10 août 2025
19èe dimanche du Temps Ordinaire (semaine III du Psautier) — Année C
Chers frères et sœurs,
Attente, persévérance, patience, espérance et confiance, sont
les mots qui nous viennent à l’esprit après ces lectures.
Le Seigneur nous invite avec force ces états intérieurs, la
vie dans le Christ nous demande de la vigilance et de l’endurance :
« Restez en tenue de service, votre ceinture autour des reins, et vos
lampes allumées. » Pourtant nous sommes en vacances. Il nous demande de
veiller. « Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera
en train de veiller. »
Allez vous veiller ? Nous le faisons peut-être pour des
motifs festifs en cette période de l’année… Les veilles festives ne manquent
pas, mais plutôt dans le Nord. Dans le Sud, vous avez la réputation d’être plus
sages et je crois avoir conservé cet usage. Les années qui passent nous y invite plus
facilement, mais pas toujours.
Le Seigneur nous demande plutôt de veiller à l’image de
ce que nous rapporte le livre de la
Sagesse : Il nous rappelle la veillée du Peuple de Dieu avant de quitter
l’Egypte. Les hébreux attendaient leur libération et la passage de la mer
Rouge. Cette préparation et le passage de la mer rouge nous annonce le baptême.
Par le baptême nous sommes libérés et sauvés, rachetés dans le Christ pour
marcher à sa suite vers la Terre Promise. La Terre Promise, la Patrie
définitive, c’est bien sûr le ciel et la vie éternelle. Ce thème et cette
symbolique traverse les commentaires des anciens auteurs spirituels de
l’Eglise, les Pères de l’Eglise.
La traversée du désert, la marche vers la terre promise ne se
fait pas sans difficultés, à la suite du Christ et à sa manière. Par notre
baptême et par l’Esprit, nous avons reçu sa marque en nous, le baptême est un
sacrement qui imprime en nous, dans notre âme, une marque, ce qu’on appelle un
caractère spirituel. Avec le pain eucharistique la nourriture pour notre voyage.
Le Christ veille sur nous, avec nous et en nous. « Dieu veille sur ceux
qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour, pour les délivrer de la
mort, les garder en vie aux jours de famine. », nous a dit le psaume.
La lettre aux Hébreux met en valeur la foi qui permet la vie
avec Dieu, dans une sorte d’obscurité. La foi permet d’être en communion avec
le Seigneur et pour ainsi dire de toucher de Dieu, spirituellement, de tenir sa
main, comme un enfant dans le noir, qui agrippe la main de sa maman ou de son
papa. La foi permet la transmission de la vie de Dieu qui est amour. Par la
foi, dans mon cœur, je suis en communion avec le Seigneur, même dans les
situations les plus pénibles et il me permet d’avancer.
Vous y avez peut-être été attentifs nous sommes cette semaine
en pleine période d’observations des étoiles filantes, les perséides. La nuit du 12 au 13 août
s’annonce particulièrement propice aux observations, malgré la pleine lune.
Notre vie de foi mentionnée par la lettre aux Hébreux
pourrait être comparée à cette nuit parsemée de signes de la présence de Dieu.
La lumière de la lune, est souvent comparée à la Vierge Marie. Elle est aussi
là. Ces étoiles sont non seulement un signe de présence mais aussi une promesse
de vie et de fécondité attachée à notre fidélité. Mes actes d’amour allument
pour ainsi dire une étoile dans le ciel de Dieu.
Le Pape Léon dans son audience générale de mercredi, nous a
dit que nous sommes invités à “préparer la Pâque” du Seigneur, à faire de notre
vie une préparation de la Pâque que nous
célébrons tous les jours. Chaque geste de disponibilité, chaque acte gratuit,
chaque pardon offert à l'avance, chaque effort accepté patiemment est une
manière de préparer un lieu où Dieu peut habiter et donc de pouvoir avancer
avec nous. Cette Pâque, que les disciples doivent préparer, est en réalité déjà
prête dans le cœur de Jésus. C'est Lui qui a tout pensé, tout disposé, tout
décidé. Cependant, il demande à ses amis de faire leur part. Cela nous enseigne
quelque chose d'essentiel pour notre vie spirituelle : la grâce n'élimine pas
notre liberté, mais la réveille. Le don de Dieu n'annule pas notre
responsabilité, mais la rend féconde.
Préparer la Pâque est difficile mais nous ne pouvons éluder
cette préparation. La vie nous le rappelle par elle-même. Avec notre baptême, nous
n’avançons pas dans notre désert sous narcose. Les chemins sont divers. Nous
fêtions hier, une Sainte Carmélite martyre et copatronne de l’Europe
Edith Stein, Thérèse Bénédicte de la Croix. Elle est morte à Auschwitz. Je vous
cite quelques mots d’elle :
« la foi au Crucifié — la foi vive, celle qui s’accompagne du don
aimant de soi —, cette foi est pour nous l’accès à la vie et le début de la
gloire future ; c’est pourquoi la croix est notre unique titre de fierté. »
« Pour nous, cette vie n’atteindra sa plénitude qu’au jour de la Gloire.
Nous y participons cependant, dès maintenant — « dans la chair » —, dans la
mesure où nous croyons. » Les chemins sont divers dans une convergence et
une unité mystérieuse. En faisant mes lectures du temps de Covid, j’ai
rencontré Etty Hillesum, une jeune juive juriste, passée en psychologie
jungienne. Je n’aurais pas dit Santo Subito, mais à ma grande surprise, j’ai
découvert au bas d’une petite note, que c’est elle qui avait mentionné le nom d’Edith
Stein et de sa sœur dans le registre d’arrivée du camp de départ pour la mort.
Elle y partira, elle aussi peu après. Les chemins de Dieu sont mystérieux.
Mieux vaut être prêtre prudent et éviter les jugements péremptoires sur les
parcours. Dieu seul connaît son chemin dans les cœurs et veut que tous les
hommes soient sauvés et qu’aucun ne se perde.
QU’est-ce
que croire ? Croire ce n’est pas
démontrer que l’on connaît par cœur les articles du credo, mais nous
avons besoin d’un GPS spirituel. Croire c’est adhérer à un mystère et en vivre.
Le mot foi vient d’un mot latin fides qui signifie confiance, avoir confiance
en quelqu’un. Les adultes se serrent la main. La poignée de main est un geste
de salutation et de bienvenue, pour exprimer la paix, la confiance, et
l'amitié. Son origine remonte à l'Antiquité, où, nous dit-on, elle servait à
montrer qu'on était désarmé et qu'on n'avait pas l'intention de nuire. Un père
ou une mère ne peuvent pas vouloir nuire à leurs enfants, ils les prennent par
la main pour leur apprendre à marcher sur les chemins de la vie et les
rassurer. Mais si le Christ est au-dedans de nous, il peut prendre aussi le
visage de quelqu’un que nous ne connaissons pas. Il est au-dedans de lui et
au-dedans de nous. Il y a un mystère de communion et du Christ qui veut être
tout en tous. Je cite encore Zundel en conclusion : Nous devons supplier
la Trinité de s’emparer de toutes les fibres de notre être, pour qu’il soit le
sacrement de Dieu. Avec quelle joie nous pourrons nous perdre dans la tendresse
de Dieu en nous… Toujours fidèles à l’appel, nous deviendrons nous-mêmes un
mystère de foi, une hostie, un fils de Dieu et nous ne pourrons plus nous aimer
qu’à cause de lui et non à cause de nous. C’est pour cela qu’il faut être
veilleurs.
En
psychologie, on parle volontiers et avec raison, de soi et d’estime de soi, il ne faut pas jutifier et accepter de se laisser démolir gratuirement, mais il faut encore
moins oublier l’estime du Christ en soi et dans l’autre. Le Christ est
au-dedans de nous. Le suivre sur son chemin de croix et notre chemin de foi n'est pas appeler le mal bien et le bien mal.
Il est là
pour faire alliance avec nous jusque là.
Nous
pourrons retenir cette image et demander à Notre-Dame d’être à nos côtés pour
nous aider dans notre marche et veiller avec nous. Amen.