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dimanche 17 novembre 2024

Le figuier guérisseur?

 


Le figuier peut-il guérir? La pauvreté peut-elle guérir? Etrange interrogation, mais il le fait regardez sur la toile. Quant à la pauvreté, elle peut avoir des vertus, mais le Seigneur nous demande d'être attentifs aux pauvres aujourd'hui.

17 novembre 2024  33ème dimanche du Temps Ordinaire  Année B

Lectures de la messe

Première lecture« En ce temps-ci, ton peuple sera délivré »Dn 12, 1-3

Psaume Garde-moi, mon Dieu,

j’ai fait de toi mon refuge.Ps 15 (16), 5.8, 9-1...

Deuxième lecture« Par son unique offrande, il a mené pour toujours à leur perfection c...He 10, 11-14.18

Évangile« Il rassemblera les élus des quatre coins du monde »Mc 13, 24-32

Mes sœurs, chers frères et sœurs,

Nous venons d’entendre un ensemble de lectures qui annoncent la fin de l’année liturgique et la fin du monde. Ce peut-être une occasion de nous intéresser à la cosmologie biblique et à ce qu’on en dit et pourrait en dire aujourd’hui, avec l’expansion depuis son émergence, d’un univers  qui se dirigerait vers sa mort thermique d’ici 101100  années… Ce n’est pas notre propos. Nous verrons cela depuis le cœur de Dieu. Le livre de Daniel nous décrit une apocalypse, avec Michel, l’archange dont le nom signifie qui est comme Dieu. Il vient pour délivrer le Peuple et lui rendre liberté et joie, dans une perspective d’un jugement dernier centré sur la fidélité et l’amour. Les récits bibliques des représentations de l’origine du monde dans ce qu’on appelle des cosmogonies, ont oscillées pour se rapprocher de conceptions de la Grèce antique. L’image de la fin des temps que donne le Seigneur correspondrait plutôt à un écroulement physique d’un dôme et de ses luminaires dont la terre serait le centre. « On verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire. Il enverra les anges pour rassembler les élus des quatre coins du monde, depuis l’extrémité de la terre jusqu’à l’extrémité du ciel. » Le monde d’en bas n’est pas mentionné, celui qui est sous la terre. Il y a de quoi inciter à prendre ses distances avec des interprétations littérales et à se concentrer avant tout sur les paroles du Seigneur qui ne passeront pas .

L’épître aux Hébreux nous dresse une image du Seigneur comme le Grand-Prêtre sans péché, qui n’offre qu’un seul sacrifice, une fois pour toutes, debout sur la croix et qui ensuite s’assied à la droite du Père. « Par droite du Père dit le catéchisme, nous entendons la gloire et l’honneur de la divinité, où celui qui existait comme Fils de Dieu avant tous les siècles comme Dieu et consubstantiel au Père, s’est assis corporellement après qu’il s’est incarné et que sa chair a été glorifiée " (S. Jean Damascène, f. o. 4, 2 : PG 94, 1104C). 664  La session à la droite du Père signifie l’inauguration du règne du Messie, accomplissement de la vision du prophète Daniel concernant le Fils de l’homme. » Il avait dit devant le Sanhédrin : « En tout cas, je vous le déclare : désormais vous verrez le Fils de l’homme siéger à la droite du Tout-Puissant et venir sur les nuées du ciel. » Mt 26, 64. Les paroles de Jésus dans l’Evangile sont bien mystérieuses. Il paraît rapprocher deux moments :  Son heure avec celle de son retour en gloire « Alors on verra le Fils de l’homme venir dans les nuées avec grande puissance et avec gloire. » S’agit-il d’une invitation à se tenir toujours prêt au retour du Seigneur ? Nous pouvons le penser et y voir en même temps une invitation à se montrer attentif aux interpellations qu’il nous donne dans le temps présent, parce que le fameux jugement sur l’amour, c’est maintenant qu’il a lieu. Où voir les bourgeons de ce figuier ? Pourquoi pas dans le pauvre… Qui est-il ? de quoi a-t-il besoin ?

Jésus s’est fait pauvre et le jugement s’est réalisé dans la manière dont on a traité ce pauvre qu’il était. N’est-ce pas une particularité chrétienne particulière que cette révélation d’un Dieu discret, d’un Dieu qui se cache et se révèle dans l’autre dans notre prochain. Révélation de Dieu, il y a bien en la personne de Jésus. Elle est totale, mais d’une impressionnante discrétion. Il est tellement discret, que nous sommes contraints à chaque instant de retrouver la Présence divine, de retrouver le visage de Dieu, de reprendre contact avec le Seigneur, de le deviner. Il est pourtant totalement-là. Curieux contrastes… Un messie glorieux et un pauvre. Y aurait-il une porte dans la pauvreté, une face cachée ? Ne serait-elle pas la porte de l’Amour, la porte du ciel ?

Le pape François ayant voulu que ce dimanche soit consacré aux pauvres, vous me permettrez de rappeler en ce dimanche de la revira de la Saint-Martin, l’épisode de Saint Martin partageant son manteau. Il est relaté par un proche, son secrétaire et ami, Sulpice Sévère, ami aussi de Paulin de Noles. Ce dernier était un richissime ressortissant d’Aquitaine qui avait distribué son immense fortune aux pauvres. On pouvait être fou à cette époque aussi : « Un jour, au milieu d’un hiver dont les rigueurs extraordinaires avaient fait périr beaucoup de personnes, Martin, n’ayant que ses armes et son manteau de soldat, rencontra à la porte d’Amiens un pauvre presque nu. L’homme de Dieu, voyant ce malheureux implorer vainement la charité des passants qui s’éloignaient sans pitié, comprit que c’était à lui que Dieu l’avait réservé. Il tire son épée, le coupe en deux, en donne la moitié au pauvre et se revêt du reste. Quelques spectateurs se mirent à rire en voyant ce vêtement informe et mutilé… Martin s’étant endormi vit Jésus-Christ revêtu de la moitié du manteau dont il avait couvert la nudité du pauvre ; et il entendit une voix qui lui ordonnait de considérer attentivement le Seigneur et de reconnaître le vêtement qu’il lui avait donné. Puis Jésus se tournant vers les anges qui l’entouraient leur dit d’une voix haute : « Martin n’étant encore que catéchumène m’a revêtu de ce manteau. » Derrière et en tous ces visages et  il y a Quelqu’un, il y a un autre, le tout autre qui a fait une alliance avec lui. Il y a une présence qui est la présence de Dieu, il y a un visage qui est le visage de l’éternel Amour, et c’est cela qu’il s’agit de retrouver. Et figurez-vous qu’Il est en chacun de nous. On a si vite fait de l’oublier à la moindre contradiction.

Je me permets ce matin encore une citation du pape François qui nous rappelle qu’il n’y a pas que la pauvreté n’est pas présente dans la seule absence de bien : « la pire discrimination dont souffrent les pauvres est le manque d’attention spirituelle. L’immense majorité des pauvres a une ouverture particulière à la foi ; ils ont besoin de Dieu et nous ne pouvons pas négliger de leur offrir son amitié, sa bénédiction, sa Parole, la célébration des Sacrements et la proposition d’un chemin de croissance et de maturation dans la foi. L’option préférentielle pour les pauvres doit se traduire principalement par une attention religieuse privilégiée et prioritaire ».

Marie est profondément marquée par l'esprit des «pauvres de Yahvé» qui, selon la prière des psaumes, attendaient de Dieu leur salut et mettaient en lui toute leur confiance. Elle proclame l'avènement du mystère du salut, la venue du «Messie des pauvres». Elle est la Mère de tous les pauvres et en particulier de chacun d’entre nous. Marie Servante du Seigneur, prie pour nous, pécheurs. Amen.


dimanche 3 novembre 2024

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur




 3 novembre 2024 -  31ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine III du Psautier) — Année B

Lectures de la messe

Première lecture« Écoute, Israël : Tu aimeras le Seigneur de tout ton cœur »Dt 6, 2-6 

Psaume Je t’aime, Seigneur, ma force.Ps 17 (18), 2-3, 4, ...

Deuxième lecture« Jésus, parce qu’il demeure pour l’éternité, possède un sacerdoce qui...He 7, 23-28

Évangile« Tu aimeras le Seigneur ton Dieu. Tu aimeras ton prochain »Mc 12, 28b-34

Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. Tu aimeras ton prochain comme toi-même.

Ces deux commandements sont semblables et la réponse du Seigneur provoque l’admiration et un compliment du scribe. Le Seigneur le lui rend, en admirant sa propre réponse. L’expression « aimer Dieu »  appartient surtout au Deutéronome; elle est plus rare dans les autres livres, il nous habitue à une terminologie parallèle, comme celle de la «crainte de Dieu», du «service», de la «recherche de la face de Dieu», de la «fidélité».

C'est un passage si important qu'il a été inséré dans ce qui est appelé le Schema Israël, récité chaque jour par le juif pieux, encore de nos jours. Repris par le Seigneur ce texte mérite  toute notre attention, c’est évident. Il nous rappelle notre racine Israélite. L’amour du prochain est aussi présent dans le Lévitique. Il est bon de rappeler des évidences en certaines circonstances. Le Seigneur conclut : « Tu n’es pas loin du royaume de Dieu. » Que lui manque-t-il donc ? nous pouvons penser qu’il s’agit de reconnaître en Jésus le Messie.

L’épître aux Hébreux met en valeur son importance centrale comme prêtre. A l’Ascension, Jésus remonte auprès de son Père et il est pour toujours notre intercesseur auprès de lui.  Les prêtres dans la lignée d’Aaron ne pouvaient intercéder que pour un temps déterminé, celui de leur vie. Mais Jésus, lui, parce qu’il demeure auprès de son Père pour l’éternité, possède un sacerdoce qui ne passe pas. Toutefois, nous pouvons remarquer qu’il a aussi institué un sacerdoce nouveau, dans lequel nous agissons, pour demeurer présent au milieu  de nous, dans notre temporalité, par les sacrements et un mode de présence particulier dans les communautés.  Je me permets d’insister sur le fait que le Seigneur passe par la matière. Il a eu un vrai corps, qui est ressuscité et qui est entré dans la gloire. Comme prêtre, il transforme par notre intermédiaire le pain et le vin en son corps et son sang. La matière est extrêmement importante dans notre état d’hommes, d’humain. Nous sommes corps et âme, dotés d’un corps qui ressuscitera. Dieu se rend présent sous les apparences du pain et du vin. Nous ne sommes pas spiritualistes comme le veut l’air du temps.

Il y a une autre forme de sacerdoce, celui des baptisés et une seconde, pour ce temps de la vie humaine, le sacerdoce ministériel. Le synode sur la synodalité a invité à revoir la formation des ministres ordonnés, mais pas à se passer de ce qui est un don du Seigneur à son Église. L'Assemblée a demandé une révision de la ratio Fundamentalis Institutionis Sacerdotali, un peu de latin fait du bien. C’est autrement dit le décret sur la formation des prêtres. Les manières de procéder diffèrent selon les régions, les pays et les continents. Il s’agit d’intégrer les demandes développées au Synode, pour les traduire en indications précises pour l’entraînement à la synodalité. Il mentionne notamment les présences féminines dans le parcours de formation qui devrait susciter chez les candidats la passion pour la mission. Il s’agit d’une course de fond, destinée à avoir un effet sur le long terme. Ce type de mesure n’en est pas  moins nécessaire dans la formation des évêques, précise le document en italien, afin qu'ils puissent assumer toujours plus leur mission de combiner dans l'unité les dons de l'Esprit et d'exercer de manière synodale l'autorité qui leur est conférée. Le style de la formation synodale implique que la dimension œcuménique soit présente dans tous les aspects des chemins vers le ministère ordonné.

Je crois que cela est suffisant sur ce sujet. Les retraités ne sont pas dispensés de s’adapter  le bateau de l’Eglise dans sa navigation vers le Royaume et notre entrée personnelle. 

N’est-ce pas la finalité ? « Il s’agit donc pour nous, dans notre vie, de donner à l’Église le visage de Jésus, de donner à notre visage, la lumière du visage de Jésus, de témoigner de Jésus en laissant transparaître sa Présence en nous afin qu’apparaisse à tous les hommes le visage de fête du Christ Jésus. » (Zundel)

Le moment le plus déterminant de notre vie sera celui de notre rencontre avec le Seigneur et nous ne pouvons en cette période de l’année que nous interroger sur ce qu’elle va être. S’agira-t-il d’une lumière au bout d’un tunnel ? Comment est-ce que ce sera lorsque nous serons près de lui ? Le sujet ne manque pas d’intérêt… Il n’y aura plus de temps ni d’espace, tout sera présent, mais de quel présent et de quelle présence au singulier, de quelles présences au pluriel, s’agira-t-il ? Lorsque nous regardons simplement l’immensité du ciel, le nombre des étoiles avec les moyens dont nous disposons aujourd’hui, et que nous pensons simplement au nombre de personnes humaines d’aujourd’hui, plus de 8 milliards… Quels points d’interrogations ? Jésus ressuscité est la réponse. Il nous fait relativiser nos problématiques et nos avoirs personnels, grands ou modestes. La seule grande question sera celle de l’amour, comment aurons-nous aimé le Seigneur et le Seigneur dans notre prochain en particulier.

Nous avons rappelé lors de la Toussaint que Jésus nous montre un chemin, celui de l'amour, qu'il a lui-même parcouru d'abord en se faisant homme, et qui est pour nous à la fois un don de Dieu et notre réponse. Cadeau et réponse.

C'est un don de Dieu, car, comme le dit saint Paul, c'est Lui qui sanctifie (voir 1 Co 6, 11). Et c'est pour cela que c'est avant tout au Seigneur que nous demandons de nous faire saints, de rendre nos cœurs semblables au sien (voir Lettre encyclique Dilexit nos, 168). Avec sa grâce, il nous guérit et nous libère de tout ce qui nous empêche d'aimer comme il nous aime (voir Jean 13, 34), de sorte qu'en nous, comme le dit le bienheureux Carlo Acutis, il y a toujours « moins de moi pour laisser de la place à Dieu." Là, je cite le Pape François.

Et tout cela dans quel but ? devenir saints. Le Père des cieux nous invite à devenir saints. Il ne force personne, il n’impose pas.

Si Dieu voulait imposer sa présence, il ne se cacherait pas comme il le fait depuis la création du monde, comme selon l’Ecriture, il l’a fait au paradis. Il se montrerait et se manifesterait plus clairement. Or, il se laisse juste deviner… Il se fait reconnaître par l’intérieur, par le cœur. Il se laisse deviner dans l’obscurité. L’Esprit-Saint agit dans nos cœurs parce que le Seigneur intercède continuellement auprès de son Père pour nous l’envoyer.

Aux funérailles du cher chanoine Jacques Oeuvray, Marc Donzé, le grand spécialiste de Maurice Zundel est venu à Porrentruy. J’ai vu qu’il a publié sur le site qu’il a consacré à ce mystique , une vidéo au titre parlant : « il nous faut changer de Dieu ». C’est un Dieu caché, humble et petit qui vient naître en nous pour nous introduire dans sa lumière. Quant au reste, aux images de grandeur, elles ne durent qu’un temps. Même pour les vedettes de cinéma et de la chanson, la chirurgie esthétique, les pommades ne suffisent plus et les feux de la rampe s’éteignent. Ce qui compte avant tout, c’est ce feu qui brûle dans les cœurs. Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute âme et de toute ta force et ton prochain comme toi-même.

Marie apprends nous à démissionner des fausses images de Dieu et de ton fils qui nous habitent et que nous transmettons. Amen.

dimanche 4 août 2024

Le Pain de Vie

 




4 août 2024 -  18ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine II du Psautier) — Année B

 Lectures de la messe

Première lecture« Du ciel, je vais faire pleuvoir du pain pour vous »Ex 16, 2-4.12-15

PsaumeLe Seigneur donne le pain du ciel !Ps 77 (78), 3.4ac, ...

Deuxième lecture« Revêtez-vous de l’homme nouveau, créé selon Dieu »Ep 4, 17.20-24

Évangile« Celui qui vient à moi n’aura jamais faim, celui qui croit en moi n’a...Jn 6, 24-35

Homélie

Chers Frères et Sœurs,

L’Evangile d’aujourd’hui nous est cher et connu. Le chapitre 6 de saint Jean est un enseignement qui se conclut sur le thème du Pain de vie. 

La première partie du chapitre entendu dimanche dernier était centré sur une extraordinaire multiplication des pains et des poissons sur l’autre rive du lac. Pour accompagner cette multiplication, comme nous fêtons aussi le saint Curé d’Ars aujourd’hui, je vous rappelle un de ses miracles qui eut lieu à La Providence, un orphelinat d’une soixantaine de filles qu’il avait fondé . La réserve de blé pour les orphelines étant épuisée,  l'abbé Vianney ne voulant pas renvoyer les enfants, il les a fait prier pour demander le pain quotidien. Les derniers grains du grenier se multiplient et le remplissent à raz bord. Voilà une fioretti qui fait du bien. 

La deuxième partie de notre chapitre rapporte une tempête que Jésus apaise en venant à la rencontre de ses disciples en marchant sur les eaux. La symbolique impressionne encore certains journalistes dans les concours de natation olympique. Mais non , « Ils ne marchent pas sur les eaux. » Ce n’est pas la même chose. La mer symbolise plutôt la mort dans le judaïsme ancien, et l’arrivée sur l’autre rive, la vie éternelle. 

Le discours sur le pain de vie est en quelque sorte la clef que le Seigneur nous donne pour nous permettre de comprendre que nous avons avec ce pain qu’il est lui-même, le moyen d’effectuer notre traversée de la vie avec lui et grâce à lui.

Jésus pose aujourd’hui un jalon important qui devrait permettre à ceux qui le suivent de pouvoir le faire jusqu’au bout du chemin, de parvenir au cœur de la vie trinitaire. Les personnes divines se donnent à elles-mêmes totalement dans un unique élan d’amour, un circuit d’amour. Elles veulent le partager. Le Seigneur nous invite à vivre les deux fameux commandements fondamentaux de l’amour de Dieu et du prochain pour y participer. Cet amour est au cœur de la communion avec lui. Rappelons qu’il passe aussi  par l’amour de soi. Nous devons nous aimer nous-mêmes, en allant jusqu’au don de nous-mêmes, à l’image du Christ et en nous respectant. Notre plus grand bonheur, au dernier jour sera de pouvoir partager cet amour de Dieu et de vivre en lui. Cet amour nous permettra aussi de partager le bonheur de tous ceux que nous avons aimé et que sommes appelés à rencontrer. Que de découvertes aussi, mais également d’invitations à un pardon nécessaire.

Le but étant rappelé, nous parvenons peut-être à mieux entrer dans l’approche de Jésus. Il veut faire comprendre à ses disciples et aux foules qui le suivent que leur souci ne doit pas se focaliser sur la seule nourriture qui nous soutient en cette vie. « Travaillez non pas pour la nourriture qui se perd, mais pour la nourriture qui demeure jusque dans la vie éternelle » 

Même en période de vacances, ça n’est toutefois pas une petite affaire. La révolte des Hébreux dans le désert est pour le moins significative. On a cherché plusieurs explications sur la manne. La plus connue serait celle d’un exsudat du tamaris. Je vous laisse chercher sur la toile. 

Ce pain du désert et notre pain matériel sont liés à la vie. Jésus veut essayer de faire comprendre que le but de notre chemin comme celui des Hébreux est la terre promise, c’est-à-dire la vie éternelle avec Dieu et en Dieu. Ce chemin n’est pas celui d’un voyage tranquille par les airs avec un bon hôtel tout confort à l’arrivée, sans détournement d’avion. Le voyage s’effectue sur une barque secouée par la tempête et les orages. 

Il est difficile de suivre Jésus. Saint Paul nous invite à imiter les athlètes, mais pour un autre but qu’eux : « Tous les athlètes à l’entraînement s’imposent une discipline sévère ; ils le font pour recevoir une couronne de laurier qui va se faner, et nous, pour une couronne qui ne se fane pas. » 

A moins d’un regard simpliste, ce que le Seigneur demande paraît mystérieux et difficile : « L’œuvre de Dieu, c’est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé. » 

La prière du Seigneur, le Notre Père, nous parle du pain. Le pain peut être compris comme notre nourriture quotidienne, mais aussi l’Eucharistie et également la volonté du Père : Le Seigneur après sa rencontre avec la Samaritaine avait répondu à ses disciples qui l’invitaient à manger : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de Celui qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre. » 

Cette œuvre, « faire la volonté du Père », veut dire grandir dans l’amour, aimer comme Jésus, avec lui par lui et en lui. Cette oeuvre peut être vécue autant par un ermite comme notre cher Nicolas de Flüe, que dans une manifestation d’amour et d’entraide envers nos frères. Il a vécu si longtemps de l’Eucharistie ! Il a manifesté son amour de Dieu et de ses frères en suivant l’appel qu’il avait reçu. 

Le pape François nous a dit dans Fratelli Tutti (Tous Frères), « qu’il existe des manières de vivre la foi qui favorisent l’ouverture du cœur aux frères ; et celle-ci sera la garantie d’une authentique ouverture à Dieu. »

Le Seigneur nous invite à la confiance, surtout et d’abord ! 

Une question que nous pourrions nous poser : Quel est l’appel que j’ai reçu ? Est-ce que je le vis avec Jésus ? Quel est mon rapport à l’Eucharistie ? Est-elle pour moi le Pain de vie ? 

Marie : « Sème dans notre foi la joie du Ressuscité. Rappelle-nous que celui qui croit n’est jamais seul. Enseigne-nous à regarder avec les yeux de Jésus, pour qu’il soit lumière sur notre chemin. Et que cette lumière de la foi grandisse toujours en nous jusqu’à ce qu’arrive ce jour sans couchant, qui est le Christ lui-même, ton Fils, notre Seigneur ! » Amen.


dimanche 21 juillet 2024

La compassion de Jésus pour les foules

 

Gauguin : D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?

21 JUILLET 2024 - 16ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine IV du Psautier) — Année B

Lectures de la messe

Première lecture« Je ramènerai le reste de mes brebis, je susciterai pour elles des pa...Jr 23, 1-6
Psaume Le Seigneur est mon berger : rien ne saurait me manquer. Ps 22 (23), 1-2ab, 2... 
Deuxième lecture « Le Christ est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait... Ep 2, 13-18 Évangile« Ils étaient comme des brebis sans berger »Mc 6, 30-34

Chers Frères et Sœurs,

Quelle est votre réaction après la lecture de cet Evangile. Comme il m’arrive d’avoir l’esprit taquin, je me suis dit dans un premier temps, à qui dois-je obéir et qui imiter ? Le Pape François ou Jésus ? Le Pape François nous dit de prêcher brièvement, mais Jésus se met à instruire longuement les foules. Est-ce que je vais leur infliger un sermon avec des citations, des virgules, des guillemets, un peu de sauce latine, du byzantin, et autre ? Qui faut-il plaindre ? Les foules ou les apôtres qui devaient être fatigués après leurs premières courses pastorales ? Est-ce que Jésus avait pris des vacances pendant que ses disciples étaient allés prêcher ? Les foules en redemandaient… 

Mais pourquoi étaient-ils venus ? Est-ce qu’ils voulaient des miracles, des guérisons, des résurrections, des démons envoyés au fond du lac ? Est-ce que Jésus avait une voix belle et si puissante que des milliers de personnes pouvaient l’entendre sans micro ? Quand nous entendons les chanteurs et orchestres de l’été avec des sonos et des accords fabuleux… on peut comprendre. Mais écouter un sermon de deux ou trois heures, il faut des coussins et de quoi faire la sieste normalement.

Pourtant l’Evangile est clair : Il fut saisi de compassion envers eux, parce qu’ils étaient comme des brebis sans berger. Alors, il se mit à les enseigner longuement.

Qu’avait donc Jésus pour attirer ainsi les foules ? Était-ce en raison de sa personnalité ? Il devait attirer la sympathie, mais il s’était tu pendant 30 ans à Nazareth. Qu’est-ce qui leur manquait ? Ces foules étaient comme des brebis sans berger. En parcourant les Evangiles, on lit dans les Synoptiques, Matthieu, Marc et Luc : « On était frappé par son enseignement, car il enseignait en homme qui a autorité, et non pas comme les scribes. » Comme elles nous ne savons pas très bien où nous allons et nous cherchons un peu de lumière, un guide, des indications. S’agit-il de résoudre un problème de santé, ce qui est déjà important, ou de trouver un sens global notre vie ? Nous connaissons le mot de Coluche Qui suis-je ou vais-je, dans quel état j’erre… ou la toile de Gauguin : D'où venons-nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ?

Les gens se rassemblaient pour ces motifs autour de Jésus, mais aussi en raison des signes qu’il donnait. Ils se sentaient sécurises. Les signes sont-ils la seule cause ? C’est un peu la problématique lorsqu’on court après le merveilleux et les signes extraordinaires. Si une parole est dite et qu’elle se réalise, on a l’impression d’être enfin sous le parapluie atomique ; surtout lorsqu’on est à genoux ou en prière avec telles formules ou dans de telles conditions, à tel endroit. En résumé, c’est presque Le salut pour moi et peut-être pour ceux qui réagissent comme moi. 

Si quelqu’un pose une affirmation de manière forte et bien timbrée en disant : On vous a dit telle chose, et bien moi, je vous dis ceci… et qu’il promet des lendemains qui chantent, avec même des signes, l’argument est fort. L’Ecriture nous met toutefois en garde contre le singe de Dieu. Un bon orateur, simplement, peut enthousiasmer et manipuler des foules. Il existe des techniques pour cela, depuis l’antiquité jusqu’à aujourd’hui et les gens en redemandent. Un politicien épluche normalement les manuels et prend quelques cours d’expression orale et d’art oratoire, même pour une élection expresse. Fidel Castro avait parlé 269 minutes à l’ONU et dans son île 7h15 minutes sans interruption… Ca n’est pas si loin. Le Seigneur ça n’était pas cela et  les apôtres avaient étrangement vite fait d’oublier ou n’écoutaient pas. Les courses au poste les rendaient peut-être sourds.  

Dans ce repas au menu spirituel, servi par Jésus, quelle est la nourriture qu’il donne à ses auditeurs? Qu’il nous donne ? Ce sont le sermon sur la montagne, les béatitudes, les paraboles ; il leur enseigne l’amour de Dieu et du prochain dans le détail, dans la réalité et pas seulement de manière globale. Il leur apprend ce qu’est la volonté du Père, la loi de cet amour qui est au cœur de la vie trinitaire. Quelles sont les réactions lors de la mise en pratique aujourd’hui? Cet amour devrait rayonner autour de nous, y compris durant dans nos vacances.

Au final, lors de la passion, même les signes donnés ne serviront plus à rien, voilà que l’autorité de Jésus paraît disparaître et presque tout le monde se sauve, sauf Marie les femmes et Jean. Que reste-t-il ? Il restera le dernier signe, celui de la Résurrection, donné à quelques-uns seulement et la foi capable de voir dans l’obscurité. 

Le berger est parti, mais il nous a laissé des tables de la nourriture, un menu et des serviteurs. Ses immenses sermons, ils ne sont plus là. « 25 Il y a encore beaucoup d’autres choses que Jésus a faites ; et s’il fallait écrire chacune d’elles, je pense que le monde entier ne suffirait pas pour contenir les livres que l’on écrirait. », dit saint Jean à la fin de son Evangile. Ils témoignaient de sa compassion pour ces foules. Elle est la même pour nous aujourd’hui. Il nous écoute, il nous encourage, il est patient, doux et humble de cœur. Le Seigneur nous a laissés  l’Eucharistie et les Ecritures, avec le don de l’Esprit-Saint et les apôtres. L’apocalypse parle d’un petit livre qui est mangé et a un goût de miel dans la bouche, mais dont la digestion est difficile. Nous y voyons l’Evangile vécu dans le quotidien. Ce petit livre doit nous suffire pour notre traversée, nous pourrions le relire pendant ce temps de l’été. Il n’est pas nécessaire de reprendre une édition complète de saint Augustin en 34 gros volumes, de Jean Chrysostome, de Bossuet ou même tout le cher abbé Maurice Zundel, 7 volumes édités actuellement. Est-ce que, durant cet été,  nous ne pourrions pas nous faire aussi un petit résumé intérieur de ce que nous avons vécu avec Jésus?

Contentez-vous du petit livre de l’Evangile et du vôtre avec lui, ce qu’il vous a enseigné personnellement en vous parlant au cœur. Mettez-vous à l’écoute de l’Esprit-Saint dans votre cœur, avec Marie. L’Esprit vient combler notre cœur et nous conformer à Jésus. Il vient nous apprendre à aimer comme Jésus. Ne nous trompons pas cependant. Jésus dit bien dans l’Evangile de Saint Jean  : « 12 J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais pour l’instant vous ne pouvez pas les porter. 13 Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière. » Il nous parle dans notre cœur et dans nos frères.

Nous terminons avec un mot du pape François qui nous demande de prier pour la paix :  « Je vous exhorte à vous tourner vers Marie comme signe de consolation et d’espérance certaine, visage maternel de Dieu et demeure où se réfugier. Elle nous offre en effet constamment son Fils comme unique source de concorde, d’espérance de salut, de voie pour la paix, impératif absolu de la recherche humaine. »  Amen.


dimanche 30 juin 2024

La fille de Jaïre

 


Source de l'Image : https://www.mbam.qc.ca/fr/oeuvres/7234/ 


30 JUIN 2024 -  13ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine I du psautier) — Année B

Lectures de la messe

Première lecture« C’est par la jalousie du diable que la mort est entrée dans le monde...Sg 1, 13-15 ; 2, 23-...

Psaume Je t’exalte, Seigneur : tu m’as relevé.29 (30), 2.4, 5-6ab,...

Deuxième lecture« Ce que vous avez en abondance comblera les besoins des frères pauvre...2Co 8, 7.9.13-15

Évangile « Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! »Mc 5, 21-43

Introduction

Chers Frères et Sœurs,

Bienvenue pour célébrer ce 13e dimanche du temps ordinaire. Il est un peu particulier en raison du slowup et des émotions sportives d’hier, Sur nos monts quand le Soleil a soufflé la Vittoria de Nessun Dorma.  

Jésus donne aujourd’hui dans la discrétion un grand signe annonçant à ses proches disciples sa résurrection. Il nous montre l’importance fondamentale de la foi en lui en accueillant la souffrance de parents qui perdent leur enfant. La question du pourquoi de la souffrance reste pourtant bien un mystère. Il y répond en la prenant sur lui.

Homélie 13e dimanche TOB 30 juin 2024

« Talitha koum » - « Jeune fille, je te le dis, lève-toi! »

Chers Frères et Sœurs,

Saint Marc nous parle du ministère de Jésus centré autour du lac de Tibériade. Il y prêche, donne ses paraboles, fait des miracles, et se déplace dans de fréquents aller et retour. Ayant eu une expérience lacustre de 20 ans sur les bords du Léman, je ne peux qu’être sensible à cet environnement, tout comme à celui de nos autres lacs de Romandie en particulier, dont celui de Bienne notre lac du Jura Pastoral. La semaine passée, à la Neuveville, Jésus a arrêté la tempête en commandant aux vents de s’apaiser. Vous vous souvenez de l’interrogation des disciples. « Quel est donc celui-ci, à qui obéissent même le vent et la mer? ». Une prière pour la paix…

Cet environnement lacustre vient nous rappeler que l’eau n’est pas nécessairement symbole de vie chez les Juifs, mais de mort. Le baptême aussi  nous plonge dans la mort du Christ, pour ressusciter avec lui. Dans la symbolique, atteindre le rivage, c’est fréquemment, y compris chez Saint Jean, parvenir à la vie éternelle, rencontrer le Christ ressuscité. 

Jésus va plus loin encore aujourd’hui et commence par guérir une femme atteinte d’hémorroïsse. Il rend ensuite à la vie cette petite dont le père et la mère sont profondément peinés. Il s’agit bien d’une annonce de la résurrection de Jésus qui est donnée dans ce signe. Il est entouré par les trois futurs piliers, Pierre, Jacques et Jean, mais il demande la discrétion jusqu’à la sienne. Nous pensons aussi Lazare que Jésus appela hors du tombeau et qui a provoqué la colère des tenants de l’autorité religieuse.

Ce geste de Jésus rendant la vie à cette petite fille ne peut que toucher. La perte d’un enfant par des parents est certainement l’épreuve la plus douloureuse qu’ils puissent traverser. La phrase qui revient le plus fréquemment à une telle occasion en ministère est celle-ci : Vous ne pouvez pas comprendre. Les premiers sentiments sont ceux de la douleur, de la plus profonde injustice et de la révolte. Même si nous connaissons mieux aujourd’hui le processus psychologique du deuil, la douleur est bien là. 

Saint Marc, habituellement vu comme très proche de Pierre, a montré l’attention de Jésus envers les femmes en guérissant d’abord la belle-mère de Pierre, c’était la première guérison de son ministère. Aujourd’hui, avant de rendre la vie à cette petite-fille et à ses parents, il a guéri une autre femme atteinte d’hémorroïsse. Sa maladie lui faisait perdre son sang et la mettait en état d’impureté rituelle selon les conceptions de l’époque. Elle devait se tenir en retrait de la communauté en prière. Jésus lui permet de la réintégrer. Nous sommes aussi sensibles à l’attention que Jésus a envers elle en raison de sa condition de femme et à son rapport avec le don de la vie. Elle est touchée physiquement en un endroit d’elle-même qui accueille la vie au commencement. Le pire des ingrats, des sots ou des sottes ne peut oublier celle qui l’a mis au monde. L’attitude religieuse envers cette femme paraît aberrante aujourd’hui. 

Face à ces 2 exemples, quelle est notre perception de la souffrance et de l’obscurité qui l’entoure ? Le cheminement de Dieu et l’évolution de sa relation avec nous et en nous est des plus mystérieux et nous rend pour le moins perplexe. Je crois que nous dirions à peu près tous, j’aurais fait autrement, si j’avais été Lui… En nos temps d’automatisation, d’informatique et maintenant d’intelligence artificielle c’est encore pire qu’il y 30 ans. 

Nous nous sentons tellement petits, limités et emprisonnés dans nos limites matérielles ! L’auteur du livre de la Sagesse paraît aussi déconcerté que nous dans ses tâtonnements. Comment allez-vous expliquer à votre petit dernier  ou à l’avant-dernière plus savante le début de son propos. « Dieu n’a pas fait la mort, et il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. » L’original du modèle réduit du Tyrannosaure Rex qu’ils ont devant eux avait environ 58 dents bien aiguisées de 30 cm, signe d’un appétit assez extraordinaire. Il est mieux d’écarter les interprétations littérales. 

Ce qu’il y a de plus mystérieux encore c’est que Jésus, c’est que Dieu ait pris un corps et une âme humaine et qu’il se soit fait l’un de nous.

La deuxième partie nous parle peut-être davantage : « Dieu a créé l’homme pour l’incorruptibilité, il a fait de lui une image de sa propre identité. » 

Le centre de nos lectures est bien le don de la vie qui est vie éternelle. Dieu nous a voulus pour nous-même et pour demeurer toujours avec lui. Nous pouvons nous appuyer sur l’Evangile de la vie de saint Jean-Paul II qui cite le début de notre passage du livre de la Sagesse.  « L'Évangile de la vie, proclamé à l'origine avec la création de l'homme à l'image de Dieu en vue d'un destin de vie pleine et parfaite (cf. Gn 2, 7; Sg 9, 2-3), fut contredit par l'expérience déchirante de la mort qui entre dans le monde et qui jette l'ombre du non-sens sur toute l'existence de l'homme. » 

Ces développements donnent un peu de lumière, à une  certaine obscurité qui entoure le ministère de Jésus. Il est la lumière et nous montre un chemin particulier dans ce brouillard et parfois dans cette nuit obscure, celui de la foi. Jésus veut nous le voir prendre pour atteindre le rivage de notre vie avec les moyens que nous a indiqué Saint Paul. « Puisque vous avez tout en abondance, la foi, la Parole, la connaissance de Dieu, toute sorte d’empressement et l’amour qui vous vient de nous, qu’il y ait aussi abondance dans votre don généreux ! » Nous avons donc des moyens pour accomplir cette traversée, la foi, la parole, la connaissance de Dieu et la charité. Elles vont, toutes au féminin, nous conduire au port de la vie éternelle, au port de la volonté de Dieu qui est amour. 

Le Pape François nous rappelait un élément important hier lors de la fête des saints apôtres Pierre et Paul, c’est la nécessité de croire en l’action de Dieu dans nos vies. Tout ne se fait pas à la force du poignet. Une porte doit être ouverte. Nous allons bientôt célébrer une année sainte qui commencera par l’ouverture de la fameuse porte. C’est Dieu qui ouvre la porte, c’est Lui qui libère et ouvre le chemin. Il nous donne par l’Esprit la clef de la compréhension de l’Ecriture, de sa parole. L’Esprit fait croître la charité. Marie Reine des Apôtres obtiens pour nous l’Esprit de ton Fils. Amen.   



dimanche 23 juin 2024

La tempête apaisée

 



23 JUIN 2024

 12ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine IV du Psautier) — Année B

Première lecture« Ici s’arrêtera l’orgueil de tes flots ! »Jb 38, 1.8-11

PsaumeRendez grâce au Seigneur : Il est bon !
Éternel est son amour ! 

 Alléluia !106 (107), 21a.22a.2...

Deuxième lecture« Un monde nouveau est déjà né »2 Co 5, 14-17

Évangile« Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéis...Mc 4, 35-41

Ce sont plutôt des notes d'homélie, vu qu'iol y a eu passablement d'improvisations et des raccourcis.


Chers Frères et Sœurs,

J’ai donc la chance de venir célébrer chez vous au bord de votre lac avec un Évangile qui ne peut que vous parler. Ayant passé pour ma part de nombreuses années, une vingtaine, sur les bords valaisans du Léman, au Collège et dans un monastère, je ne puis que l’apprécier. Lorsque venait la tempête, c’était tout un spectacle, mais mieux valait se tenir à bonne distance. Parfois un voilier se faisait prendre. Un bol d'or provoqué aussi des chavirages impressionnants.

Aujourd’hui nous sommes impressionnés par cet Evangile pour diverses raison. Un vent violent vient brusquement du désert et secoue la bateau. Le Seigneur savait pourtant bien ce qui allait arriver, mais il dit lui-même à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. ». Et voilà qu’il s’endort épuisé, à l’avant du bateau. Il est fatigué par son ministère et les apôtres aussi. Le contexte symbolique n’est pas trop difficile à décrypter, accompagné par les autres lectures que nous avons entendues, ainsi que le psaume 106. Il était déjà présent dans la liturgie des heures d’hier.

Le lac et l’eau n’avaient pas bonne presse dans la mentalité du peuple juif qui n’était pas un peuple de marin. Les eaux représentaient la mort, ce qui relève de l’évidence aujourd’hui. Ils avaient peur d’être engloutis. Ils avaient vu les miracles accomplis par Jésus, entendu ses belles paroles de vie. Voilà que surgissent le danger de périr noyés et la mort. Que fait-il ? Il dort. Il devait être vraiment très fatigué.

Les paroles étonnées des apôtres sont des plus directes : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? ». Jésus ordonne au vent de se calmer. N’est-ce pas le psaume ? Il parle, et provoque la tempête, puis il réduit la tempête au silence, fait taire les vagues. Notre première surprise réside dans le fait qu’il réussit à crier dans la tempête et à se faire entendre. Un chanteur d’opéra arrive à 120 décibels, mais une tempête étouffe tout. Ce qu’il y a de surprenant aussi, c’est l’efficacité de sa voix qui ne peut que nous ramener à la puissance de l’action de Dieu et à la création au commencement.

Jean Abitbol, un grand médecin, spécialiste contemporain de la voix rappelle dans un ouvrage récent que : « Dans la Genèse, c’est parce que Dieu dit « que la lumière soit », que la lumière est. Le dire est le faire exister. C’est parce qu’Il nomme le monde qu’Il le crée. » Tout est donc soumis à l’action de la voix de Dieu ce qui est d’ordre symbolique. Comment parler sans air… Le Seigneur montre donc qu’il est Dieu par cette action. Nouvel étonnement pour nous face à la remarque de Jésus : « « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? » Ils s’interrogent encore : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? » Il a donc voulu les conduire vers la foi qui nous permet d’entrer en contact avec le mystère de Dieu dans une certaine obscurité. Il se laisse deviner par des signes, et nous enseigne par sa parole comment le rejoindre. Le rejoindre où ? Il est dans la barque avec nous, certes mais il veut nous entraîner et nous attendre en définitive sur la rive, c’est-à-dire dans le Royaume. N’est-ce pas ce qui est sous-entendu par la dernière lecture ? « L’amour du Christ nous saisit quand nous pensons qu’un seul est mort pour tous, et qu’ainsi tous ont passé par la mort. »

La question de fond est donc d’abord pour nous, notre difficulté de croire en la puissance de la résurrection de Jésus, lorsque nous sommes confrontés à nos limites, à nos peurs, à nos craintes, à la méchanceté humaine, à la maladie, au chagrin, le nôtre et celui de ceux que nous aimons et finalement au grand passage avec le Seigneur pour le retrouver. Le livre de Job nous parle certainement, il avait tout et il a tout perdu, fortune, famille, santé, considération. Et il se révolte, il crie sa peine vers le Seigneur, il le remet en question et voilà qu’un de ses amis en particulier, vient lui faire un beau sermon en défendant la grandeur et la toute-puissance de Dieu. Le Seigneur l’a mis à l’épreuve et la première partie paraît cinglante : « Ceins donc tes reins comme un homme. Je vais t’interroger, et tu m’instruiras. » Mais au final il le défend et affirme qu’il est juste.

Je crois que personne d’entre nous ne songe un instant à faire le malin lorsqu’il est touché par une épreuve, une trahison. C’est l’angoisse des Apôtres et de Job. Le parcours que nous avons à faire est parsemé de mystères joyeux, lumineux et douloureux pour attendre la rive et le port de sa volonté qui nous permettra de voir son visage.

Une autre difficulté que nous avons pour rejoindre le Seigneur est le fait qu’il ait voulu que son message de vie et de résurrection nous parvienne par d’autres, par ses disciples, par des intermédiaires qui ne sont pas parfaits. Mais c’est lui qui est là et vient nous toucher au cœur. Sa parole, c’est à chacun de nous de la vivre et d’y croire en songeant à celui qui l’a donnée. Nous sommes tous responsables de l’annonce.

Il ne s’agit pas simplement de se remémorer d’événements ou de paroles du passés, mais d’actualiser dans nos vies ce message de vie. La parole de Dieu n’est pas un message figé. Une petite histoire trouvée chez le médecin cité tout à l’heure peut aider à le rappeler. Une légende juive explique que Moïse était devenu bègue enfant parce qu’il avait touché un charbon avec sa bouche. Plus tard, il a vu Dieu dans le buisson ardent, mais ce fut son frère excellent orateur qui transmit la parole reçue et parla à sa place. La parole agit par elle-même et s’adresse à nous personnellement, c’est elle qui vient faire de nous une créature nouvelle.

Notre-Dame de l’Assomption conduis-nous vers le Père. Amen.

dimanche 16 juin 2024

Du blé, de la moutarde, un cèdre et des cieux

 


16 JUIN 2024 - 11ème dimanche du Temps Ordinaire B

https://www.aelf.org/2024-06-16/romain/messe 

Lectures de la messe

Première lecture« Je relève l’arbre renversé »Ez 17, 22-24

PsaumeIl est bon, Seigneur, de te rendre grâce !91 (92), 2-3, 13-14,...

Deuxième lecture« Que nous demeurions dans ce corps ou en dehors, notre ambition, c’es...2 Co 5, 6-10

Évangile« C’est la plus petite de toutes les semences, mais quand elle grandit...

Quelques éléments sur les lectures

Saint Marc nous propose deux paraboles du Seigneur pour nous expliquer ce qu’est la croissance du Royaume, la venue du règne de Dieu. Qu’est-ce que le mot de règne évoque pour nous ? Celui d’une société bien organisée où tout fonctionne dans l’harmonie, où chacun a sa place et contribue à la croissance de l’ensemble, elle paraît vouloir s’étendre à l’infini en conquérant de nouveaux espaces.

La première parabole donne l’exemple du grain de blé qui grandit on ne sait comment jusqu’à produire un bel épi. Aujourd’hui, dans le contexte des connaissances de nos agronomes, si nous admirons la poésie de cette comparaison, peut-être avons-nous quelques interrogations face à ce tableau. Rien ne se passe facilement, surtout dans l’agriculture.

Après le mystère de la croissance de l’épi, l’autre image, celle de la graine de moutarde, se réfère à la petitesse de la graine qui va donner un arbre immense. Tout commence dans l’humilité pour toucher et atteindre le Royaume. Nous reconnaissons sans peine l’idée de la première lecture avec son cèdre. Les cèdres sont des arbres que j’aime beaucoup, on les associe à tout un environnement lumineux. Ils touchent les cieux, leur odeur embaumait toute la montagne du Liban, ils ont servi à la construction du temple. On dit que dans une vallée de la montagne du Liban, trois ont mille ans et dix de plus de mille ans. A Genève, nous en avons parmi les plus vieux d’Europe qui ont vu passer Napoléon. Le thème du réchauffement climatique paraît vouloir nous les amener.

Mais ce n’est pas notre sujet, nous avons une piste connue dans la littérature chrétienne sur la cité d’en-haut et celle d’en-bas, avec Saint Augustin et sa célèbre cité de Dieu. Il a mis 13 ans à la composer pour répondre aux questions que se posaient les gens après le sac de Rome, la ville éternelle, en 410. Éternelle, elle ne l’était pas comme on l’avait longtemps pensé, et c’est l’Eglise qui lui a permis de perdures. Il s’agit d’un cité spirituelle à construire et cette cité c’est l’Église. Où trouver récemment la mention de ce règne et de ce Royaume de Dieu ? Dans les Actes du Concile Vatican II et dans Lumen Gentium d’abord. Par exemple dans cette phrase : « L’Église, qui est le règne de Dieu déjà mystérieusement présent, opère dans le monde, par la vertu de Dieu, sa croissance visible. » Et encore dans celle-ci qui contient une citation de notre Evangile : « Ce Royaume brille aux yeux des hommes dans la parole, les œuvres et la présence du Christ. La parole du Seigneur est en effet comparée à une semence qu’on sème dans un champ (Mc 4, 14) : ceux qui l’écoutent avec foi et sont agrégés au petit troupeau du Christ (Lc 12, 32) ont accueilli le Royaume lui-même ; puis, par sa propre vertu, la semence germe et croît jusqu’au temps de la moisson (cf. Mc 4, 26-29). » 

L’Eglise a toujours eu beaucoup de peine à une certaine époque de se distancer de l’exercice d’un pouvoir temporel pour se protéger et répandre son message et le Royaume. Cela sous certains aspects peut se comprendre, il est nécessaire de disposer d’un minimum de moyens matériels.

Mais il se construit avant tout par la parole reçue en nous et vécue, c’est-à-dire par une adhésion personnelle, par la charité vécue, par l’amour de Dieu et du prochain, à la suite du Seigneur lui-même. Il vient vivre en nous et avec nous pour que son Royaume s’y établisse. Nous utiliserions volontiers d’autres images plus techniques que les images bibliques, aujourd’hui, pour exprimer cette croissance du Royaume, mais ce n’est pas l’image qui est vraiment importante, c’est le lieu de croissance, le cœur de l’homme, de tous les hommes.

Notre évêque a adressé un message aux agents pastoraux dans lequel il fait remarquer que nous passons à une autre étape de l’annonce de l’Évangile que l’a été le Synode 72, pour ceux qui l’on connue. Nous sommes essoufflés et nous ne pouvons plus nous contenter de vivre sur de vieux souvenirs historiques et pastoraux. Il nous dit ceci : « Ce qui me semble le plus important, à relever, c’est que croire en Dieu ne va plus du tout de soi! Pour toujours plus de gens, la question de la foi et de la religion ne se pose même plus. » Dans sa lettre pastorale il nous invitait à la conversion intitulée « Se convertir ». Il s'agit de me détourner non seulement de la culpabilité, des dysfonctionnements, des insuffisances, mais de prendre un  nouveau départ. Il y donne 4 points dont nous verrons tous plus tard les développements. Mais il est certain qu’il ne s’agit pas seulement d’un changement de peau ou de déguisement, ou d’une mue. C’est le Christ qui doit croître en nous et dans son Église.

Nous pourrions peut-être nous dire que prenant de l’âge, étant malades, nous pourrions en rester à ce que nous avons toujours connu. C’est vrai que cela demande de plus en plus d’efforts. Il paraît parfois plus simple de regarder de vieux feuilletons télés que nous connaissons par cœur, Colombo, ou quelques cascades de Belmondo et autres. Aujourd’hui ça n’est plus que du numérique avec des prises de vues d’acteurs intégrées dans des catastrophes virtuelles et accélérées.

Le Christ et l’annonce du Royaume c’est du vrai. Alors pour coller à la réalité utilisons ce moyen qui nous reste celui de la prière du cœur à cœur avec Jésus et Marie. La marche vers le Royaume passe d’abord par la rencontre avec lui dans notre cœur. L’Église a d’abord besoin d’un cœur comme dit sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et vous  êtes ce cœur. Amen.