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dimanche 10 août 2025

"Tu nous appelais à la gloire " (Sg 18, 9) Estime de soi et estime du Christ en soi.

 


10 août 2025

 19èe dimanche du Temps Ordinaire (semaine III du Psautier) — Année C

 
 

Lectures de la messe

Chers frères et sœurs,

Attente, persévérance, patience, espérance et confiance, sont les mots qui nous viennent à l’esprit après ces lectures.

Le Seigneur nous invite avec force ces états intérieurs, la vie dans le Christ nous demande de la vigilance et de l’endurance : « Restez en tenue de service, votre ceinture autour des reins, et vos lampes allumées. » Pourtant nous sommes en vacances. Il nous demande de veiller. « Heureux ces serviteurs-là que le maître, à son arrivée, trouvera en train de veiller. »

Allez vous veiller ? Nous le faisons peut-être pour des motifs festifs en cette période de l’année… Les veilles festives ne manquent pas, mais plutôt dans le Nord. Dans le Sud, vous avez la réputation d’être plus sages et je crois avoir conservé cet usage. Les  années qui passent nous y invite plus facilement, mais pas toujours.

Le Seigneur nous demande plutôt de veiller à l’image de ce  que nous rapporte le livre de la Sagesse : Il nous rappelle la veillée du Peuple de Dieu avant de quitter l’Egypte. Les hébreux attendaient leur libération et la passage de la mer Rouge. Cette préparation et le passage de la mer rouge nous annonce le baptême. Par le baptême nous sommes libérés et sauvés, rachetés dans le Christ pour marcher à sa suite vers la Terre Promise. La Terre Promise, la Patrie définitive, c’est bien sûr le ciel et la vie éternelle. Ce thème et cette symbolique traverse les commentaires des anciens auteurs spirituels de l’Eglise, les Pères de l’Eglise.

La traversée du désert, la marche vers la terre promise ne se fait pas sans difficultés, à la suite du Christ et à sa manière. Par notre baptême et par l’Esprit, nous avons reçu sa marque en nous, le baptême est un sacrement qui imprime en nous, dans notre âme, une marque, ce qu’on appelle un caractère spirituel. Avec le pain eucharistique la nourriture pour notre voyage. Le Christ veille sur nous, avec nous et en nous. « Dieu veille sur ceux qui le craignent, qui mettent leur espoir en son amour, pour les délivrer de la mort, les garder en vie aux jours de famine. », nous a dit le psaume.

La lettre aux Hébreux met en valeur la foi qui permet la vie avec Dieu, dans une sorte d’obscurité. La foi permet d’être en communion avec le Seigneur et pour ainsi dire de toucher de Dieu, spirituellement, de tenir sa main, comme un enfant dans le noir, qui agrippe la main de sa maman ou de son papa. La foi permet la transmission de la vie de Dieu qui est amour. Par la foi, dans mon cœur, je suis en communion avec le Seigneur, même dans les situations les plus pénibles et il me permet d’avancer.

Vous y avez peut-être été attentifs nous sommes cette semaine en pleine période d’observations des étoiles filantes,  les perséides. La nuit du 12 au 13 août s’annonce particulièrement propice aux observations, malgré la pleine lune.

Notre vie de foi mentionnée par la lettre aux Hébreux pourrait être comparée à cette nuit parsemée de signes de la présence de Dieu. La lumière de la lune, est souvent comparée à la Vierge Marie. Elle est aussi là. Ces étoiles sont non seulement un signe de présence mais aussi une promesse de vie et de fécondité attachée à notre fidélité. Mes actes d’amour allument pour ainsi dire une étoile dans le ciel de Dieu.

Le Pape Léon dans son audience générale de mercredi, nous a dit que nous sommes invités à “préparer la Pâque” du Seigneur, à faire de notre vie une préparation de la Pâque  que nous célébrons tous les jours. Chaque geste de disponibilité, chaque acte gratuit, chaque pardon offert à l'avance, chaque effort accepté patiemment est une manière de préparer un lieu où Dieu peut habiter et donc de pouvoir avancer avec nous. Cette Pâque, que les disciples doivent préparer, est en réalité déjà prête dans le cœur de Jésus. C'est Lui qui a tout pensé, tout disposé, tout décidé. Cependant, il demande à ses amis de faire leur part. Cela nous enseigne quelque chose d'essentiel pour notre vie spirituelle : la grâce n'élimine pas notre liberté, mais la réveille. Le don de Dieu n'annule pas notre responsabilité, mais la rend féconde.

Préparer la Pâque est difficile mais nous ne pouvons éluder cette préparation. La vie nous le rappelle par elle-même. Avec notre baptême, nous n’avançons pas dans notre désert sous narcose. Les chemins sont divers. Nous fêtions hier, une Sainte Carmélite martyre et copatronne de l’Europe  Edith Stein, Thérèse Bénédicte de la Croix. Elle est morte à Auschwitz. Je vous cite quelques mots d’elle :  « la foi au Crucifié — la foi vive, celle qui s’accompagne du don aimant de soi —, cette foi est pour nous l’accès à la vie et le début de la gloire future ; c’est pourquoi la croix est notre unique titre de fierté. » « Pour nous, cette vie n’atteindra sa plénitude qu’au jour de la Gloire. Nous y participons cependant, dès maintenant — « dans la chair » —, dans la mesure où nous croyons. » Les chemins sont divers dans une convergence et une unité mystérieuse. En faisant mes lectures du temps de Covid, j’ai rencontré Etty Hillesum, une jeune juive juriste, passée en psychologie jungienne. Je n’aurais pas dit Santo Subito, mais à ma grande surprise, j’ai découvert au bas d’une petite note, que c’est elle qui avait mentionné le nom d’Edith Stein et de sa sœur dans le registre d’arrivée du camp de départ pour la mort. Elle y partira, elle aussi peu après. Les chemins de Dieu sont mystérieux. Mieux vaut être prêtre prudent et éviter les jugements péremptoires sur les parcours. Dieu seul connaît son chemin dans les cœurs et veut que tous les hommes soient sauvés et qu’aucun ne se perde.

QU’est-ce que croire ? Croire ce n’est pas  démontrer que l’on connaît par cœur les articles du credo, mais nous avons besoin d’un GPS spirituel. Croire c’est adhérer à un mystère et en vivre. Le mot foi vient d’un mot latin fides qui signifie confiance, avoir confiance en quelqu’un. Les adultes se serrent la main. La poignée de main est un geste de salutation et de bienvenue, pour exprimer la paix, la confiance, et l'amitié. Son origine remonte à l'Antiquité, où, nous dit-on, elle servait à montrer qu'on était désarmé et qu'on n'avait pas l'intention de nuire. Un père ou une mère ne peuvent pas vouloir nuire à leurs enfants, ils les prennent par la main pour leur apprendre à marcher sur les chemins de la vie et les rassurer. Mais si le Christ est au-dedans de nous, il peut prendre aussi le visage de quelqu’un que nous ne connaissons pas. Il est au-dedans de lui et au-dedans de nous. Il y a un mystère de communion et du Christ qui veut être tout en tous. Je cite encore Zundel en conclusion : Nous devons supplier la Trinité de s’emparer de toutes les fibres de notre être, pour qu’il soit le sacrement de Dieu. Avec quelle joie nous pourrons nous perdre dans la tendresse de Dieu en nous… Toujours fidèles à l’appel, nous deviendrons nous-mêmes un mystère de foi, une hostie, un fils de Dieu et nous ne pourrons plus nous aimer qu’à cause de lui et non à cause de nous. C’est pour cela qu’il faut être veilleurs.

En psychologie, on parle volontiers et avec raison, de soi et d’estime de soi, il ne faut pas jutifier et accepter de se laisser démolir gratuirement, mais il faut encore moins oublier l’estime du Christ en soi et dans l’autre. Le Christ est au-dedans de nous. Le suivre sur son  chemin de croix et notre chemin de foi n'est pas appeler le mal bien et le bien mal.

Il est là pour faire alliance avec nous jusque là.

Nous pourrons retenir cette image et demander à Notre-Dame d’être à nos côtés pour nous aider dans notre marche et veiller avec nous. Amen.


dimanche 3 août 2025

Les Temps Modernes ? Le Temps de l'Espérance.

 



3 août 2025

 18ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine II du Psautier) — Année C

Lectures de la messe


Chers frères et sœurs, chers amis,

Vous vous êtes revêtus de l’homme nouveau pour vous conformer à l’image de votre Créateur, vous avez à vous renouveler sans cesse en vue de la pleine connaissance, afin que le  Christ soit tout, et en tous. J’aimerais vous proposer une petite homélie de vacances, pour vous éviter de la fatigue. Et voilà que saint Paul nous propose un  mouvement perpétuel jusqu’à ce que le Christ soit tout en tous

Le Seigneur dans l’Evangile nous invite à ne pas nous laisser hypnotiser par un grenier ou un frigo plein et nous reposer dans une perspective de vacances spirituelles. Nous avons été créés pour beaucoup plus, pour la vie en Dieu et avec Dieu. Il s’agit donc bien d’une construction spirituelle.

Le repos est bien la finalité des vacances. Mais pour notre vie avec Dieu, qu’en est-il ? En langage mystique il existe une belle expression le repos en Dieu. De quoi s’agit-il ? il faut dire adieu aux prières discursives et aux raisonnements théologiques, même à l’enchaînement de dizaines de chapelets. Le Seigneur à un moment fait tout le travail. La contemplation est silencieuse, souvent comparée au sommeil amoureux dans le Cantique des Cantiques. L’âme est "en" Dieu, et Dieu est "en" elle. Saint Benoît dit que le chemin de l’union à Dieu passe par la prière et le travail. Mais que si un frère est pris dans sa prière il ne faut pas le déranger. Il est seul avec le seul qui est en lui.

Les lectures d’aujourd’hui nous le rappellent sans conteste, tout est vanité nous dit l’Ecclésiaste. Le Seigneur nous met en garde contre une suractivité qui nous dissimule la finalité de notre vie.  

Dieu réveille ce propriétaire de l’Evangile   : ‘Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ?’ Ce riche pauvre, pauvre de Dieu a oublié un élément important : le but de notre vie n’est pas dans la consommation et la contemplation de ce que nous avons accumulé, mais dans notre rencontre avec Dieu et notre vie en lui.

Le temps qui nous est donné pour nous reposer et nous mettre en retrait de nos activités habituelles, nous donne l’occasion de bilans personnels. Nous calculons peut-être l’état de nos finances, le nombre de nos années avant la retraite. Après, peut-être faites-vous comme moi en vous demandant : comment est-ce que je peux encore rendre service ? Puis vient une incise supplémentaire : Et si je me mettais à penser à Dieu ? Car finalement, ce que nous vivons a un but et un sens. Quelles sont les valeurs que je poursuis ? Quelle est mon espérance ? Tout cela me dépasse tellement que celui qui en est à l’origine ne peut être que très grand et très présent. Le Seigneur nous dit qu’il est devenu l’un de nous, un homme comme nous. Ce que nous vivons a une correspondance, un répondant en lui, c’est une porte de Dieu en nous. Pardon pour le rapprochement, mais il n’est pas question de méditer uniquement devant la porte d’un garde-manger ou d’un frigo plein.

Toutefois, les nouvelles du 1er août nous ont donné bien des inquiétudes. De mon enfance au collège des Pères du Saint-Esprit, au Bouveret, au bord du Léman, j’ai gardé le souvenir de Charly Chaplin. Il s’était assis sur un banc près du débarcadère et il regardait pensivement la côte d’en face avec Vevey où il habitait, ou plutôt Corsier-sur-Vevey. Vous avez peut-être en mémoire son dernier film comme acteur : Les Temps Modernes, de 1936, consacré aux problèmes économiques de l’époque. Il avait en particulier dénoncé le travail à la chaîne, ce qui avait fâché. Gagner son pain est un souci, surtout lorsque nous entendons les mauvaises nouvelles des actualités. Votre inquiétude est aussi la mienne. J’ai des souvenirs de ma grand-mère à Tramelan à cette époque. Pourtant le Seigneur, en un temps qui n’était pas doté de notre technologie, et de nos standards de vie, incite ceux qui l’entendent à faire confiance à leur Père des cieux. Il envoie ses disciples sur les routes, pour annoncer la bonne nouvelle. Ils doivent dire à ceux qu’ils rencontrent que leur Père est avec eux  et en eux.

Il ne s’agit pas seulement de fabriquer des choses, même géniales, qui se vendent, mais de participer à l’œuvre du créateur, pour donner un sens à leur vie et découvrir celui qui habite en eux et veut leur parler. Il s’agit de découvrir Dieu présent en moi et qui agit en et par moi. Il est en moi, dans les autres et dans la création. Cette rencontre avec lui est première. Une des questions aujourd’hui est celle de la transmission de la foi. Apprendre un métier oui, mais trouver et donner du sens à sa vie en fonction de notre place dans l’univers visible et invisible est tout aussi important. On ne peut plus jeter aux oubliettes comme il y a 50 ans, la vie spirituelle. Même la création interpelle : une simple visite à l’expo du CERN, m’avait interpellé il y a quelques années. Comment un monde qui a commencé si petit, surgi tout à coup et si  complexe... peut-il avoir abouti à ce que nous soyons là maintenant. Lancer un bloc-note en l’air suffit-il pour le rattraper avec un de ces algorithmes magiques  qui donnent les intelligences artificielles d’aujourd’hui? Elles fascinent et inquiètent… mais sont sans intelligence du coeur, froides et sans âmes bien que très polies. Cela fait   penser aux temps modernes de Chaplin, même s’il faut évoluer avec son temps. Avons-nous suffisamment confiance en nos capacités de résiliences ? De résilience spirituelle aussi. Sommes-nous à l’écoute de Dieu qui est en nous ?

L’attrait pour le religieux est-il pas le premier de nos soucis? Il est l’ultime. Pourquoi ne pas y songer plus tôt ou y faire songer ? Le Seigneur a besoin d'ouvriers, il a besoin de vous. Il a besoin de prêtres.  Nous avons célébré les funérailles d’un confrère africain à Delémont voici 2 semaines. Il y a la meilleure des justifications : les vacances nécessaires et le ministère. Mes confrères du Jura Pastoral sont épuisés par le ministère. Je me suis retrouvé sur 14, le seul prêtre qui n’était pas d’origine africaine…  Cela peut donner à penser à des urgences. Appelez vos jeunes au service du Christ!

Un des jeunes hier soir a posé une question au pape Léon hier soir : Nous sommes attirés par la vie intérieure, même si, à première vue, nous sommes perçus comme une génération superficielle et irréfléchie. Au plus profond de nous-mêmes, nous nous sentons attirés par le beau et le bien, sources de vérité. La valeur du silence, comme lors de cette Veillée, nous fascine, même si parfois elle inspire la peur par un sentiment de vide. Saint-Père, je voudrais vous demander : comment pouvons-nous véritablement rencontrer le Seigneur ressuscité dans nos vies et être sûrs de sa présence, même au cœur des épreuves et des incertitudes ? Comment y répondriez-vous? Notre-Dame de la Saint Espérance priez pour nous.


dimanche 20 juillet 2025

Accueil

 


20 juillet 2025

 16ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine IV du Psautier) — Année C

 
 

Lectures de la messe



Cher Frères et Sœurs,

Quel autre thème prendre aujourd’hui que celui de l’accueil, après avoir écouté nos lectures ? Nous recevons des visiteurs et pouvons aussi ouvrir notre porte à d’autres visiteurs spirituels en même temps.

La première lecture nous parle des trois visiteurs accueillis par Abraham. Elle est représentée notamment sur une icône célèbre d’Andreï Roublev que j’avais pu voir dans la galerie Tretiakov à Moscou. Elle a été transférée à la Cathédrale du Christ-Sauveur de la même ville. Nous n’aurons certainement pas le temps de la revoir, vu le cours actuel des choses et les circonstances de la vie. Il s’agit de l’hospitalité d’Abraham.

Le psaume qui suit nous parle encore de tente, mais il introduit un autre élément, celui de l’accueil dans la tente de Dieu. Seigneur, qui séjournera sous ta tente… Celui qui se conduit parfaitement.

La deuxième lecture amène un autre élément qui n’a rien à voir avec des échanges de politesse : «  Je trouve la joie dans les souffrances que je supporte pour vous ; ce qui reste à souffrir des épreuves du Christ dans ma propre chair. »

Le centre de l’accueil vient enfin, celui de Jésus dans la maison de Marthe et de Marie qui est aussi celle de Lazare. La partie masculine de humanité se demande : Pourquoi Saint Luc ne mentionne-t-il pas Lazare ? Et nous alors ? C’est une caractéristique de Saint Jean.  Jésus le réserve pour sa résurrection, ce qui n’est pas mal. Résurrection de l’homme… Les Pères de l’Eglise ne se osent même pas la question. Les Evangélistes veulent certainement s’intéresser à la leçon spirituelle que veut donner Jésus.

Sans aucun doute, il veut que nous soyons d’abord attentif au cœur à cœur avec lui, à notre prière. Le temps de vacance est idéal pour cela. Marie, « s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. Marie a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée. » Il est certain que lorsque nous recevons un hôte, c’est faire preuve d’une élémentaire délicatesse que quelqu’un reste avec lui et qu’il ne soit pas laissé  seul devant la télé. Permettons-nous un anachronisme : est-ce qu’on peut laisser seul Jésus devant la télé ? Il n’est pas venu pour cela, mais pour nous rencontrer.

Nous avons remarqué la différence entre l’évangile avec l’accueil de Marthe et Marie celui d’Abraham.  Abraham va vite faire travailler sa femme, tue le veau gras, accompli tout ce travail pour bien recevoir. Les trois hôtes restent seuls. Pourtant l’hospitalité orientale est proverbiale. Peut-être Abraham pense-t-il que ces trois étrangers peuvent parler entre eux ? Quelle langue parlent-ils ? La question n’est pas sans intérêt. Ils se comprennent certes, la Trinité parle le même langage de l’amour et du don de soi, Mais avec Abraham quel dialogue ? Il se s’agit de l’établir. Pour ce faire, les trois personnages veulent le remercier par un cadeau royal, celui du don de la vie. Cela va faire rire Sara. Qui croirait à la naïveté féminine ? Empathie, serviabilité, savoir faire, mais l’expérience aguerrit rapidement.  

Sur l’icône de Roublev où les trois personnes représentent dans la tradition chrétienne les trois personnes de la Trinité, on voit sur la table au centre, un plat avec semble-t-il un agneau selon certaines interprétations, ce qui nous fait penser à l’Eucharistie et au don de la vie, à l’agneau qui se sacrifie pour créer ce lien de l’amour, ce langage commun en elle-même, mais aussi langage entre elle et nous.

Le Seigneur vient chez Marthe et Marie non seulement pour un repas, ce qui est important, mais pour être accueilli lui-même dans les cœurs. Il existe une langue du cœur entre lui et nous. Il veut venir habiter en nous pour que nous puissions à notre tour, habiter en lui. Il veut nous inviter, nous faire le don de la vie. Avec le temps qui passe, nous sentons de plus en plus l’importance et même l’urgence d’être bien accueillis nous aussi et de pouvoir accueillir.  Pourquoi ne pas y accorder autant d’importance que pour les urgences de nos hôpitaux ? Où se trouve la clef de la salle d’urgences de mon cœur ? de la salle d’urgence pour mon cœur ? Cette clef de l'Amour, cette clef qu'est le Christ?

Je ne vous apprendrai rien en nous rappelant que si charité bien ordonnée commence par soi-même, l’accueil du prochain est tout aussi important. Dans la Lettre aux Hébreux, il y a ce passage significatif :  « N’oubliez pas l’hospitalité : elle a permis à certains, sans le savoir, de recevoir chez eux des anges ». Hb 13,2. Saint Augustin le mentionne dans sa Cité de Dieu : « Il n’est pas dit qu’Abraham vit trois dieux, mais trois hommes. Et quand ils lui parlent, c’est souvent un seul qui parle comme Dieu. Le mystère de la Trinité dans l’unité y est voilé. » Deux homélies de saint Jean Chrysostome en parle aussi, montrant Abraham comme un modèle d’hospitalité chrétienne : « Remarquez combien il est empressé, combien il est humble… Abraham court, il s’abaisse, il s’adresse à eux comme à des seigneurs. »

Quel message le Seigneur nous délivre-t-il ? Après l’annonce, l’écoute, il y a la croix puis la résurrection. Cela se fait par étape. Il est destiné à tous. Qui serait assez naïf pour croire à une solution de facilité universelle ?

Posons-nous encore une seule question : Suis-je capable de reconnaître le Christ dans mes visiteurs de cet été ?

Impossible de passer à côté de l’hospitalité de Marie à l’Annonciation. Elle reconnaît l’Ange et accueille son Fils et son Seigneur en elle. A l’inverse de Sara, elle ne rit pas devant l’impossible. Marie est le modèle du cœur qui entend la parole de l’Ange, qui l’écoute, l'accueille et lui permet de donner son fruit. « Qu’il me soit fait selon ta parole. Amen. » 




dimanche 13 juillet 2025

Le Bon Samaritain

 

 15ème dimanche du Temps Ordinaire (semaine III du Psautier) — Année C 13 juillet 2025

 
 

Lectures de la messe


Chers Frères et Sœurs,

Nous venons d’entendre 4 textes qui expriment l’immensité de Dieu, sa grandeur et sa proximité, celui qui est au-delà de tout et celui qui est en nous et juste à côté de nous, présent dans le plus petit.

L’hymne au Christ de l’épitre aux Colossiens nous le présente dans son identité profonde et son aboutissement. Le Père n’est pas mentionné. Le Christ Jésus est le médiateur, celui qui est au sommet et à l’origine de la création, au cœur et au centre de toute relation avec le Père, pour tous les êtres créés, hommes et anges. Il est la porte vers le Père. Il est le Messie glorieux et infiniment riche de par la pauvreté qu’il a revêtue, de par l’amour qu’il a manifesté pour son Père et chacun de nous personnellement et collectivement.  “Il est avant tous les êtres et tout subsiste en lui… en lui, toute chose a son accomplissement total, sur la terre et dans les cieux, par le sang de sa croix.” Il est la révélation du Père en lui tout se récapitule, tout est réconcilié, tout est accompli et tout est créé et recréé. En lui nous ressusciterons, cette résurrection a déjà commencé en nous par notre baptême. Il vient nous rejoindre personnellement, en nous prenant par la main, avec nos blessures, il nous charge sur son épaule, il nous soigne, il nous donne les premiers soins, il nous porte lui-même jusqu’à l’aubergiste qui doit finir le travail et qu’il paye de son amour, lui aussi. L’Evangile du Bon Samaritain, nous est destiné à chacun. Nous sommes tantôt aubergiste, tantôt celui qui est blessé et ramassé sur la route. Nous sommes tous aimés, aidés et sollicités par le Christ.

Sommes-nous capables de le reconnaître ? Il se cache et se révèle quand il veut, dans celui que nous rencontrons. Il n’est pas enfermé dans une doctrine proclamée et véridique certes, mais transformée en idéologie assénée. Le savant docteur de la loi dit à Jésus ce qui en est le cœur, et le centre de vie, ce petit mot « aimer » : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même. ».

Comme exemple, Jésus prend un hérétique, un Samaritain, et c’est un prêtre qui fait les frais de la parabole. Le docteur de la loi, un légiste, un scribe, ni prêtre, ni lévite,  a voulu mettre Jésus à l’épreuve. Le grec dit parfois   « maîtres de la Loi » pour désigner ces docteurs. Ce n’est pas le cas, ici , mais celui-ci appelle  Jésus « Maître » « Didaskale » . Jésus prend un prêtre et un lévite pour son illustration, ce qui ne doit pas déplaire totalement  à son docteur d’interlocuteur.  Maurice Zundel dit que cette parabole est un chef d’œuvre de l’humour polémique . Le schismatique détesté doit être reconnu comme ayant la clef de l’amour vécu pour accomplir l’Ecriture. Le docteur de la Loi en convient, il est le modèle de la charité. Le prêtre et le lévite dévots se sont arrangés pour ne pas voir le malheureux gisant au bord de la route.

Elle n’était pas sûre entre Jérusalem et Jéricho. Elle était dangereuse à cause de son relief abrupt, mais aussi en  raison du danger constant pour les voyageurs en raison des nombreux bandits qui s’y dissimulaient. J’en ai le souvenir du parcours avec un car chaotique, qui nous faisait encore nous rappeler nos prières, il y a 50 ans.

Lorsque le Samaritain se laisse toucher par ce blessé, il prend le risque de tomber lui-même dans un piège, mais il le soigne et le conduit à l’auberge. Comment le fait-il avec quelle recette ? De l’huile et du vin.

En lisant le programme des médiévales de Saint-Ursanne  sur internet, j’ai vu qu’on y parlait des remèdes de l’époque qui devaient ressembler à ceux du temps de Jésus. On utilisait passablement d’herbes et d’huile, du vin pourquoi pas. Mon côté taquin m’a fait penser à de la salade. Si vous avez du temps pendant vos vacances vous pouvez faire une recherche sur les médecins dans la Bible et les remèdes. Relisez le chapitre 38 de Ben Sira : « 01 Honore à sa juste valeur le médecin pour ses services : le Seigneur l’a créé, lui aussi. 02 C’est du Très-Haut, en effet, qu’il tient son art de guérir, et le roi lui-même lui fait des présents. 07 Le médecin utilise les plantes pour soigner et ôter la douleur. » Plus loin Ben Sira est prudent quant au succès des soins. Être le médecin de son frère n’est pas toujours facile, les soignants en savent quelque chose. Quant aux autres soins matériels, au bénévolat et aux soins spirituels, ca n’est pas une sinécure. Saint Vincent de Paul appelait ceux qu’il assistait avec ses sœurs : les pauvres nos seigneurs et nos maîtres. Hier, comme aujourd’hui il faut beaucoup d’humilité et de courage et de cœur pour le faire et du  côté des soignés, ravaler sa fierté et accepter de se laisser aider. Il serait aussi bon pour nous de faire de temps à autre, un inventaire de nos pauvretés… et ne pas oublier de nous aider nous-mêmes pour être capable de solidarité et construire le Royaume  Le pape Léon dans son message pour la journée des pauvres en novembre, nous dit que « La Cité de Dieu nous engage   pour les cités des hommes. C'est de charité que nous avons besoin aujourd'hui, maintenant. »

Nous avons peut-être fait l’expérience particulière d’avoir été aidés par des personnes qui n’étaient pas aussi parfaites que les modèles de notre pensée unique. Il y a parfois de quoi se remettre en question, alors que nous sommes bien installés et à l’abri derrière les hautes barrières de nos habitudes et nos certitudes d’être dans le vrai, le raisonnable, et le bien.

Le Seigneur ne nous indique-t-il pas ce que nous avons à réaliser   chaque jour, dans les situations où nous nous trouvons, si nous voulons mettre en pratique le commandement “Tu aimeras ton prochain comme toi-même”, pas seulement comme un ordre de marche pour payer un impôt de charité, mais pour le découvrir, lui qui est le pauvre autour de nous, mais aussi en nous. «A quelle pauvreté et en qui reconnaîtrai-je mon prochain?»

En ce temps de vacances, ne pourrions-nous pas écouter notre cœur ? Le docteur de la loi a réussi à se remettre en question, pourquoi pas nous ?

Très Sainte Vierge Marie, Notre Dame de la Compassion. Mère pleine de miséricorde et de tendresse. Que nous découvrions au creux de ton Amour, le bonheur d'aimer et d'être aimés. Donne-nous le courage de voir les plaies du monde, et la force de les soulager.  Fais de nos déchirures un passage, et de nos blessures un chemin. Amen.


dimanche 29 juin 2025

Saints Apôtres Pierre et Paul. Petra et Petrus

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« Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! »

Chers frères et sœurs, chers amis

 

L’Evangile et les autres lectures nous donnent une impression de lumière et de ténèbres.

La lumière est présent dans l’Evangile, ainsi que la fragilité de Pierre qui contraste avec la promesse de Jésus : « Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. »

Cette promesse lui est faite parce que ce que le contenu de sa confession de foi lui a été révélé par le Père , Jésus la confirme. Ce processus de reconnaissance et de confirmation est important aussi pour notre propre vie spirituelle. Jésus la confirme et lui fait une promesse, lui donne une autorité et une mission. Ce rapport de communion est important dans l’Eglise encore aujourd’hui.

Nous interpelle également, la  traversée des ténèbres et la souffrance qui entourent autant le ministère de Pierre que celui de Paul. Nous pouvons retenir le refrain du psaume : «  De toutes mes frayeurs, le Seigneur me délivre. » Des frayeurs, il y en a, de la prison, des naufrages, des coups aussi, mais le Seigneur délivre son messager pour que le message soit transmis. Une force particulière les accompagne, mais ne les dispense surtout pas d’être configurés au mystère du Christ crucifié, autant Pierre que Paul. Nous avons là aussi un signal quant à notre mission. Ce que nous traversons a un sens, y compris lorsque nous souhaiterions bénéficier de plus d’antalgiques spirituels.

Le Pape, évêque de Rome porte deux missions : 1) celle de la communion et de la conduite de l’Eglise 2) ainsi que celle de la mission avec Paul. Le feu qui animait Paul devrait aussi nous animer pour transmettre la Bonne Nouvelle, selon notre charisme propre. Transmettre la Bonne Nouvelle, une Bonne Nouvelle vécue, n’est-ce pas transmettre et donner la vie de l’Esprit ? Dieu a une curieuse manière de procéder, il passe par des Apôtres fragiles, difficiles et imparfaits. L’histoire de l’Eglise est pleine de scandales et pourtant Dieu est fidèle. On croirait qu’il veut nous  rappeler que nous avons été tirés de la boue et de la terre, une terre douloureuse et souffrante, déjà glorieuse pourtant, et qu’il n’en finit pas de générer son nouveau modèle d’homme pardonné à l’image de son Fils. On parle de golem être de boue inachevé et c’est bien le Seigneur qui achève de nous donner forme.

Nous avons eu le bonheur d’accueillir notre nouveau pape, Léon, qui nous surprend par des caractéristiques de communion intercontinentales, il a même une ascendance  africaine subsaharienne et aussi française. Il est vrai que les recherches génétiques à la mode sont intéressantes, mais c’est l’Esprit qui sauve tous les hommes. Le baptême est un don fondamental.

Il est intéressant de relever  l’histoire de la perception du service de Pierre  par  Augustin au 4ème siècle. Chaque évêque succède à Pierre dans cet office : il veille à garder l’unité de la foi, à maintenir la paix dans le corps ecclésial, et à dispenser les sacrements. Augustin reconnaît l'importance particulière de Pierre, mais il insiste avant tout sur la foi et l’universalité de l’Église. La perception de l’exercice de cette charge s’est affinée et discernée dans le temps, jusqu’à l’infaillibilité pontificale en certaines circonstances. Les successeurs de Pierre à Rome vont assumer ce rôle de Pierre, pour accompagner et conduire l’Eglise. Nous nous souvenons que Benoît XVI a pris le titre de Pape émérite, par respect pour cette fonction hors norme, hors catégorie.

La Prière pour le pape est une des grandes intentions du Carmel. Nous nous rappelons le pèlerinage à Rome, en passant par le Valais, de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus pour demander à Léon XIII, d’entrer au Carmel à 15 ans…  Elle l’a fait le 20 novembre 1887. Il a commencé par lui dire : «Je ne comprends pas très bien.» pour conclure  en la regardant avec bonté : «Eh bien, mon enfant, faites ce que les supérieurs vous diront.» Voilà pour un discernement.

Quant à notre pape Léon, nous nous interrogeons sur ce que pourront être ses options peut-être en dévoilera-t-il quelques-unes de plus aujourd’hui ? Il appelle à l’unité et à la paix . Avant-hier, il  a insisté pour que chaque prêtre devienne « artisan d’unité et de paix », en cultivant le discernement, la réconciliation et la fraternité sacerdotale.

Aux évêques, il a demandé d’être des exemples visibles d’unité dans l’Église particulière qui leur est confiée.  Ils doivent être hommes de vie théologale, dociles à l’action de l’Esprit Saint, qui suscite en lui la foi, l’espérance et la charité et les nourrit, comme la flamme du feu, dans les différentes situations existentielles.

Un  Synode spécial consacré à la réconciliation ecclésiale en 2026. On parle de voyages pastoraux en Afrique et en Asie à l’horizon 2026, pour encourager les Églises locales et renforcer la communion universelle. Les jeunes ne sont pas oubliés ni le sport, mais pas aujourd’hui.

Nous pouvons conclure avec Notre-Dame. Vous n’ignorez pas qu’en peinture, il existe une technique dite du clair obscur l’artiste joue sur les contrastes marqués entre la lumière et l’ombre pour créer une impression de volume, de profondeur et de relief dans une œuvre. On cite notamment la Vierge aux Rochers de Léonard de Vinci. Cette image nous donne une représentation de l’environnement ecclésial et nous rappelle la proximité de Marie avec Pierre. Au Carmel de Develier, la pierre de fondation de la chapelle cite 1 Co 10, 4 : ce rocher, c’était le Christ. Petra autem erat Christus. Augustin la reprend dans son contre Faust .  Petrus, Petra, la Vierge du rocher, tout est là. Amen.