérons donc. Nous avons en effet une consolation à notre époque si malheureuse : la plupart des hommes de bien et de jugement pensent qu'à cette époque est réservée la réalisation d'un vœu formé depuis si longtemps. Nous recouvrerons nos anciens sièges, et enfin délivres des mains de nos ennemis, nous servirons dans la sainteté et la Justice ce Dieu souverainement exalté dans les siècles.


Quant à vous, je vous rends d'immortelles actions de grâces. Illustrissime et Révérendissime Prélat, pour avoir, par votre très auguste présence, relevé l'éclat de cette assemblée où je compte mes plus chers amis, ceux que j'aime plus que le miel et le rayon de miel, plus que l'or et la topaze. Daignez combler la mesure de vos bienfaits envers moi, et, en vertu de la puissance qui vous a été donnée d'en haut, je vous supplie et conjure de nous fortifier tous par votre bénédiction.

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